Deux entractes d’une demi-heure entre trois séquences d’une
heure dix laissent le temps de prendre une bière et une soupe à La Cantine de
« La maison de la culture » qui commence à s’organiser plus
efficacement.
D’abord « Deux ampoules sur cinq » : depuis
un appartement communautaire à l’époque de Staline, la poétesse Anna Akhmatova
et la journaliste Lydia Tchoukovskaia, femmes de lettres, comme on disait dans
ces années 30, ont des raisons de se
méfier des mots. Un fils emprisonné, un mari arrêté, l’une apprend les créations
de l’autre pour en conserver la mémoire plus sûrement que sur un support papier.
A la lumière de lampes torches, elles se confient et surmontant l’urgence, la
poésie les sauve.
« Let Me Try » s’inspire du journal de Virginia Woolf.
Trois actrices mettent en forme les différentes personnalités de celle qui
voulait « saisir les choses avant qu’elles ne se transforment en œuvre d’art ».
Elles sont drôles et tragiques, légères et brûlantes, iconoclastes, enluminant
le moindre feuillage. L’écriture se cherchant, enrichit, colore la langue,
élargit la pensée.
Dans la troisième partie « Nous demeurons »,
peut-on parler d’ « insoumises à la raison » à propos de femmes
qui viennent exposer leurs délires poignants rassemblés dans des revues de
psychiatrie ? Elles sont submergées par des voix intérieures, leur souffrance
est exposée avec conviction par les comédiennes qui nous rendent proches ces aliénées
de la fin du XIX° siècle.
Si les démarches en Russie ou à Londres étaient une
recherche de liberté, malgré leur vigueur commune, elles ne peuvent se
confondre avec l’expression des diverses folies. « Expression » comme
on dit d’un linge tordu ou comme on
presse un fruit, elle se rapproche parfois de nos expériences, quand les mots
résistent. Mais je me méfie d’une vision candide de termes aux allures chatoyantes
qui sont pour ces femmes seules autant de cris dans le désert, aux désarrois
irréductibles.
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