Les dieux sont avec nous, le ciel moins bleu et moins lumineux qu’hier, est tout à fait clément.
Aujourd’hui, nous roulons un peu plus longtemps, une trentaine de kilomètres au Nord Est de la ville où sont hébergés tous les touristes pour connaître Kbal Spean la rivière aux mille lingams. Cette rivière sacrée coule à Siem Reap, c’était donc une eau bénite. Le Petit Fûté n’encourage pas le déplacement, en mentionnant la détérioration et le vandalisme récents, mais nous faisons confiance à Sothy notre guide.
Dès la sortie de l’auto nous sommes sollicités par des petites filles qui zozotent de façon charmante, avec un ton dramatique: « achète pour moi, moi pas gagner, un dollar, c’est joli, c’est pas cher …»
Nous entamons la marche d’approche sur la première colline que nous rencontrons au Cambodge. Le chemin sablonneux est veiné par les innombrables racines apparentes des arbres monumentaux, des arbustes mêlés aux lianes torsadées. Là aussi, les racines des arbres au tronc large et solide retiennent les rochers et la terre. Rien que la balade dans la jungle mérite le voyage. L’enchevêtrement des troncs est inextricable, sur un arbre se développe un autre arbre, et la voute feuillue cache le ciel. Nous croisons des colonnes de fourmis et des vols de petits papillons fragiles. Nous sommes pratiquement seuls à jouer les explorateurs. Portant le sentier n’est pas vraiment sauvage : des escaliers de bois permettent de surmonter les passages les plus délicats, des refuges abrités attendent les promeneurs fatigués ou surpris par la pluie. Et au détour d’un arbre, un employé balaie le sentier pour en ôter les feuilles mortes et glissantes. Les 1700 m sont régulièrement décomptés sur des panneaux au fur et à mesure que l’on avance.
Nous percevons le bruit d’une cascade. Quelques touristes y pataugent et passent derrière le rideau d’eau pour la photo.
Nous prenons un escalier sans suivre l’exemple de nos semblables trempés. Et c’est alors que nous découvrons ce qui fait la curiosité du lieu : dans la roche sont sculptés, une grenouille, des petits bouddhas, un crocodile, un Vishnou allongé dans l’eau. Plus loin une armée de lingams affleure dans l’eau, dominée par un lingam géant érodé comme les autres. D’autres sculptures parent les rochers. C’est unique.
Nous ne pouvons remonter la rivière, pour mesurer toute l’ampleur de ce décor qui continue sur 4 à 5 h de marche. Un simple panneau « no acces » interdit l’accès d’un sentier encore semé de mines. Un coup de tonnerre nous pousse à prendre le chemin du retour, moins mystérieux qu’à l’aller à cause de l’arrivée d’autres visiteurs. Nous évitons un serpent, repéré par un jeune garçon blond et sa famille.
Nous mangeons tôt sur place et négocions avec les petites vendeuses de tout à l’heure.
Nous commençons l’après midi par la découverte de Banteay Srey : la citadelle des femmes. Les hommes auraient été écartés de ce temple par des travaux lointains. Elle se distingue par la couleur rose du grès et la très grande finesse de ses bas-reliefs. On y accède par une allée de colonnes magiques. Le taureau cassé qui attire notre attention atteste du culte shivaïte du temple. Si c’était Vishnou, on aurait un Garuda représenté. Dans ce temple l’accès au sanctuaire est protégé par une corde et on ne peut qu’en faire le tour. Des copies de singes, de Garuda veillent à la place des lions habituels. C’est ici qu’André Malraux séduit par la finesse des sculptures préleva un fronton et un linteau, ce qui lui valut quelques démêlés avec la justice dont il se tira grâce à Clara. Nous apprécions ce petit bijou que nous pouvons contempler et photographier tout à notre aise.Nous nous déplaçons ensuite vers Banteay Samré le temple des peuplades. La légende raconte comment un jardinier régala le roi avec ses succulents concombres doux. Le roi le félicita et lui donna une lance pour garder son potager. Le roi pris d’une fringale et voulant s’assurer de la vigilance du jardinier, pénétra dans le jardin ; il fut transpercé par la lance et le jardinier succéda au roi.
Nous nous abritons de la pluie sous une porte. Le Petit futé apprécie ce bel ensemble, en particulier pour les croupes des lions les plus « sexy » du complexe d’Angkor.
Le dernier temple pour aujourd’hui s’appelle le Pre Rup - retourner le corps. Il recevait, dans une sorte de sarcophage, l’urne funéraire du roi. Quarante ans plus tard, dans une « bassine » sacrée, on lavait les cendres avec de l’eau de coco sacrée que buvait le reste de la lignée. Nous escaladons les marches plutôt raides pour dominer l’environnement. Comme souvent dans ces temples montagnes, un sanctuaire termine la plus haute tour, celui-ci possède deux bas de statues debout rouge et le toit pyramidal est en parfait état.
Au retour, Sothy nous propose la visite d’une pagode avec son cimetière de stupas, sa bonzerie que nous ne visitons pas. De la musique sort d’un bâtiment qu’on écoute un moment avant de rentrer à l’hôtel juste à temps avant le déchaînement des éléments. Bel orage, tonnerre et trombes d’eau. Moment de repos. Je découvre un journal hebdomadaire en français Cambodgia, très intéressant, Dany se détend avec des mots croisés, et Michèle met son journal à jour. C’est celui-ci qui a servi à alimenter ce blog chaque mercredi. Un vol de chauve-souris en bataillon nous accompagne dans notre court déplacement vers le restau de ce soir.
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