Je suis allé à un spectacle de danse de Maguy Marin et je n’en vis point, de danse. Au bout d’un moment, un déplacement légèrement balancé m’a fait croire que la danse advenait : mais non !
Parfois la musique, rare, monte mais s’interrompt très vite, ainsi quand s’installerait un rythme, il est cassé, alors que d’autres procédés sont étirés sans fin. « Turba » signifie tumulte, foule, et là des individus souvent penauds se déplacent seuls ou avec leur double. Leur seule performance est de synchroniser leur voix et leur seule rencontre est un morceau de musique à la fin. Des tas de costumes sont amenés en vrac sur le devant de la scène occupé par de grandes tables. Le budget perruque est sûrement important, mais on se barbe. Heureusement que les textes sont en latin, italien, allemand, espagnol…lorsqu’ils étaient en français : je ne les ai pas compris, tant tout est haché, en suspens. J’essaye et j’apprécie souvent les expérimentations, les surprises mais cette fois le seul avantage que j’ai retiré de cette heure et dix minutes, c’est un désir de voir de la danse, une autre fois, et avec d’autres chorégraphes. Et aussi l’occasion de lire tranquillement Lucrèce sur le livret d’accompagnement :
« Les bienfaits de la vie tu les as tous connus, et tu es décrépit. Mais comme à chaque instant tu brûles du désir pour ce qui n’est pas là, et que tu as mépris de ce qui est présent, eh bien ! pour toi la vie a passé incomplète et sans donner de joie, et la mort tout à coup sans que tu t’y attendes, est là, à ton chevet, avant que tu aies pu, rassasié repus, prendre congé des choses.
-Tant pis! L’heure est venue d’abandonner tout ça qui n’est plus de ton âge! allons, laisse la place à d’autres, maintenant, et serein : il le faut. »
Il n’y avait pas besoin de hallebarde en carton pour aller là.
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