samedi 9 mars 2019

Un temps pour haïr. Marc Weitzman.

Lorsque j’ai entamé la lecture de ce livre au début de la crise sociale des gilets jaunes, je me suis demandé si je n’étais pas en retard d’une guerre, et puis les meurtres de Strasbourg sont survenus, alors le travail de l’ami de Philip Roth m’a semblé plus que jamais nécessaire.
Et puis sont advenus les évènements de Mistral, ça n'arrête pas, la haine est toujours installée aux ronds points de l'actualité.
Le titre pourrait sembler inapproprié puisque l'expression « un temps » appelle à passer à autre chose, bien que surgissent sans cesse de nouveaux crimes perpétrés au cri de « Allahu akbar ». 
Ces 500 pages se lisent facilement, alternant témoignages poignants et réflexions nouvelles qui évitent d’entrer dans un système explicatif figé, mais rappellent des faits historiques masqués par les nouvelles émotions de l’heure.
Ainsi se remémorer tout ce que la guerre civile en Algérie a pu déterminer, remettre en évidence le nombre et la gravité des actes antisémites en France, apprendre quelques accointances étonnantes qui firent qu’un ancien SS devint un conseiller de Nasser, est tout à fait salutaire. L’officier de Franco auteur de la formule : «  Viva la muerte ! » était aussi celui qui disait «  A mort l’intellectualité traîtresse ! »
«  Car lui aussi voulait la peau des « élites », lui aussi cherchait l’imbécillité mystique et joyeuse qui peut tout, l’hilarité courant au dessus de la peur, la vélocité pour sortir de ce monde, se dépêchant de nous laisser aux ingrates politesses du quotidien afin de monter à la lumière en riant, comme l’écrit Genet dans le Dies Irae dans son ode aux palestiniens … »
Depuis que le terme « intello » est devenu une insulte, je me désespère, non pour revêtir l’uniforme, les lacunes de ma culture et les lenteurs de mes synapses m’en gardent, mais je me jette avec encore plus de plaisir dans les approches historiques éclairantes, les citations nourrissantes.
« Dreyfus représentait l’universalisme, ou, pour le dire avec les mots de Maurras, le pays légal- celui d’une caste hypocrite, au fond si peu nationale qu’elle avait besoin pour se légitimer, de la Loi et  des droits. En face, se dressait contre elle, le pays réel, authentique, ancré dans l’honneur, dans la foi et les traditions. A la même époque, quoique sous d’autres latitudes, le wahhabisme et les Frères musulmans, en quête d’un islam authentique contre les influences modernes, formulaient le conflit dans des termes exactement similaires. »
 

3 commentaires:

  1. Bon, je prends une grande respiration, et je plonge...
    S'il y a quelque chose que je constate avec une certaine inquiétude (et une inquiétude certaine) dans ce pays, mais pas seulement, c'est l'incapacité de certains d'entre nous de reconnaître qu'ils peuvent être le lieu où se déploie... la haine ? la colère ?
    Certains refusent de reconnaître que ces affects font partie de l'humaine condition. Certains persistent à penser.. QU'ILS SONT DES SAINTS VIVANTS et qu'il faut que nous soyons tous des saints vivants.
    Cette attitude me semble puérile et injustifiée, d'après ma propre expérience... du monde, et de moi, d'ailleurs.
    Cette attitude continue à faire monter la pression sur les pauvres créatures de chair que nous sommes dans la vie quotidienne, et cela ne fait pas de bien à la collectivité, par extension.
    Il y a des années que j'ai été estomaquée en lisant sous la plume de Françoise Dolto qu'elle ne connaissait pas la haine. Cette parole, loin de m'impressionner, m'a inquiétée, et continue de m'inquiéter. Pourtant, cette parole fut citée en admiration par la grande majorité de mes pairs.
    Je constate que la plupart d'entre nous qui tenons ce genre de paroles ont une vie TRES CONFORTABLE, de mon point de vue. Cela ne veut pas dire qu'il n'est pas possible d'être ? de devenir ? un saint moderne, mais il faut avoir un peu plus d'expérience en la matière que la plupart de nos contemporains, si promptes à tenir des discussions de salon.. partout maintenant, comme le salon s'est élargi de manière vertigineuse.
    Pour les actes d'antisémitisme, je vais me contenter de faire remarquer que le Judaïsme est la mère de tous les monothéismes, et cela inclut le(s) Christianismes, qui sont des hérésies juives. Il y a des tensions structurales incandescentes entre une religion et ses hérésies, comme il y a des tensions entre... une religion et les idéologies/avatars qui en dérivent. Et ces tensions ne peuvent qu'entretenir des désirs.. d'exclusion, mais aussi de sécession, où le travail de la haine (nécessaire...) s'exerce. Pour appartenir à quelque chose il faut procéder à UNE/DES exclusion(s). Credo. Ne pas vouloir voir cela, c'est se condamner à la non pensée des bons sentiments qui ne sont pas si bons que ça, d'ailleurs, et mènent allègrement en enfer.
    Et encore pour l'antisémitisme, puisque c'est un sujet qui m'est cher, il est problématique à la hauteur de déterminer qui est juif, à l'heure actuelle, et ce qu'est le judaïsme. Pour DEVENIR juif, il faut.. se convertir, Guy, mais, il y a l'épineux problème d'une identité qui dérive d'être né de mère juive, et cela, ce n'est pas soumis à une CONVERSION...
    A moins que... on ne puisse pas DEVENIR/SE CONVERTIR au Judaïsme, et être juif ?..
    Je te laisse méditer cela pendant plusieurs minutes.
    Tout cela est très... confus, et l'est depuis très longtemps, d'ailleurs.
    Et cette confusion pose grandement problème à l'Occident. Depuis très longtemps.

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  2. Mince, moi qui croyais m'approcher de la sainteté, quoique le saint Guy n'eut pas toute sa tête. Mais au moins je gagne souvent à susciter chez au moins une lectrice des pensées tout à fait intéressantes, tout en me donnant l'occasion de me montrer encore désespérément gentil. Merci de m'éviter de me complaire dans la mièvrerie et le contentement de soi.

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  3. Ah... je sens une pointe d'ironie, là, non ? ;-)

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