Vaste programme sous forme d’ « espace de
médiations » bardés de # et de « playroom »
où j’ai accompagné mes petits enfants que les parents épargnent plus des écrans
que moi qui ai souvent la partie belle à leur faire découvrir des films : fastoche, la pelloche.
Nous avons testé Super Mario et réalité virtuelle,
coloriages à animer : ainsi Perrette a vu disparaître cochons et couvée. Quand
La Fontaine se redécouvre ainsi, j’adore, comme la rencontre des lambris et
des hastags.
Et puis le nostalgique des forums de Libé, que je suis, a retrouvé dans deux conférences quelque
plaisir lointain, bien que le format d’une heure m’ait paru trop petit,
d’autant plus qu’était introduit un dispositif interactif de questions-réponses
par téléphone portable que les geeks présents ont investi promptement.
Peut-on élever ses
enfants grâce à Internet ? « Grâce » ou « Malgré » ?
Michel Guillou aime se présenter comme un observateur et avec
Louise Tourret journaliste à France Culture, ils ont distingué information et savoir alors que le
numérique s’est affranchi de ses racines informatiques pour devenir plus
culturel et social. Ceux qui diabolisent ces machines permettant un accès à
une masse d’informations colossale et un accès inédit à la liberté d’expression
appellent plutôt à un rappel des apports essentiels d’Internet.
Vis-à-vis des enfants, un peu d’attention, un accompagnement, une surveillance,
un apprentissage de la frustration leur permettront d’avancer vers des choix
éclairés.
Qui consulte encore des encyclopédies ? Qui lit encore
des journaux ? J’ai bien aimé l’image d’un bambin lâché dans une
bibliothèque, il faut lui donner un mode d’emploi. Pour le web c’est pareil , bien que pas facile, alors que se jouent les problèmes éternels du temps.
Après coup j’ajoute : plus que jamais les enjeux sont cruciaux depuis que les tutoriels s'apprêtent à tuer les tuteurs. Qui émet ? Qui aime ? Qui est entendu ? Quand nous sommes assaillis par tant de porteurs
de casques et de cagoules, et tous ces pseudos, que peuvent encore la
littérature, la culture ? Qui veut du lien ?
Ces grains de sel viennent tardivement en n’ayant pas osé
poser la question qui me semblait trop conventionnelle pour une tribune de spécialistes.
« Pourquoi les enfants des ingénieurs de la Silicon
Valley sont inscrits dans des collèges où l’on utilise moins les écrans que
dans les écoles publiques du coin ? »
Ceux qui passent le plus de temps devant les écrans sont
davantage issus de milieux modestes, comme l’obésité d’ailleurs.
Peut-on s’aimer grâce
aux réseaux ? Plus de liberté ou plus de servitude ?
Emily Witt auteure de « Future sex » livre apprenant
à ses lecteurs ce qu’est la « méditation orgasmique » et Lucile Belan
qui tient le courrier du cœur sur Slate.fr pensent que la technologie permet de
partager des singularités et rappellent aussi quelques évidences : le
corps n’est pas une entité secondaire, que pour bien aimer il vaut mieux bien
s’aimer, et que l'époque où les opportunités se résumaient au garçon qui
t’inviterait au prochain slow n’était pas forcément folichonne.
Le terrain de jeu « safe » s’est élargi et l’échange épistolaire en est revigoré dans un usage aux allures psychanalytiques puisque la parole est reine. Les relations peuvent y être superficielles ou enrichissantes mais à défaut de trouver l’amour, se sentir moins seul est déjà un bienfait, quand désormais nous sommes condamnés à "habiter Internet".
Le titre de
ces journées avait bien sûr attiré l’Insoumis de service qui ne pouvait
supporter l’affichage d’un tel optimisme : « Super
demain ! » : quelle provocation ! Il a pu distribuer ses
tracts, qui ont coûté un certain nombre d’arbres, en lui permettant d’épancher
quelques onces d’une bile noire toujours prête à servir. Quant à moi je me suis
régalé d’un petit pain viennois au bœuf Teppanyaki qui n’avait rien de virtuel, échappant pendant un
court instant aux GAFA, nos monstres indispensables. Le terrain de jeu « safe » s’est élargi et l’échange épistolaire en est revigoré dans un usage aux allures psychanalytiques puisque la parole est reine. Les relations peuvent y être superficielles ou enrichissantes mais à défaut de trouver l’amour, se sentir moins seul est déjà un bienfait, quand désormais nous sommes condamnés à "habiter Internet".
.....................
Dessin découpé dans "Le Point" :
Tu es très optimiste, Guy. Je le suis beaucoup moins. Beaucoup de bile noire circule dans mon foie, même si ça ne m'empêche pas de sourire.
RépondreSupprimerL'avantage du slow, c'est qu'on tenait un monsieur dans ses bras, et le monsieur nous tenait dans ses bras.
C'est monumental. A combien d'époques vraiment en Occident cela a-t-il été pensable ou possible ? Peut-être pas tant que ça, et notre époque n'est pas une exception, loin de là. (Mais peut-être valser est plus grisant que le slow. Plus sensuel.)
La parole qui est reine ?... Elle a énormément d'inconvénients. C'est comme la démocrachie : plus y en a, moins ça vaut, et plus la cacophonie menace, tout comme la surdité, d'ailleurs.
Pour méditer sur les jeux "safe"... je me demande si ma belle mère, dans sa maison de retraite où RIEN NE PEUT PLUS LUI ARRIVER ne se sent pas flouée : certes, rien ne peut plus lui arriver dans une maison de retraite qu'elle vit comme hôpital ? prison ?
Quand est-ce que l'endroit où rien ne peut plus nous arriver cesse d'être un refuge pour être une prison ?
C'est très difficile, tout ça, et ce qui vaut pour la maison de retraite vaut aussi pour le monde dans lequel nous vivons.
C’est bien parce que je vois les évolutions de la société en noir que je force un peu sur le rose. Le titre « super demain » est surligné avec cette expression « super », datée, mais qui va à contre courant de l’ambiance délétère que nous subissons. Dans une des discussions, éloge avait été fait des avatars et pseudos qui sont la règle sur les sites de rencontre pour faire valoir la multiplication des possibles, la richesse de l’imagination… Paradoxalement cette façon de s’identifier hégémonique va avec la mode de la transparence. Cette forme de relation participe à la fausseté, aux mensonges de la vie en société. Etre déjà en paix avec ses images privées et publiques ce serait déjà pas mal.
RépondreSupprimer