Au matin une petite pluie fine ne nous incite guère à partir
visiter les environs que nous dominons depuis la terrasse de l’hôtel :
gros travaux routiers, quelques constructions éparses, la boue…
Cependant lorsqu’on s’éloigne en voiture, la ville nous
montre un autre visage, avec des immeubles, des ronds points mettant en valeur
des statues, des monuments, des magasins, plus conformes à l’idée que l’on se
faisait d’une capitale africaine. Des antennes paraboliques poussent dans les
pelouses devant les habitations et des troupeaux de biquettes broutent sur les
grandes avenues.
Un jeune chauffeur Yohanes qui parle bien l’anglais conduit
notre mini bus où Girmay a pris place à l’avant accompagné par Achenafi, jeune
diplômé en sciences politiques en phase
d’apprentissage dans le tourisme.
Nous finissons par quitter la métropole de 4 millions
d’habitants et découvrons la campagne : c’est la saison verte. La route
goudronnée en bon état traverse de beaux paysages cultivés.
La terre noire des champs est labourée par des araires tirés
par des bœufs. Les paysans s’entraident souvent et s’attaquent en commun au
même champ.
Tout au long de la route, les ânes bâtés et chargés de
bidons jaunes, de foin, accompagnent les hommes et les femmes, les cabris
sautent comme des cabris et les zébus traversent faisant fi de la circulation.
Lors d’une petite halte près d’un pont qui traverse la rivière Awash, nous
sommes rattrapés par des enfants et des hommes cherchant le contact. Très
souriants ils acceptent facilement de poser pour des photos. La rivière, calme
d’un côté du pont ressort bouillonnante en petits rapides de l’autre côté. Au
loin se détache le blanc des serres sur le vert de la campagne.
« One birr »… « What's your
name ? »...
Nous repartons pour la visite d’Abadi Mariam. Nous nous engageons sur une piste boueuse et
traversons des villages proprets avec cases en pisé frais et toit de chaume,
enclos en épineux et magnifiques acacias à la ramure ample. Arrivés presque à
destination, le mini bus ne parvient pas à monter la petite côte, il patine
comme dans la neige. Nous choisissons de parcourir les quelques mètres à pied
dans la boue collante.
L’église enterrée est circulaire comme il se doit, elle nous
est présentée par un diacre. Il nous montre la porte d’entrée des hommes, celle
des femmes, nous promettant de nous retrouver à l’intérieur. Déchaussés, la
cheville cerclée de bracelets antipuces pour certains, la visite commence. La
présence de 10 portes fait référence aux 10 commandements. Nous circulons dans la
promenade percée de 24 fenêtres (rapport aux 24 vieillards de l’apocalypse), puis
le diacre nous ouvre une pièce, anti chambre du saint des saints inaccessible
où aurait résidé l’arche d’alliance. Là il nous montre les grands bâtons sur
lesquels s’appuient les vieux et les religieux pendant les longs
offices. Il nous chante un alléluia, accompagné par un sistre, puis par un
tambour. Les cérémonies se déroulent avec 5 serveurs: 3 prêtres, 2 diacres
A l’extérieur, des maisons sont construites au dessus de
tombes actuelles ou à venir, elles sont proposées à des ermites en échange de
prières.
Tout à coup une file d’enfants et de femmes débouche d’un
chemin derrière l’église : photos, émerveillement des enfants devant les
écrans.
Etape suivante : Tiya.
Nous expérimentons la cuisine locale : « tartare cuit », viande
grillée ou foie pimenté accompagnés par
des galettes de tef (céréale) à l’aspect curieux de tripes au goût légèrement
acidulé. Café amer éthiopien. Nous partageons le plateau deux par deux, sans
cuillère ni fourchette, à la main. Le serveur nous amène produit vaisselle et
broc à eau plus cuvette pour nous rincer les doigts.
Nous repartons à 15 h vers le site classé au patrimoine de
l’Unesco. Il s’agit d’une trentaine de stèles funéraires du XIII° siècle
plantées au milieu des marécages et des grenouilles. Sur certaines sont gravées des épées. Les
fouilles commencées en 1974 ont permis de découvrir des cadavres enterrés
assis, d’autres à la mode chrétienne, couchés. Mais les investigations n’ont pu
être poursuivies. Nous nous émerveillons
devant nos premiers oiseaux : une pie grièche et un ibis noir peu
farouche.
Nous reprenons le
mini bus et nous nous dirigeons vers Zwaye.
Peu à peu les paysages changent : moins de cultures, la terre semble moins riche. La route descend
vers la plaine.
Zwaye est une grande
ville avec sa rue principale goudronnée et des rues transversales en terre.
Nous partons avec nos appareils photos
qui produisent toujours leur effet. Les gens acceptent en général de se laisser
tirer le portrait, les enfants s’enhardissent jusqu’à devenir collants. Ils
nous interpellent : « You ! » et demandent une photo.
J’échappe à un coup de fouet d’un conducteur de charrette tirée par un cheval,
sans doute gêné par la boue et l’attroupement que nous avons provoqué.
Les femmes rient comme des jeunes filles face à leur
portrait, certaines demandent des birrs.
Le soir tombe d’un seul coup, vers 6h 45,
nous regagnons l’hôtel. Nous dinons sous un arbre immense peuplé de centaines
de tisserins venus trouver refuge dans le feuillage, rendus muets par la
musique tonitruante qui parasite nos conversations. A la lumière de deux
chandelles nous dégustons des pressions fraiches et des pâtes. Nous nous
retirons dans nos chambres, finir nos journaux, prendre douche et faire lessive avant de nous glisser sous les moustiquaires.
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