samedi 14 septembre 2013

Les coups du sport. Laurent Luyat.



Si elle ne m’avait été offerte, je n’aurais pas jeté un œil à cette publication, tant le label « vu à la télé » agit sur moi plutôt comme un répulsif : ces coups durs, du sort, de cœur sentant  trop le coup médiatique sans imagination. 
Bien que le ressassement de la main de Titi, du coup de boule de Zidane ou la  longue plainte depuis une nuit Sévillane de causchumacher en passant par les poteaux carrés de Glasgow commence à lasser les mémoires les plus fatiguées, j’ai repassé avec intérêt quelques coups de génie, de blues, et les tordus.
Je ne me souvenais pas du bain de sang de Melbourne quand l’équipe de water polo de Hongrie a battu l’URSS qui venait d’envahir leur pays, ni de Monica Seles poignardée, pas plus que du complot contre Nancy Kerrigan.
La tonalité est au drame avec le rappel de la mort de Manolete, de Senna ou de Simpson,  alors le service à la cuillère de Chang, le coup de Panenka, le fair play de Wilander tricotent d’agréables contre points. Comme les pieds nus d’Abede Bikila, le maillot de Rives « qui mettait la tête où les autres ne mettent pas les pieds » offert à  Roger Couderc, les gants de Smith et Carlos et ce qui en découla. Ils sont tous là : Cantona, Tyson, Maradona, Bolt, Fosbury, Lomu, Bonaly… le bobsleig jamaïcain ou Moussambani  le nageur qui illustra « l’important c’est de participer ».
Vaut le coup d’œil.

vendredi 13 septembre 2013

NPA



Besancenot était un bon client pour les télés avec quelques manières légèrement plus authentiques que celles des invités institutionnels, tellement prévisibles ; il les a vite rejoints dans l’insignifiance, cramé par les projos.
L’autre jour je l’ai aperçu au « Grand journal », une émission à la recherche du redressement de son audience.
Dans la vacuité du dispositif télévisuel, la faiblesse de l’ancien porte parole du NPA,  « Nouveau Parti Anticapitaliste », était éclatante à l’heure où NPA, « Nulle Part Ailleurs », égayait naguère nos débuts de soirée.
Invité à donner son avis concernant les dérives du football, le supporter du PSG n’a rien dit, se contentant de minauder : « j’aime le football ».
S’interdire à ce point de penser est atterrant pour le représentant d’un parti qui recrutait parmi les intellectuels et ne se privait pas de donner des leçons à toute la gauche : quelle décrépitude !
J’aime aussi ce sport universel et une défaite de l’OM contre un oligarque monégasque peut me gâcher la soirée, mais refuser d’envisager ce qui  se passe sur ce terrain populaire et éminemment politique est navrant.
Tant sur le plan économique que sur l’évolution des mentalités, les enjeux autour du ballon rond  vont bien au-delà d’un sentiment de déréliction qui se fait jour au sein de ce sport collectif.
L’outil de brassage social a perdu de ses vertus : qui va au ski, qui va au foot ?
L’émergence du Quatar est un évènement majeur sur le plan géopolitique, les sommes extravagantes mises en jeu, un effet de la finance folle.
Le gouvernement pusilanime envisage d'exempter les clubs des 75% , ce sera une fois de plus contre productif  sur le plan pédagogique car bien peu acquiescent à l' indécence des salaires.
Quand les identitaires s'infiltrent dans le Kop niçois par exemple, la reprise de « On est chez nous » par le FN d’un chant tellement entendu dans les tribunes doit donner à réfléchir.
Les joueurs apprennent à parler pour ne rien dire, entourés de parasites qui multiplient les fausses pistes pour s’étourdir de pognon, pauvres marionnettes d’un spectacle où se joue la Marseillaise en playback,  alors qu’ils ne pensent qu’à planquer leur pognon loin des petits qui financent leurs intermittentes prouesses.
Moscovici  quand il parle du « ras-le-bol fiscal » emprunte le vocabulaire de l’adversaire et érode encore plus le sens civique,  et voilà que Besancenot se met au niveau de Ribéry : zéro à zéro à zéro.

jeudi 12 septembre 2013

Les papesses. Collection Lambert.



En ces temps dépapaoutés, où les statues sont désenvoutées, quand il est question de descendantes de la papesse Jeanne, il ne peut s’agir que de femmes au royaume de l’art :
cinq sculptrices de Camille Claudel à Berlinde De Bruyckere dont les œuvres sont présentées à Avignon dans un hôtel particulier et au palais des papes.
Elles acquièrent de la force en ces cadres grandioses par un dialogue avec des œuvres patrimoniales qui elles aussi regagnent de la vigueur.
« Le pape est mort, un nouveau est appelé à régner.
Araignée quel drôle de nom !
Pourquoi pas libellule ou papillon ? »
Camille Claudel  fut internée il y a 100 ans à Montfavet, à quelques pas de là.
De ses sculptures émane la douleur lorsque des mains tendues se figent dans l’éloignement de « l’âge mûr » ; et même ses vivantes « causeuses » sont tragiques.
Les araignées de Louise Bourgeois sont moins impressionnantes que celle de Bilbao, mais celle qui mourut à 99 ans donne un aperçu de sa vitalité lors d’un film présenté dans le parcours. La diversité de ses productions est un bain de jouvence avec par exemple ses tissus inventifs et délicats.
 « La biche accouchant d’une femme » de Kiki Smith m’a surpris au détour d’une salle.
La production de l’américaine est aussi très variée avec une « touche féminine ».
Cette appréciation pourrait se faire taxer de « sexisme pâtissier » par des associations dont je ne comprends pas l’indignation lorsqu’un intervenant dans une émission sur France 2  a laissé échapper :
"Dans cette crème chantilly, j'ai senti une touche féminine"
et il n’était pas question de Zahia qui vient de présenter sa collection de boulingerie-patisserie.
« La princesse au petit pois » et les belles sphères en verre soufflé évoquant des planètes de la canadienne Jana Sterbak tiennent bien leur place dans un ensemble colossal qui compte plus de 300 propositions présentées jusqu’au 11 novembre 2013.
La plus dérangeante, la plus marquante, est la plus jeune, la belge Berlinde De Bruyckere avec ses cires torturées figurant des articulations étirées, des peaux débordantes de cadavres qui évoquent Bacon et tous ceux qui représentèrent les suppliciés depuis la nuit des temps.

mercredi 11 septembre 2013

Ethiopie J 1. D’un tram l’autre.



Le réveil matin à 1h 30 interrompt une nuit bien courte, mais nous permet de rapides ablutions et préparatifs avant l’arrivée de nos compagnons de voyage. L’autoroute vers Satolas est déserte à cette heure.
L’avion décolle à 6 h pour une durée de vol de 1h 05, juste le temps d’absorber un petit déjeuner. 
Nous arpentons ensuite les couloirs de l’aérogare de Francfort, et prenons patience pour un  transit de plus de 3h. Là aussi la somnolence voire le sommeil, attaque les uns puis les autres. Mais nous avons tous l’œil ouvert quand Girmay notre guide nous aborde  et se présente se doutant que notre groupe de 5 correspond à ceux dont il va assurer le guidage en Ethiopie.
Il commence déjà sa mission et nous présente le pays, répond à nos premières questions.
5354 km à parcourir en 6h.
Il fait nuit vers 18h (19h locale) au moment de l’atterrissage sous les nuages. Les pelouses  d’Addis Abeba, la « Nouvelle fleur » en amharique, sont vertes. Nous sommes à 2500 m d’altitude.
Nous commençons par acheter les visas (17€) passons les douanes avec nos passeports biométriques et récupérons nos bagages. Plusieurs chauffeurs nous prennent en charge à la sortie de l’aéroport, l’un d’eux  nous donne la température extérieure  par l’intermédiaire de son Iphone. Dehors on supporte la polaire, de grandes flaques témoignent  du passage d’un orage dont nous avons vu  des éclairs lors de l’atterrissage. Nous traversons des quartiers où maisons aux toits de tôle et villas luxueuses cohabitent le long de rues boueuses et peu éclairées si l’on excepte un rond point avec faux palmiers lumineux et affiches pour le 50 ° anniversaire de l’union africaine. 
Un tram est en construction : nous restons dans le thème.
Malgré l’heure tardive les estancots dont les lumières ponctuent la profonde nuit africaine continuent leurs affaires.
Notre hôtel « Blue birds » surgit au milieu de quartiers défoncés. C’est un grand immeuble un peu vide à l’intérieur, mais aux chambres très confortables. Nous prenons possession de nos trois chambres avec l’impression d’être les seuls clients, et Girmay qui donne de grandes accolades aux gens qu’il connait, propose de diner au restaurant de l’hôtel où là aussi nous sommes seuls. Nous nous attablons devant une bière locale bien fraîche, Méta, et discutons de notre périple.
Premier mot de vocabulaire : « Amesseguenalhou »: merci,
25 birrs = 1€

mardi 10 septembre 2013

Le chant du pluvier. Laprun Béhé Surcouf.


Après le décès de sa mère, un chercheur du CNRS emmène son père au Groenland où il s‘acclimate parfaitement. Nous découvrons cette terre lointaine avec ce paysan béarnais qui n’a jamais pris l’avion et qui se fait confisquer son Opinel à l’embarquement. Nous éprouvons la chaleur des bars et le froid du dehors. Le dessin est limpide, les couleurs rares et tranchantes, le récit émouvant et poétique avec quelques scènes cocasses.
"… Bernat toi pas connaître bien icebergs ! Iceberg jamais là où tu crois ! Il semble très solide, mais être très fragile. Toi attendre des heures pour qu’il casse… finalement lui partir très loin dans la mer pour couler Titanic ! …"
Le pluvier est un oiseau qui vit l’hiver dans le sud-ouest et l’été au Groenland, d’où le titre de cette belle histoire de famille où se cache pudiquement un secret. Les découvertes ne sont pas que géographiques. La fille restée au pays qui s’était sacrifiée pour soigner ses parents tout en les infantilisant va retrouver ce frère lointain et son père devenu grand père d’un petit qui n’aura pas peur du froid et causera inuit et béarnais. 
" boca d’argent, menton florit… "

lundi 9 septembre 2013

Chaque jour que Dieu fait. Paolo Virzi.



J’étais réticent à la lecture du pitch qui insistait sur l’opposition de caractère de deux amoureux. 
Je craignais la caricature, mais cette comédie italienne s’avère crédible et amusante, sympathique.
Le sujet de l’infertilité qui préoccupe Guido et Antonia va au-delà d’un télé film sur un thème à la mode.
Oui : lui est toscan, elle sicilienne, le littéraire et la musicienne, le coincé et la délurée, le poli et la brutale, le modéré et l’excessive, les parents beaufs et la famille harmonie, il travaille la nuit, elle le jour, mais ils s’aiment, malgré ou à cause de leurs différences et nous sommes contents que tout se finisse bien: nous en avons bien besoin.
Comme ils ont  un besoin d’enfant.
Drôle, mélancolique, avec des notations sociologiques sans lourdeur mais qui font de ce format habituel un peu plus qu’un moment agréable. Il y a bien quelques longueurs dans la deuxième partie mais je verrai volontiers d’autres histoires avec l’actrice Federica Victoria Caiozzo.
Une  jolie trouvaille : quand ils sortent de la clinique et qu’ils croient qu’elle est enceinte, tous les bruits de la ville vont cesser sur son ordre.
Ce matin, il réveillerait sa bien aimée avec un café en lui disant :  « aujourd’hui nous sommes le jour de la Saint Alain, en breton saint Alan, évêque de Cornouaille qui aurait été le 4e évêque de Quimper au VIe siècle ou VIIe siècle. Son existence reste incertaine. »

dimanche 8 septembre 2013

Alex Beaupain.


« Vite tout va vite
Les avions kérozène
Les bisons dans la plaine
A 200
Et pourtant
On se sent sans élan »
Le chanteur « en quarantaine » avec son look à la Yann Barthez  est celui d’une génération, à qui les glorieux ainés n’ont laissé qu’un humour désenchanté.  
De « Ceux qui sont tellement endurcis qu’ils en sont tout mou »
Celui qui a reçu le président dans sa loge à l’Olympia et qui lui demandait s’il n’était pas déçu, lui a répondu :
« on n’est déçu que par ceux qu’on aime. »
Il a une chanson bien fichue qui met en parallèle une histoire d’amour et l’arrivée de la gauche en 81.
« Au départ au départ
Un homme une rose à la main
Elcabache au placard
la bastille la pluie qui vient
Au départ au départ
La guillotine au panier
Il aurait dit quelle histoire 5eme semaine de congé
Au départ au départ
Tu sais c'est comme pour nous deux
J'y croyais sans trop y croire
Au départ c'est toujours mieux
Et puis la rigueur et puis les mots qui blessent, les tensions
Moi c'est moi, lui c'est lui et la cohabitation »
Les amours, comme les servantes qui appellent  l’expression « accorte », finissent mal, en général. Chez lui,  aussi, mais c’est bien dit sous des musiques bien emballées.
«  L’amour en fuite » de Souchon qu’il assume, qu’est ce que c’est bon.
Il faut être à la hauteur derrière.
« Car mercredi tant pis, je n'irais pas à Reims
Laver la tombe, fleurir les pierres
Après tout mercredi, s'il pleut sur la province
La pluie nettoiera le cimetière »
Il fait attention aux grains de beauté, à lui, mais il ne s’amuse plus et fatigue de courir contre le vent.
« Je suis un dernier souffle, je suis un premier cri
Un vieil homme en pantoufles, un bébé en body
Je suis tout résumé le meilleur et le pire
Quand tout est consumé, le meilleur et le pire »
Il parle au quadra que je fus, à l’adolescent, au récent papou.