Né en 1941 en Silésie (Pologne), il passe de l’Allemagne de l’est à l’ouest.
II travaille chez un maître verrier, et suit les cours aux
beaux arts de Düsseldorf où Beuys enseigne. Avec Richter il forme l’attelage
éphémère du « réalisme capitaliste », à lire comme une réponse au « réalisme
socialiste » mais aussi au pop art. Tous deux d’origine protestante, c’est
le froid qui rencontre le chaud. Polke
portant sur le monde et l’art un regard amusé.
Chercheur, expérimentateur, il va à l’encontre de la notion
de style en entretenant les ambigüités, les ambivalences, si bien que ce trait deviendra
une écriture.
Il multiplie les supports, tend des tissus sur les toiles puis
sur les châssis (couvertures, torchons, tapis de bain…). Erigeant la banalité
au rang d’œuvre d’art, il reprend la trame de photographies en peignant
lui-même les petits points, ne recourant ni à la sérigraphie ni aux pochoirs. Il
passe de la peinture gestuelle à l’abstraction, et évite l’académisme qui a
atteint aussi cette manière, en
introduisant des éléments figuratifs.
Des substances chimiques diverses (vernis, cire, mica…) se
retrouvent sur ses toiles. Il réintroduit des poisons (orpiment
à l’arsenic), des pierres précieuses (lapis-lazuli) qui avaient disparu de
l’attirail des peintres.
Il essaye toutes sortes de drogues afin de pousser
« les portes de la perception » telles que les nommait Huxley.
Sa rencontre avec des aborigènes l’amène à approfondir ses
propres démarches : le symbolisme des couleurs et les pigments fabriqués,
le versant sacré des productions.
Il change de format et va plus loin dans ses recherches sur
la matière picturale ; l’introduction de couleurs thermosensibles joue
avec la notion du temps.
Il met le monde sans dessus dessous, peint à l’arrière de
supports transparents, et rejoint Vinci qui conseillait à ses élèves en mal
d’inspiration d’aller voir les murs tachés de pluie où dans ses batailles
l’informe crée la forme.
Il ne se cantonne pas à un domaine chamanique, alchimique, il s’intéresse à la politique avec
une série de tableaux sur la révolution française exposés à Vizille en 2001.
La peinture, qui représente la foule se pressant à
l’exposition sur l’ « Art dégénéré »
organisée par les nazis, se craquèle. Le temps fait son affaire.
Les images se superposent, se devinent, se cachent, les
matériaux se mélangent, s’allient.
La conférence de Guy Tosato n’était pas qu’un exercice
obligé mais le partage d’une fidélité : le peintre disparu en 2010 était
l’objet de sa conférence inaugurale aux amis du musée de Grenoble qui compte
désormais dans ses collections « l’homme
donnant du grain à ses poules » dont nous picorons volontiers
quelques petits points ironiques.
Nous apprécions aussi l’interprétation du « Madame de Senonnes » d’Ingres qui
figure sur les affiches : c’était une commande du directeur actuel du
musée de la place de Lavalette lorsqu’à Nantes il faisait dialoguer l’art
contemporain avec les œuvres du musée des beaux arts.
Jusqu’à début février les œuvres les plus récentes de Polke
sont chez nous, avant la rétrospective au MoMA de New York.
Créateur aimé de ses confrères, sa peinture dynamique
réclame de nouvelles perspectives à la peinture. « Que la magie de l’art
advienne !» Encore.
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