Aujourd’hui vendredi, c’est férié, le dimanche des musulmans,
et déjà des voitures de touristes créent un embouteillage dans les deux
sens. Du coup après la descente ardue du village, nous devons effectuer un
morceau de trajet sur la route pavée en tirant nos valises entre les voitures.
Hossein a bien fait finalement de ne pas s’engager. Il nous ramène à Tabriz, étape sur la route de la soie, dont Marco Polo disait « une grande ville entourée de beaux et
agréables jardins. Elle est excellemment située et on y trouve des marchandises
venues de toutes les régions.»
Nous
commençons la journée par la visite à la mosquée bleue. Cette mosquée
désaffectée, écroulée lors d’un tremblement de terre en 1780 a été reconstruite
selon les vœux d’intellectuels de la ville, mais il ne reste que peu de
mosaïques azurées qui firent sa splendeur. Pour se représenter l’intérieur,
elles ont été complétées et remplacées par de la peinture plus pâle, les
coupoles rebâties n’arborant qu’un agencement des briques régulières. Peu de
tapis recouvrent le sol, isolé par une moquette verte.
Comme la visite du bazar moderne s’avère compromise en ce
jour religieux, Halleh, notre guide, propose de visiter la maison de la
constitution ou Mashroutch, hors programme
donc payante, mais pourquoi pas ?
Cela nous permet d’apprendre un peu l’histoire de la région, qui fut, au XIII°
siècle, le centre administratif d’un empire s’étendant « de l’Anatolie à l’Amou
Daria et du Caucase à l’océan Indien ». Ce fut le siège des indépendantistes
azerbaïdjanais menés par deux soldats « immortels » qui créèrent
une constitution que les shahs kadjar adoptèrent quand ils soumirent les
séparatistes. Mais la langue farsi et les coutumes ne s’imposèrent jamais
complètement, même encore aujourd’hui.
La maison construite au XIX° par un
russe abrite un petit musée qui expose des photos de moustachus enroulés dans
des cartouchières, des journaux, quelques bustes ou portraits, des coffres
forts fabriqués à Marseille.
La maison conserve des vitraux colorés qui
participent à son charme. Même si beaucoup d’éléments politiques et historiques
nous échappent, c’est intéressant de constater que le vainqueur s’empare des
trouvailles du vaincu.
Halleh n’a pas renoncé à réaliser nos souhaits d’acheter des
faïences à motifs de poissons, mais la démarche chez un potier reste
infructueuse. Nous allons nous poser dans un restau assez chic et moderne où elle
nous commande un nouveau plat régional : le koufteh. Il se présente comme
une grosse boulette de différents ingrédients mixés que Dany compare à du pâté
de foie trempant dans une sauce rouge. Indépendamment, il y a aussi des
feuilles de vigne garnies de riz. Le chauffeur qui a mangé avec nous va
disposer de son après midi
et nous conduit à l’hôtel, qu’il confond d’abord avec un cinq étoiles près d’un parc squatté par des tentes de
repos de citadins du vendredi. Nous
déclinons l’invitation de nous balader et préférons nous reposer un moment au
Caspain Hôtel en attendant que la chaleur tombe un peu. Vers 17h, Halleh nous accompagne dans les rues calmes aux
boutiques pas mal closes. Elle se dirige vers une librairie et avec sa
gentillesse et son charme habituels, s’arrange pour que l’employé qui la
reconnait nous transfère sa clé USB musicale sur un CD. Nous sommes reçus avec
des bonbons et repartons avec chacun un
sac vert pomme. En descendant l’avenue, nous débouchons sur une place moderne
encore en travaux : le centre en contre bas nous attire car le pavement
imite les motifs d’un tapis.
A deux pas, à l’ombre d’un pont une petite
animation / exposition, comme pour une fête de quartier, donne un peu de
vie : nous y voyons des stands de maquillages pour enfants, des
spécialités culinaires de régions (gâteaux)
ou artisanales et le clou, un magasin de
services pour le mariage. Nous sommes chaleureusement reçus, photographiés,
fêtés, honorés par l’organisation qui nous offre des bonbons et une femme nous
fait cadeau d’une feuille en poterie bleu turquoise, comme ça, pour le
souvenir !
Il semble que les étrangers ne s’attardent pas ou ne passent pas à Tabriz, tant pis pour eux.
Pour notre dernier
repas, Halleh a choisi un restau branché
à deux pas de l’hôtel. Un escalier descend dans une cave bien décorée avec de
objets de brocante et des photos sous le verre des tables de personnages
dissidents, et des extraits de
journaux. Elle commande des aubergines
cuisinées de deux manières différentes, délicieux ! Puis elle nous
remercie, s’excuse de son français et nous offre à chacun un pin’s de Mahura
Mazda rangé dans une petite boite charmante, en souvenir, achetée à Ispahan.
Nous ne nous éternisions pas, Chantal est chargée de réveiller les troupes à 2h 20
cette nuit : départ pour l’aéroport 2h 45.
D'après les notes de voyage de Michèle Chassigneux
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