jeudi 31 janvier 2013

Raphaël, un génie de la Renaissance. C. De Buzon.



Les anciens n’avaient pas la critique forcément délicate : au XIX° siècle, les « pré-raphaéliques » anglais qui vinrent bien après la renaissance, sous un tableau de Raphaël, invitaient à « cracher ici ».
Né un Vendredi Saint à Urbino, le fils de Giovanni Santi, atteint ses 17 ans en 1500.
Il va apprendre dans le plus grand atelier d’Italie, chez Le Pérugin à Pérouse.
Il en retiendra les mises en place habiles de la profondeur et assouplira plus tard les compositions organisées  invariablement autour d’un axe médian.
Les tonalités chantent haut et clair. Les mains élégantes des madones effleurent le corps de l’enfant comme un instrument de musique.
Le paysage où des architectures se reflètent devient un protagoniste, même lorsque la vierge est au premier plan avec l’enfant joufflu.
Son expérience à Florence est passionnante avec rien moins que Léonard de Vinci comme maître des sfumatos et de la composition en triangle. Il obtient ses premières commandes.
Son « chevalier rêve » est partagé entre méditation et action, entre la fleur  et l’épée.
Les « trois grâces » tout en courbes représentent les trois corps de Vénus : la terrestre, la céleste, la souterraine nous a-t- on dit, alors qu’ailleurs on y voit l’allégresse, l’abondance et  la splendeur. Elles sont splendides.
Les portraits se multiplient : « La Madone du Belvédère », «  la Madone au chardonneret », « la Madone au grand duc » sur fond noir, « la Belle jardinière » nous sont familières, elles respirent le calme.
La mélancolique « dame à la licorne » devait être vierge pour apprivoiser l’animal.
Bramante, son ami architecte, l’entraine à Rome chez le pape Jules II, et il travaillera aussi  pour son successeur Léon X.
Dans la salle dite de la signature, devaient figurer : le Bien, le Beau, le Vrai.
Au cœur du lieu saint, la ferveur religieuse s’ouvre sur la culture antique.
Quelle audace  avec tous ces corps !
Aristote et Platon et toute l’école d’Athènes sont en discussion, « le Who’s who du ciel et de la terre », selon les mots de la conférencière aux amis du musée, est représenté : Diogène, Michel Ange, Dante, Virgile et lui-même…
Raphaël n‘est pas que le peintre de la limpidité. Exploitant habilement les contraintes de l’architecture au dessus d’une porte au Vatican, sa fresque nocturne réalisée avec Romano son meilleur suiveur, où « Saint Pierre est délivré par un ange », joue sur les éclairages, magnifiquement.
La forme ronde  du tableau de « la vierge à la chaise » souligne la tendresse d’un moment intime où Jean Baptiste le cousin est encore dans les parages.
« La vierge de la Sixtine » apparaît d’une façon théâtrale entre St Sixte et St Barbe, les petits anges sont décontractés et paraissent même s’ennuyer doucement ; ils vont bien mériter de figurer pour l’éternité sur des boites de chocolat.
Catherine de Buzon nous donne envie de faire un tour à la villa Farnesina où l’amoureux de la belle Fornarina (« la boulangère ») exécuta quelques fresques généreuses.
Il devait l’aimer sa douce ; en  Donna velata,  dans ses riches habits, elle est vraiment pleine de grâce.
Il meurt à 37 ans, un Vendredi Saint. Elle rentre au couvent et meurt peu après.
Son dernier tableau partage les commentateurs : là, j’ai lu que « La transfiguration » était son chef d’œuvre absolu,
Ici, la coupure parait trop radicale entre le monde où souffle le vent divin et celui chaotique, affolé des mortels impuissants face au démon. Début du maniérisme.
« Qui est-ce qui a vu Dieu ? C’est Raphaël, c'est le Guide ».  Diderot. 

mercredi 30 janvier 2013

Misia au musée Bonnard du Cannet.



Un musée consacré au peintre qui passa par le Grand Lemps ( prononcer « leins » : c’est un indice qui montre que vous êtes dauphinois) vient de s’ouvrir au Cannet.
Nous voyons des carnets de l’impressionniste/nabis, de ses gravures, des statuettes, nous apprécions quelques  paysages mais j’ai été un peu en manque de scènes de salle de bains emblématiques du maître.
Si l’abondance qu’on peut attendre dans un musée consacré à un seul artiste comme les musées Cocteau ou Léger à proximité, n’est pas au rendez-vous, l’exposition temporaire consacrée à Misia dite « Reine de Paris » est une découverte intéressante.
Trois fois mariée, la pianiste posa pour Bonnard, inspira Valloton, Vuillard, et en fit damner quelques autres.
C’est la « Belle époque », celle de la « Revue blanche » (Mallarmé, Gide, Blum…)
Coco Chanel la surnomma "Madame Verdurinska" reprenant une partie de Godebska son nom de jeune fille, et celui de madame Verdurin dont le salon mondain décrit par Proust est célèbre. Celle-ci l’accompagna  dans ses derniers instants, et la jugea comme une femme de génie qui  ne fit pas que poser. Elle eut de l’influence dans le monde des arts et lettres.
Sur son yacht,  se croisèrent Debussy et Ravel, Stravinsky… Nous nous promenons dans cette période d’avant guerre dont l’inventivité nous étonne encore cent ans après.

mardi 29 janvier 2013

L’hôte. Jacques Ferrandez.



Je viens de vérifier, je n’avais jamais parlé dans ce blog de Ferrandez, auteur majeur, qui avec ses 10 volumes de « Carnets d’Orient », croise des histoires individuelles pour retracer la présence française en Algérie dans des tons d’aquarelle qui vont aussi très bien à ses chroniques provençales.
Il était fait pour illustrer une brève nouvelle de Camus parue dans « L’exil et le royaume ».
Ce n’est pas l’Algérie des bords de mers mais celle des hauts plateaux dans le froid et la misère où un instituteur apprend à des élèves les fleuves de France.
Un gendarme arrive dans  la maison d’école isolée, accompagné d’un prisonnier que le jeune instit devra conduire au bourg prochain par les sentiers pierreux.
Les dilemmes, concernant le libre arbitre, la loyauté et les malentendus, sont aussi évidents que les pierres. La dignité, la pauvreté, la sobriété sont rendus admirablement avec une palette offrant aux paysages minéraux une beauté qui détache du temps et nous aide à nous interroger sur les chemins à prendre pour l’homme à la fois si fragile et si têtu.

lundi 28 janvier 2013

Inception. Christopher Nolan.



Pas très porté sur les films US, ni sur la science fiction, je m’applique.
Pour entreprendre  mon éducation, il faut rien moins que Di Caprio et Cotillard  à l’affiche d’un film culte de 2010 pour passer les deux heures et demie agréablement.
« Inception » signifie « origine »
Si j’ai failli décrocher au début sous les coups de pistolets incessants, je suis entré progressivement dans ce thriller onirique.
Le défi de persuader l’héritier d’un riche industriel de démanteler l’entreprise familiale n’est pas dans mes préoccupations prioritaires, mais la manipulation pour y arriver est bien ficelée.
L’architecture des rêves où interviennent plusieurs protagonistes pas toujours maîtres de leur inconscient est étourdissante et les décors magnifiques, les effets spéciaux réussis.
Nous naviguons dans quatre niveaux mentaux, avec force labyrinthes, distorsion du temps, retour vers le passé, jeux de miroirs, apesanteur, humidité et explosions à volonté.
Où est la réalité ? Le cinéma est bien une usine à rêves.
La violence, mêlée à une complexité certaine, font paraître les épisodes romantiques encore plus nunuches, surtout au moment de la conclusion qui n’échappe pas aux habitudes hollywoodiennes. 

dimanche 27 janvier 2013

Lendemains de fêtes. Julie Berès.



On n’en a pas fini des œuvres sur la vieillesse avec le vieillissement de la population et spécialement des publics du théâtre. Alors que Haneke dans « Amour » au cinéma a choisi l' huis clôt, l’enfermement,  la jeune auteure a privilégié au théâtre, le rêve, le voyage permis par les trous de mémoire.
Une structure molle au centre de la scène permet, sous un aspect de pierre, toutes les inventions, les dérobades de la réalité, d’autant plus qu’un trampoline y est caché dedans qui favorise les rebonds, les envolées.
Nous portons moins notre attention au texte qu’aux corps qui grimpent élégamment aux murs, qui volent lentement, magnifiquement éclairés quand ils se roulent, se confondent  avec les chairs encore belles de deux personnages âgés mis à nus.
Le passé n’est plus présent que par bribes, le puzzle s’éparpille, la tendresse  vient ajouter de la poésie aux images où les artistes de cirque impriment leur rythme tantôt ralenti, planant, tantôt enjoué, voire optimiste.  Une chorale apporte la puissance de la musique vivante sur le plateau surtout qu’il y a du Purcell, du Pergolèse, du Schubert…

samedi 26 janvier 2013

Mélancolie ouvrière. Michelle Perrot.


© numemoris.fr
Le livre retraçant la vie de Lucie Baud ouvrière en soierie à Vizille ouvre une nouvelle collection  « Héroïnes » dirigée par Caroline Fourest et Fiammetta Venner chez Grasset.
L’historienne Michelle Perrot ne se contente pas de remercier au détour d’une dédicace ceux qui l’ont aidée  pour ce travail, elle les met en scène dans un ouvrage bref mais passionnant ; ainsi Gérard Mingat  ancien instit’ à Notre Dame de Mésage qui a travaillé sur l’histoire de la région.
Née en 1870, Lucie Baud devenue veuve d’un garde champêtre de Vizille, mène la grève chez Duplan en 1902. En 1906, elle participe à Voiron à un 1°mai historique. Elle tente de se suicider en septembre de la même année. Elle meurt en 1913 à Fures, où elle est enterrée.
Mais bien des éléments de son existence sont incertains : depuis une photographie pour laquelle l’historienne fait part de ses doutes jusqu’à un texte qu’elle avait signé dans « Le mouvement socialiste », est ce bien elle qui l’a rédigé ?
Dans ce texte, Lucie dit rarement « je », au début et à la fin. Elle use du « nous », gommant son action propre, sur laquelle la presse voire la police qui l’a à l’œil, nous informe bien davantage. Sans doute pensait-elle obscurément comme Jaromil, le jeune poète de Kundera, qu’on ne peut être totalement soi même qu’à partir du moment où l’on est totalement parmi les autres »
Le récit du livre en train de se construire, avec des rencontres, des hésitations, n’est pas seulement original et honnête, il nous captive car nous ne sommes pas prisonniers d’anecdotes. Nous participons à une recherche où le contexte est rappelé dans une écriture chaleureuse qui nous relie à ce début d’un autre siècle.  
L’éclairage féministe n’est pas un effet de style, il est indispensable pour saisir ce que ce destin avait d’exceptionnel. Les préoccupations de l’auteure à parler du devenir des enfants, de leur fragilité, ses questions concernant leur garde, les moyens de leur subsistance sont rarement abordés dans ces ouvrages où les héros maniant les idées générales apparaissent peu derrière les fourneaux. La solidarité ouvrière, la fièvre des luttes primordiales peut éveiller des nostalgies, mais  ne sont éludés ni le machisme régnant chez des leaders syndicaux, ni le racisme à l’égard des italiennes qui vivaient dans des conditions inhumaines dans les dortoirs de chez Permezel à la Patinière. Les réseaux religieux pourvoyaient en main d’œuvre doublement asservie : femmes et étrangères. L’une d’entre elles, morte de tuberculose pendant les grèves, se nourrissait de pain trempé dans du vinaigre

vendredi 25 janvier 2013

« Le feu qui te brûlera, c'est celui auquel tu te chauffes. »



Le proverbe est africain.
En ce moment une opinion est bien peu convaincante si elle n’est accompagnée d’une mitraillette.
Pour avoir parcouru le Mali à deux reprises, je m’autorise à me sentir plus proche des préoccupations des habitants de Mopti ou Bamako, mais en ayant effleuré la diversité des cultures africaines, les secrets et l’humour de là bas,  je me dispenserai de toute réflexion péremptoire.
Les experts se multiplient sur nos écrans et comme les économistes, ils prévoient après coût, ils nous apprennent  par exemple que des bases secrètes américaines étaient dans le Sahara, que des soldats maliens formés par leur soin avaient rejoint la rébellion touareg, que Ouattara aurait mis jusque là des bâtons dans les roues de l’armée malienne…  alors la faiblesse de l’état malien, les manques algériens à sécuriser un site stratégique peuvent-ils nous étonner ?
Du haut de nos « sans confiance » (espadrilles bien nommées), avec mes compagnons de voyage, nous avions saisi à quelques années d’intervalle la montée de l’intolérance religieuse qui nous interdisait désormais de pénétrer dans l’émouvante mosquée de Djenné quand le prosélytisme musulman faisait pousser les mosquées en pays Dogon : une pour ceux qui sont allés à la Mecque, l’autre pour le tout venant. Sous les falaises de Bandiagara une civilisation originale et forte avait résisté jusque là à tous les envahisseurs.
Quand les américains ont débarqué en Normandie il y avait bien du colonialisme dans les paquets de chewing gum, mais ils eurent un sacré bon goût de liberté, bien après, les rares voix qui crient (dans le désert) à une intervention de type impérialiste peuvent-ils entendre les populations qui remercient la France en ce moment?

jeudi 24 janvier 2013

Les Alpes de Doisneau.


L’exposition qui se tient jusqu’au 14 avril  au Musée de l’Ancien Evêché  m’a permis de découvrir de nouvelles œuvres du photographe humaniste dont je croyais avoir fait le tour, le croyant essentiellement parisien.
De la Haute Savoie, lors de vacances familiales, à Laffrey en passant par Grenoble, la variété est un des atouts de cette présentation chaleureuse qui ne se pousse pas du col. Photographies de mode dans un atelier de fabrication de skis, publicités pour l’Aronde, montages avec Maurice Baquet violoncelliste, regard d’ethnologue chez les petites gens de Saint Véran,  et toujours l’engagement politique dans les pages de la revue communiste Regards  avec des images des sports d’hiver à leur début.
Des icônes du bonheur, en noir et blanc, nostalgiques, oui bien sûr, mais l’enfant qui s’est endormi avec ses skis serrés contre lui ou le môme un agneau dans les bras sur le siège arrière de la moto conduite par son papa sont magnifiques.
Le jour va tomber, la lumière est propice.

mercredi 23 janvier 2013

Villas autour de Villefranche sur mer.



Les riches étaient bien bons quand ils ouvraient leurs villas aux communs.  
Du temps de mon grand père, le nom de Rothschild était emblématique du capitalisme tels que  sont devenus Bettancourt ou Arnault.
Nous sommes à Saint Jean Cap Ferrat et la villa Rothschild s’appelle aussi Ephrussi du nom de la baronne.
Les jardins espagnol, à la française, florentin, lapidaire, japonais, provençal, exotique, traversés de cascades, intimes et musicaux, ponctués de colonnades, offrent une ombre bienvenue  sous un soleil immuable. Beaux cactus et plantureuses plantes grasses. Le rose était la couleur emblématique de la maison, la roseraie est belle.
Le palais  construit à la belle époque est de  style renaissance avec des atours gothiques, il contient beaucoup d’objets ayant appartenu à Marie Antoinette et cultive une saveur XVII° avec  porcelaines et tapisseries de Gobelins. Un salon est dédié aux  fines porcelaines de Saxe, une table de trictrac est attribuée à François Hache qui est de par chez nous.
Gérée par la même association Culturespaces la villa grecque Kérylos est sa voisine  située à Beaulieu sur mer.
Autour du péristyle s’organisent des pièces soigneusement reconstituées de la Grèce antique avec un mobilier raffiné devant des décors recherchés au milieu d’un site exceptionnel. Nous pouvons visiter les appartements de Monsieur et  Madame Reinach qui ont fait construire ce palais qui revit grâce aux audio guides particulièrement pédagogiques. Cet archéologue Théodore Reinach  faisait partie de la fratrie des « Je-Sais-Tout », il nous fait partager jusqu’à aujourd’hui ses connaissances. Merci.

mardi 22 janvier 2013

La page blanche. Boulet. Pénélope Bagieu.



Un des articles le plus lu sur mon blog concerne Boulet qui tient un des blogs des plus couru, il est  au scénario dans cette BD de 200 pages dessinée par Pénélope Bagieu autre auteur à succès. 
Le graphisme élégant qui se retrouve souvent dans les magazines féminins permet d’alléger le récit d’une amnésique qui pourrait être angoissant.
A la recherche de son identité, Eloïse, qui est arrivée à retrouver peu à peu son nom, sa maison, porte un regard  distancié sur les bribes de son existence revisitée.
Je m’attendais tout au long de ce parcours à voir surgir des gags qui dénoueraient l’énigme; bien que l’humour aux couleurs tendres soit là, l’histoire débouche sur un questionnement plus profond qu’il n’en a l’air, sur le sens de nos vies. 
La mémoire finalement accessible de son ordi, s’avèrera décevante.
« Et la boite de chez tes parents ?
 Des merdouilles, des bijoux en fer blanc… Rien qui ait une histoire. Ils sont morts et n’ont pas laissé la moindre trace… Moi c’est pire j’ai disparu de mon vivant. »
Moderne solitude d’une vendeuse de la FNAC quand il y avait encore des clients qui cherchaient des livres.

lundi 21 janvier 2013

Les bêtes du sud sauvage. Benh Zeitlin.



Hushpuppy, une petite fille, vit dans le bayou avec son père, elle ne veut pas connaître le reste du  monde « sec et laid ».
Tant de critiques ont été séduit par la poésie de ce film que je m’y suis rendu mais je n’ai pas adhéré à cette fable apocalyptique dont la seule énergie est celle du désespoir.
La petite est contrainte à partager son repas avec les chiens, sa survie serait-elle dans l’animalité ?
Elle a beau porter sur le monde un regard décalé, sa situation est précaire.
Les catastrophes climatiques menacent la planète, elles se déchainent en Louisiane, où se déroulent pourtant des vacances perpétuelles. 
Les enfants  sont laissés à eux-mêmes  par des adultes alcoolisés, quand le père, auquel la petite est attachée, intervient, c’est sur le mode violent. Leur liberté consiste à se laisser dériver sur de pauvres embarcations parmi de photogéniques images de chaos.
Nous sommes plus près de la maltraitance que de l’émancipation.
Oui les contes sont sombres et les parcours initiatiques ne sont pas aisés par définition mais  tant de fange, de fatalisme mènent au renoncement. Il ne sera guère contrarié par des froncements de sourcils tellement mignons.    

dimanche 20 janvier 2013

Dominique A. Vers les lueurs.



La voix est agréable, les mélodies aussi.
De plus en plus, j’ai du mal à la première écoute, sauf pour mon chouchou Souchon, alors j’ai réécouté le neuvième disque d’un auteur longtemps présenté comme le favori de Libé -Télérama, il avait donc tout pour me séduire.
Mais je n’arrive toujours pas à accrocher, je trouve ses images démesurées :
« Des femmes fendaient l'eau sous la chaleur étale
Et donnaient aux marées la saveur du métal,
En rangs serrés glissant comme des parapentes
Les tentations hélaient les bêtes chancelantes »
Pourtant je me suis soumis avec délices au lyrisme de Ferré, même si je trouve que c’est peut être ce qui a vieilli le moins bien chez notre père à tous, en chanson.
« Dans les rues des civières passaient incessamment
Portant des illusions qui perdaient trop de sang
Des brancardiers filaient sous une pluie d'étoiles
Tombant pour soulager ou appuyer le mal... »
Je préfère les écorchés Thiéfaine, Baschung ou l’ironique Bénabar, au garçon sage dont les allégories sont tellement surchargées que je n’arrive pas à les partager :
« Du jardin j'entendais du verre se briser
Et des pleurs d'enfants que la vie instruisait.
Je me voyais partir, dévaler des vallées
Et fuir les cris de verre et les éclats d'enfant. »
Je retrouve comme un air d’exercice que je donnais à mes CM2 en introduction aux compléments de nom, à partir du Prévert d’ « Un vieillard en or avec une montre en deuil, Une reine de peine avec un homme d'Angleterre »
Son « convoi » rappelle le roman « La route » de Cormac McCarthy, et il se trouve que je n’avais pas apprécié non plus les excès charbonneux du livre à succès ; décidément :
« Ils avancent lourdement dans le jour qui surgit
La route s'ouvre comme une plaie
Qui se referme sur leur passage
Qu'ils ouvrent comme une plaie »

samedi 19 janvier 2013

14. Jean Echenoz.



Le livre claque comme le titre,  et nous empoigne sur un sujet pourtant tellement parcouru : la guerre.
« Tout cela ayant été décrit mille fois, peut être n’est-il pas la peine de s’attarder encore sur cet opéra sordide et puant. Peut être n’est - il d’ailleurs bien utile non plus, ni très pertinent, de comparer la guerre à un opéra, d’autant moins quand on n’aime pas tellement l’opéra, même si comme lui c’est grandiose, emphatique, excessif plein de longueurs pénibles, comme lui cela fait beaucoup de bruit et souvent , à la longue, c’est assez ennuyeux. »
Traité avec un ton contemporain qui nous entraine un siècle en arrière avec les poux, les rats et la mort inattendue. Il y a bien sûr l’inhumanité des gradés, l’absurdité de cette boucherie, la sauvagerie mais aussi la rapacité de ceux qui profitèrent de la guerre pour faire monter les prix, les fusillés, quand un bras en moins est une chance.
A travers des détails du quotidien, la fatalité de la tragédie nous saute à la gueule, sans coup de clairon. Les musiciens ont été décimés.
« …et Charles, béant, par-dessus l’épaule affaissée d’Alfred, voit s’approcher le sol sur lequel il va s’écraser, à toute allure et sans alternative que sa mort immédiate, irréversible, sans l’ombre d’un espoir-sol présentement occupé par l’agglomération de Jonchery-sur- Vesle, joli village de la région Champagne-Ardennes et dont les habitants s’appellent les Joncaviduliens. »

vendredi 18 janvier 2013

Ce n’est pas le problème !



Depardieu, le mariage pour tous, les anciens présidents au conseil constitutionnel : il y a plus important objectent ceux « qui ne se font pas avoir ».
Et  pour certains le Mali serait un dérivatif également !
Accoudés au comptoir de l’actualité, ils ne se font pas berner par les débats secondaires, ils savent les remèdes au chômage, au réchauffement de la planète, à la financiarisation des échanges, à la judiciarisation des actes…
Ils savent débusquer tous les leurres.
Pourtant les provocations d’un comédien en déshérence, des milliers de  personnes s’accrochant à un monde immobile le temps d’une promenade dominicale, et des institutions  qui devraient être immuables même pour des progressistes,  peuvent interroger.  
Les femmes maliennes à la face cachée, me concernent.
Celui qui « ne parle qu’en présence de sa vodka » comme dit le Canard est divertissant et cet écho mondial dit beaucoup de notre système médiatique mais aussi de nos passions.
Il est question de justice fiscale : à cet égard le mot de Cahuzac disant que la réforme fiscale était achevée m’a achevé : parce qu’elle avait eu lieu ?
Les niches n’ont pas tremblé, les riches trichent, beaucoup s’en fichent.
Des trains, des cars, dimanche, pour s’élever contre la pauvreté ? Non, nous nous, papa, maman, nounou. Je ne vais pas rejouer à mon tour le coup de « l’essentiel est ailleurs ».
Dans une société minée de solitude où les mono mamans ont les bras qui tombent, que de donneurs de leçons pour les autres ! Sur les sujets de société comme la dépénalisation du cannabis, le vote des étrangers, les éternels contre PACS s’enferment dans l’hypocrisie, le repli entre soi, homonymes, homophones. Leur aversion pour tout ce qui évolue, s’alimente du procès éternel contre une gauche illégitime par nature : les réacs même  colorés en rose layette viennent  en héritiers de ce fond chouan des temps obscurs.
Merci de nous remettre côté lumières, c’est la faute à Copé.
Le temps passe et les réformes institutionnelles tardent. Que n’auraient-ils dit si la réforme du présent conseil constitutionnel avait concerné les Chirac, D’Estaing,  ou le "Teigneux Monarque " (Rambaud est revenu) ?
Refrain : Toujours est-il, régler sans tarder, ce non cumul des mandats, ce n’est pas compliqué et ça redorerait le blason des politiques. Et pis ce qui est dit est dit !
Les brigades internationales se forment en Syrie, au Mali, elles se nourrissent au fanatisme religieux : l’idéal  des combattants compte plus que leur vie.
Nous, nous payons des soldats pour lutter contre l’obscurantisme.



jeudi 17 janvier 2013

Soulages XXIe siècle. Lyon.



Pour le premier samedi des soldes, la rue qui conduit au musée des Beaux- Arts est noire de monde, un monde habillé de noir. Dans le jardin, une mariée noire passe dans sa robe blanche.
Nous nous rendons chez  Soulages, le maître du noir qui expose 26 de ses dernières toiles jusqu’à la fin janvier. Les spectateurs s’y pressent.
« J’aime l’autorité du noir. C’est une couleur qui ne transige pas. Une couleur violente mais qui incite pourtant à l’intériorisation. A la fois couleur et non-couleur. Quand la lumière s’y reflète, il la transforme, la transmute. Il ouvre un champ mental qui lui est propre. »
J’ai beau savoir que ce n’est pas du noir mais de la lumière que peint celui qui peut être considéré comme un sculpteur, j’ai été surpris en regardant mes photographies cadrées en toute liberté. Certaines sont carrément de couleur argentées voire blanches.
Hors du viseur, nous jouons avec les reflets, les textures, les rythmes, mais la mère des couleurs domine notre vision noire. La notification des formats constitue le titre des tableaux.
L’un des plus célèbres peintres contemporains a 93 ans.
A 90 ans il a présenté 90 toiles à Beaubourg, et bientôt va s’ouvrir un Musée qui lui sera entièrement consacré à Rodez sa ville natale. Son atelier est à Sète.
Si j’avais préféré son accrochage de Montpellier sous une lumière naturelle, dans un espace plus aéré,  avec des œuvres tenues par des filins, cette recherche de toute une vie où il a posé désormais le mot « outrenoir », est impressionnante. 
Des touches de blanc de chez blanc sont présentes. La variété des surfaces juxtaposées prend encore de l’ampleur. Les toiles à la matière épaisse sont scarifiées avec des instruments de maçon ou de pâtissier, des bâtons. Il utilise l’acrylique, mais des œuvres acquises par le musée témoignent que le brou de noix, et le goudron sont aussi des matières avec lesquelles il a travaillé.

mercredi 16 janvier 2013

Saint Emilion.



Le village du Libournais n’est pas qu’une appellation prestigieuse, il est remarquable avec ses ruelles en pente (des tertres), reliées par des escalettes, et des édifices religieux aussi nombreux que ses caves. L’ancien ermitage  a conservé ses  remparts.
Sur la carte  des vins qui nous a été proposée pour accompagner une salade sur la place où un arbre de la liberté a été replanté, la bouteille de Château Lafitte Rothschild était à 4800€ ;  sans tomber dans la provocation d’une bière pression nous avons pris du vin au verre.
Il était trop tard pour visiter l’église monolithe (d’une seule pierre) creusée dans la falaise entre le IX° et le XIII° siècle, édifice unique en Europe. Depuis son clocher à 130 m au dessus de la place du marché nous avons une vue magnifique sur les toits ou aucune antenne ne dépasse ni fil électrique : nous sommes  comme dans un amphithéâtre, patrimoine mondial.
 Au moyen âge déjà le vin était qualifié d’ « honorifique » et offert aux souverains. Pendant la guerre de cent ans, la commune fut prise et reprise par la France et l’Angleterre ; Jean sans terre lui donnera un statut particulier avec ses jurats qui vêtus de leur robe rouge (bordeaux) en procession en juin et septembre, jugent de la qualité des productions et ouvrent le ban des vendanges depuis la tour du roi.

mardi 15 janvier 2013

Le fils de l’ours père. Nicolas Presl.



Sombre histoire. Parti pris radical d’un livre sans paroles où tout tient dans un dessin rigoureux.
L’exercice de lecture est stimulant, le récit fluide nous conduit à lire vite, ce n’est qu’après être arrivé au bout, que l’on peut goûter le rythme, la composition élégante, le graphisme tranchant, l’expressionnisme secouant.
Il s’agit d’un conte mythologique où l’animal rencontre l’homme et la femme, où sont questionnées les notions de filiation et de paternité, les racines, les liens, le pouvoir de la peinture. Sur fond de solitude, le désespoir est plus évident que l’amour.
Seule la couverture est pastel, à l’opposé des histoires de nounours : beau et ténébreux.

lundi 14 janvier 2013

Royal affair. Nikolaj Arcel.



Depuis  l’éclairage aux chandelles de Barry Lindon, les films en costume XVII° ont du charme, celui là est séduisant sans rajouter d’effets inutiles.
Pourtant un film qui traite de la folie à la tête du royaume de Danemark, d’une passion amoureuse sans cesse menacée, de la victoire des lumières contre l’obscurantisme, sur fond de manipulations  de cour, risquait de peser un peu.
Pas du tout, c’est passionnant, d’autant plus qu’il s’agit de faits réels.
Les relations des personnages sont complexes, le scénario limpide, les acteurs d’autant plus crédibles que je ne les connaissais pas. La reine aux joues rosissantes est craquante et fraîche. Le médecin du roi est progressiste et puissant. J’ai aimé apprendre que l’avancée des idées d’émancipation ne date pas de notre 1789. 30 ans auparavant du côté de Copenhague des lois établissant une plus grande justice furent signées avant d’être remises en cause ; liberté de la presse, abolition du servage, interdiction de la torture. Le vieux continent commençait à bouger.
L’éternelle question de la liberté depuis le dernier des serfs jusqu’à celui qui a tout le pouvoir dans ses mains, ou comment passer des livres à la réalité : quelques sujets parmi tant d’autres au cœur d’un récit où tous les ingrédients sont réunis pour se laisser séduire. Passion et politique.

dimanche 13 janvier 2013

L’or noir. Arthur H Nicolas Repac.


Il s’agissait de lecture musicale.
Je m’étais emballé trop vite au moment des abonnements pour un spectacle avec Arthur H que je pensais entendre chanter : hé non, il lit des poèmes.
Pour avoir été impressionné par des acteurs qui tiennent seuls la scène avec de longs monologues, j’ai été un peu distant avec ce spectacle. Les poèmes lus alternent avec des contes qui se seraient offerts plus volontiers avec un conteur.
Sa  belle voix grave est toujours aussi évocatrice de mystères, mais la variété des poèmes d’auteurs caraïbes aurait mérité quelques ruptures de ton, un brin d’humour.
 « Je siffle oui je siffle des choses très anciennes
de serpents de choses caverneuses
Je or vent paix-là
et contre mon museau instable et frais
pose contre ma face érodée
ta froide face de rire défait. »
Césaire me transporta jadis, aujourd’hui je le goûte seulement à petites doses, tant ce lyrisme faisant ronfler les mots les éloigne de nos oreilles lassées.
Je préfère les images d’Edouard Glissant parlant de l’amour :
«  quand une femme, un homme, vont pour démarrer sur une motocyclette. Au moment même où le garçon appuie sur la vitesse, la fille entoure son buste de son bras arrondi et elle penche la tête sur son épaule.»
L’accompagnement musical variant les instruments, (sensa, guimbarde, pot, guitare…) est agréable mais n’a rien de résolument nouveau. Quand sont évoqués, « la terre, l’amour, les racines et les rêves, la fièvre et le tremblement, au cœur du monde, du tout-monde » pas facile de contenter tout son monde. Il y a des soirs où la poésie passe mieux dans le silence et la nuit qu’avec une voix fut-elle enjôleuse parfois.

samedi 12 janvier 2013

France Culture papiers numéro 4.



Bookzine de 190 pages avec des pleins et des déliés comme disait la pub de France Inter, jadis, des entretiens poussés et des brèves. La radio s’écrit et les photographies sont superbes : celles au dos de ce numéro avec un pêcheur muni d’une grosse chignole qui part pour percer la glace est symbolique sans ostentation de ceux qui s’acharnent à toujours chercher sous les apparences, sous la pellicule de l’immédiat.
Je n’ai pas tout lu : même avec Woody Allen en spermatozoïde pour illustrer les apprentis sorciers de l’espèce, je n’arrive pas à me former une idée concernant les progrès de la génétique et les enjeux quant à un « eugénisme démocratique » me dépassent.
Par contre Alain Finkielkrault m’est bien plus proche :
« Pendant deux décennies, une grande bataille idéologique a opposé les « pédagogues » et les « républicains ». J’ai participé à cette bataille. Elle est close aujourd’hui, parce que le problème n’est plus de savoir comment enseigner, mais comment tenir sa classe »
Et il y a des revirements encourageants, tel cet élu républicain en Alaska qui se dresse contre l’ouverture d’une mine. Des aspects nouveaux à découvrir chez Attila.
Mazarine Pingeot interrogeant Claude Chirac procure une détente digne des publications habituelles dans les salles d’attente comme l’article consacré aux œuvres censurées de Picasso ou des paroles de supporters du PSG.
Mais il y a des invités qui valent la lecture : William Christie le musicien, un architecte suisse original et tant d’autres rassemblés autour du thème central de cette livraison de cet hiver 2012 : la cuisine. Avec une série de brèves roboratives et d’interviews où l’on apprend que le gingembre était présent dans la cuisine française depuis le moyen âge  et que l’igname est arrivé dans la région Centre en 1845.
Il est question aussi des dimanches, des femmes en Algérie avec quelques morceaux choisis des chroniqueurs habituels de la station tels Jean louis Ezine ou Philippe Meyer qui nous régalent de leurs finesses.

vendredi 11 janvier 2013

Neutralité.



«  Au moment de proposer aux élèves un précepte, une maxime quelconque, demandez-vous vous s'il se trouve à votre connaissance un seul honnête homme qui puisse être froissé de ce que vous allez dire. Demandez-vous si un père de famille, je dis un seul, présent à votre classe et vous écoutant, pourrait de bonne foi refuser son assentiment à ce qu'il vous entendrait dire. Si oui, abstenez-vous de la dire, sinon dites-le hardiment. Vous ne toucherez jamais avec trop de scrupule à cette chose délicate et sacrée qu'est la conscience de l'enfant. »
Jules Ferry dans une lettre aux instituteurs.
Les querelles d’aujourd’hui autour du positionnement de l’enseignement catholique - tiens, on ne dit plus enseignement « libre »- dans le débat concernant le mariage pour tous ne sont pas toujours de ce niveau.
Et devant les hypocrisies d’un Wauquiez jouant les vierges effarouchées : « on veut culpabiliser les catholiques », et tous ces religieux qui « se tiennent par les couilles » car pour le sexe, ils sont à la queue leu leu, la verdeur me monte. Je ne peux m’empêcher de récidiver : « ça bouffe du bon dieu, ça chie le diable ».
La neutralité n’existe pas : le moindre sapin de Noël  est un engagement.
Quand Prévert est au menu de la classe, quand au moment des entretiens du matin viennent des sujets d’actualité, quand Napoléon prend le pouvoir, quand la chèvre de monsieur Seguin se bat : chacun peut reconnaître que « tout est politique » comme dit tout ancien tuitard.
Le précepte de Ferry Jules, j’ai essayé de l’appliquer et je désapprouve trop la grossièreté de certains qui prennent leur estrade pour une tribune vis-à-vis d’un public captif afin de délivrer des leçons qu’ils ne peuvent plus dispenser tant leurs salles de réunions, au soir, sont désertes. Les églises sonnent le vide. La chaire est faible.
Faire porter des pancartes à des enfants est une pratique de plus en plus répandue, elle n’en est pas moins contestable même si l’efficacité médiatique en est augmentée. Mais qui n’a jamais péché ?
A un âge qui me donne du temps pour couper les phrases en quatre, je n’ai pas de position arrêtée sur la PMA, par contre sur le non cumul, si ! Alors un collégien qui ne sait pas  vers où s’orienter l’an prochain, peut-il envisager toutes les dimensions anthropologiques de l’évolution des mœurs dans notre Europe ? Avoir deux mamans vaut mieux qu’une mono parentale. 
L’incertitude ne peut être un dogme, mais je sais aussi que les vérités venues d’en haut titillent heureusement les contradicteurs. Les anticléricaux les plus radicaux ont connu parfois les cléricaux de près.
S’exprimer pour lutter contre des préjugés est un devoir civique, ce n’est pas une opinion équivalente à son contraire : attiser les clivages.  
Aucune nuance, tout serait égal : Copé en est  la caricature décomplexée, lui qui disait que l’extrême droite et le Front de Gauche c’est pareil.
L’épiscopat n’est pas légitime quand il s’occupe de mariage civil,  par contre à mes yeux, c’est le travail de la ministre de la condition féminine Valaud Belkacem de s’exprimer pour défendre les homosexuels.
Il faut bien que notre société soit si peu sûre de ses valeurs pour qu’elle se donne des illusions démocratiques en faisant porter la chicane dans les enceintes scolaires alors que ceux qui apparaissent aux lucarnes n’élèvent pas forcément  le niveau.
Il y a des nuances entre  informer et débattre.
Un éducateur ne doit éluder aucun sujet, mais c’est d’une démagogie à vous décourager de devenir un citoyen responsable que de donner l’illusion à nos prescripteurs en phones qu’ils vont délibérer, alors que nos élus seraient aphones. 
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Dans le Canard de cette semaine:

jeudi 10 janvier 2013

C’est ma nature. Muséum de Grenoble.



Le dépliant annonçant l’exposition temporaire « C’est ma nature » jusqu’au 10 mars 2013, placé sous le patronage de Jean Jacques Rousseau était  attractif, le muséum l’endroit idéal pour célébrer le philosophe aimant herboriser.
 Au bout de la visite nous pouvons passer un test de personnalité pour découvrir notre nature : paléo, écolo, homo philo, mercato, voire Rousseau dont la citation : « femme qui pète n’est pas morte » sort des sentiers (botaniques) battus.
Dans les locaux rénovés de l’Orangerie des éléments exposés sont intéressants mais semblent perdus parmi des textes aux lettres dont la taille est envahissante.
En venant de nous régaler dans les collections permanentes qui permettent des approches plus intimes avec de objets judicieusement éclairés, la mise en scène m’a parue un peu tapageuse.
Le bâtiment principal avec sa galerie, ses parquets, ses vitrines, a le charme du XIX°siècle, sans la poussière. Les animaux, de la girafe aux acariens peuvent captiver tous les âges sans submerger les visiteurs qui ont un jardin de ville à l’ancienne à la sortie pour prendre le soleil et faire du vélo dans les allées. La présentation des oiseaux de nos régions avec leurs chants est particulièrement réussie. Des pistes interactives sont proposées en ne comptant pas seulement  sur les dispositifs tactiles trop fragiles.
Des photographies concernant la taxidermie d’aujourd’hui sont instructives : il ne s’agit plus d’empailler.
Comme je n’ai pas répondu que « l’homme est une espèce de trop dans la nature »,
ni que « la seule plante de mon jardin serait du blé pour le vendre au meilleur prix »,
je me suis retrouvé au bout du questionnaire ni deap écolo ni mercato, homo philo :
« Vous percevez la nature avec sensibilité mais sans naïveté ».

mercredi 9 janvier 2013

Montaigne à Saint Michel de Montaigne.



"Qui ne se donne loisir d'avoir soif, ne saurait prendre plaisir à boire."
La tour  construite au XIV° siècle n’a pas brulé comme le château reconstitué au XIX° qui lui fait face.
Depuis cette demeure périgourdine qui n’était point une résidence secondaire, Michel Eyquem se disait  appartenir au monde.
"L'an du Christ 1571, à l'âge de 38 ans, la veille des calendes de mars, anniversaire de sa naissance, Michel de Montaigne, depuis longtemps déjà ennuyé de l'esclavage de la Cour du Parlement et des charges publiques, se sentant encore dispos, vint à part se reposer sur le sein des doctes vierges, dans le calme et la sécurité. Il y franchira les jours qui lui restent à vivre. Espérant que le destin lui permettra de parfaire cette habitation, ces douces retraites paternelles, il les a consacrées à sa liberté, à sa tranquillité et à ses loisirs ".
Ancien maire de bordeaux, conseiller d’Henri III et IV, ami de La Boétie  celui de la servitude volontaire,  il rédigea ici l’œuvre de sa vie : « Les Essais ».
Au plafond de sa librairie parmi tant d’autres sentences gravées :
"Je suis homme, rien de ce qui est humain ne m’est étranger" (Térence).
Il meurt à 59 ans après avoir tant souffert de la gravelle.
"Le vrai miroir de nos discours est le cours de nos vies."