jeudi 2 mai 2019

Souvenirs de voyage. Musée de Grenoble.

Sophie Bernard conservateur. trice en chef a présenté aux amis du musée de Grenoble, une partie des collections d’Antoine de Galbert exposée du 27 avril au 28 juillet 2019 en 17 salles. Le grenoblois, héritier du groupe Carrefour - pourquoi ne pas le dire - qui avait sa galerie rue Bayard est revenu sur ses terres après avoir dirigé « La Maison Rouge » à Paris de 2004 à 2018. Il vient de donner 500 coiffes ethniques au Musée des Confluences à Lyon. 
« Collectionner est une tabagie ». 
Les 150 œuvres présentées ici mélangent les genres contemporains et primitifs, librement. 
« Douce et luxueuse thérapie » 
Parmi quelques thèmes qui organisent la profusion :
 - Les collections :
Ben, qui accumule frénétiquement, « J’aime pas jeter » est sur l’affiche,
il a le même humour que l’insolent Thibault de Gialluly « Collectionneur d’emmerdes », tous deux  de la famille des glaneurs,
à la suite de Schwitters qui construisait à partir des ruines après la guerre, sublimant les plus humbles matériaux. « Pelikan ».
L’archéologie est de pacotille, avec l‘ « Art syncrétique » de Jacques Lizène : son fétiche africain ayant croisé une danseuse asiatique.
Et d’art conceptuel, il n’y en a guère, sauf quand il offre une respiration après tant d’abondance : « Painting of light » Hans Peter Feldmann.
 - L’Humour: Morellet, « moine défroqué de l’art minimal » a le néon dégoulinant, « Lamentable ».
Thibault de Gialluly se moque de Duchamp, l’intouchable. « Pas ready made »
Les machines à peindre de Richard Jackson sont imparfaites, tel son transgressif « Toy bear » qui éclabousse. Les conceptuels comiques et les abstraits cosmiques renversent les valeurs, jouent de l’irrévérence et de l’ironie.
Les épreuves : Tragique et violente, l’installation de l’autrichien Hermann Nitsch comporte du sang animal mêlé à la « Peinture déversée ».
Marqués par l’histoire, des corps sont martyrisés, pendus, des artistes dans l’excès, à la recherche de leur être, sondent les limites. « Aanéén » de Berlinde De Bruyckere.
Toute une géographie intime : Les visions plurielles de l’art sont issues de tous les continents. Steven Cohen, performer homosexuel, juif, né en Afrique du Sud ne peut plus retourner dans son pays. Reste une vidéo tournée dans un bidonville de Johannesburg au moment de sa destruction : « Le chandelier ».
 L’humanité morbide appelle le sarcasme. « Is More Than This More Than » John Isaacs.
La folie : Marcel Bascoulard, peintre clochard a connu un destin cruel. Maintenant une place de la ville de Bourges, dont il a dessiné et arpenté les rues habillé en femme, porte son nom.
Robert Malaval au  « béret basque authentique » s’est suicidé et il n’est pas le seul…
Les « Distorsions » photographiques d’André Kertész vont chercher une nouvelle cartographie des corps.
Coroles et pistils, chairs et végétaux, Rachel Kneebone livre « Grief study II » en porcelaine.
La nature est vraiment morte dans le « Festin des fous » de Joel Peter Witkin.
L’ampoule de Boltanski s’allume et s’éteint au rythme d’un « Cœur ». Chercheur de gestes, il a réalisé d’autres installations au Japon en enregistrant systoles et diastoles des visiteurs.
L’Art brut et les architectures imaginaires : Pour ce volet occupé par des artistes révélés par Dubuffet qui aimait «  le peu, l’imparfait, le mêlé », nous y reviendrons,
je retiens le régional de l’étape : le raffiné Patrick Gimel
et les maquettes géantes « Mute Migration » de l’indienne Hema Upadhyay  confectionnées avec les matériaux des bidonvilles.
La nature : Tetsumi Kudo, « Sans titre », met plastiques et éléments électroniques mimant des plantes, sous cloche. 
Wolfgang Laib est de retour au musée avec ses nuanciers de pollen.
Les Voyages lointains : Si les scientifiques approchent l’inexplicable, les traces d’une aspirine effervescente peuvent amener à réfléchir sur le vrai et le faux. 
«Trous noirs » Arnaud Maguet.
Et le dernier voyage: Pour « Finir en beauté » nous avons le choix entre la « couronne mortuaire » de Michel Journiac 
ou « La tombe prématurée » de Pierre Molinier
Et parmi de nombreuses croix encore un  « Nounours crucifié » d’Anette Messager.
La démarche simple comme le temps qui passe de Nicholas Nixon consistant à tirer le portrait des « sœurs Brown »  année après année au même emplacement, est poignante.
L’expression « Une Histoire vraie » de Stéphane Thidet  placée à l’extérieur, fait allusion au film de Linch où il est question de réconciliation au bout d’un périple en tracteur.

mercredi 1 mai 2019

Lacs italiens # 19. Milan 4.

Nous ne sommes qu’à cinq minutes du palais di Brera bâti sur un ancien couvent qui abrite un des musées les plus importants d'Italie, avec le Musée des Offices à Florence et celui du Vatican.
En pénétrant dans la cour, nous ne pouvons manquer la statue dominatrice de Napoléon que le sculpteur a bien avantagé; si la tête est reconnaissable sans ambiguïté, le corps musclé et nu dont la « virilité est à peine contenue sous la feuille de vigne » conviendrait mieux à Hercule qu’au petit corse.
Nous regardons au rez-de-chaussée les salles d’expositions des Beaux- Arts et sommes  sensibles à la poésie de certaines œuvres comme par exemple :
- les papillons découpés qui s’échappent d’un livre en y laissant leur  silhouette évidée
- ou  les oiseaux décalés du mur  éclairés pour que leur ombre les double. 
Il faut grimper un étage conséquent par l’escalier monumental extérieur  pour parvenir au musée.
 
 
 
 
 
 
 
Nous faisons une orgie de Madone à l’enfant, de Crucifixion, de peintures religieuses du XV° et XVI° siècle
dont le célèbre et surprenant « Christ mort » de Mantegna  
 et  la « Cène à Emmaus » du Caravage(XVII°).
Moins religieux, le célèbre tableau de Pelizza da Volpedo, « Fiumana » (fleuve en crue, 1895-96) l’une des œuvres préparatoires de « Il quarto stato », se découvre dans toute sa grandeur et sa force dès le pas de la porte.
 Le « triste pressentimento » de Gerolamo Indono témoigne du mode de vie d’une époque, modestie et nostalgie, 
« l’enterrement d’une vierge » se distingue à  peine dans son camaïeu de bruns au coucher du soleil. Bien sûr, une salle est dédiée à Canaletto, Guardi et quelques maîtres de Venise.
Un atelier de restauration et un entrepôt de toiles se laissent voir derrière des vitres. Dans une des salles, une jeune femme s’applique à retoucher ou à nettoyer un grand tableau sans qu’il soit décroché à l’aide de petits carrés en pointillés lumineux projetés sur les endroits problématiques.
Nous avons ainsi déambulé  2h loin des foules et au frais.
Pour terminer notre journée à Milan, nous prévoyons de passer par le musée Triennale design Museum implanté dans le parc Sempione. Mais avant, une petite pause à la terrasse du café du musée s’impose ; c’est bien agréable face à des œuvres d’art, les « Mystérieux baigneurs » de Chirico par exemple.
 
Comme il ne nous reste pas beaucoup de temps, nous nous contenterons de l’histoire du design italien, à redécouvrir à travers des objets familiers classés  chronologiquement : fauteuils, vespas, poufs, Olivetti, Fiat Isetta …. dans une muséographie sympa : 
les œuvres reposent sur une longue estrade légèrement sinueuse, telle un fleuve que nous longeons par la droite. 
Sur la « rive » deux touristes se sont endormis au frais dans une semi pénombre
Nous jetons un œil à deux expositions gratuites. La 1ère sans grand intérêt se compose d’un grand dessin  perdu dans une immense salle. 
 
 
 
La 2ème nous plait nettement plus car elle fait appel à un esprit plus enfantin, plus poétique avec son piano à peluches, ses petites voitures rangées sur trois files telles des chenilles processionnaires, ses crayons de couleurs assemblées comme des fleurs de pivoines, ses hosties délicatement décorées de fourmis. M. Charlemagne Palestine (J’apprendrai plus tard qu’il s’agit d’un artiste multimédia américain  principalement reconnu en tant que musicien minimaliste et plasticien) et une vénérable dame aux cheveux gris nattés sur le côté se mettent à la disposition du public pour commenter les œuvres. Ainsi cette dame, 2ème rencontre féminine à forte personnalité de la journée, bavarde, passionnée et originale, nous explique en détail la démarche du groupe d’artistes le « Porto Franco », (port franc), mené par son mari Franco Toselli. Nous devons l’interrompre  à cause de l’heure après l’avoir remerciée car il nous faut rentrer retrouver notre amie délaissée. 
D’abord le métro jusqu’à la gare Garibaldi  puis nous traversons la piazza Aulenti embellie encore par la lumière de fin d’après-midi. 
Les gens y flânent, les enfants en maillot de bain profitent de l’espace avec jets d’eau rafraîchissants qui font leur bonheur. Guy photographie. Nous n’avons cette fois aucune difficulté à retrouver notre voiture et sommes agréablement surpris par le prix à payer : 10 €.
La route de retour est rapide, coup de pot, nous pouvons nous garer devant la maison. 
J. nous a prévu une bonne salade et nous raconte sa journée, nous la nôtre.
Il pleut.