jeudi 16 mars 2017

L’école de New York. Pollock et l’action painting. Hélène Norloff.

Si au XX° siècle, architecture et littérature US n’avaient plus à nourrir de complexes à l’égard de la vieille Europe, c’est seulement dans les années 1940/50  qu’émerge le nouveau continent de la peinture. La conférencière devant les amis du musée de Grenoble en montre les avancées à travers l’expressionnisme abstrait pour lequel les marchands d’art ont joué un rôle pionnier.
En une matière picturale fluide, les « Nymphéas » de Monet avaient renouvelé l’espace. Paris était le centre créatif, et lorsque Paul Durand-Ruel, en 1883, expose 300 toiles impressionnistes à New York, le succès est foudroyant.
En 1913, 1300 oeuvres européennes et américaines sont présentées dans une armurerie  à New York: Ingres, Delacroix, des fauves, des cubistes, Hopper « Office at Night », poétique et littéraire, DuchampLe président Roosevelt a beau déclarer à propos de l' « Armory Show » : « Ce n'est pas de l'art ! » le public se montre disponible.
« Alfred Stieglitz »  dont Picabia a tracé le portrait, avait ouvert une galerie « le 291 » et formé un groupe de jeunes peintres dont Georgia O’Keeffe avec comme objectif de faire émerger un art américain http://blog-de-guy.blogspot.fr/2016/01/georgia-okeeffe-etienne-brunet.html
Stuart Davis déjà pop, donne de l’envergure au cubisme, alors que Matisse à la fondation Barnes propose une « danse » épurée et de nouvelles perspectives à la peinture murale. De nombreux surréalistes réfugiés de l’autre côté de l’Océan arrivent dans un climat propice à des changements radicaux.
« Les moissonneurs andalous » de Masson où s’enchevêtrent les angoisses et se déchargent les couleurs, cultivent une certaine mythologie de l’inconscient.
L’artiste est tout entier engagé dans son œuvre, corps et âme, le geste émane de l’individu.Hans Hofmann a acclimaté l’expressionnisme allemand aux Etats unis en ouvrant une école, il met en œuvre la théorie du « Push and Pull ». Sa barrière, «The gate » fait se tirailler formes et couleurs.
« Stenographic figure » de Pollock avait paru « atroce » à Peggy Guggenheim qui se laissa convaincre par Mondrian : « Il faudra surveiller cet homme ». Elle constituera la collection la plus importante de l’inventeur du Dripping. D’un continent l’autre, jusqu’à Venise, la mécène éclairée mettra à l’abri ses trésors au musée de Grenoble jusqu’en 41.
Parmi les expressionnistes à l’abstraction non géométrique, Adolph Gottlieb, rappelle le monde primitif dépositaire des grands mythes : « Mascarade ».
Arshile Gorky, l’Arménien, reconnu par Breton, au style fleuri et torturé, délié et complexe dans ses « Fiançailles » mit un terme à sa vie tragique en se pendant. 
Franz Kline après 23 ans de peinture figurative affronte la monumentalité de tout son corps. S’il refuse la troisième dimension en agrandissant ses dessins, l’importance de ses blancs l’éloigne de la calligraphie, ses traits  jouant de l’équilibre ont leur propre existence.
Willem de Kooning né à Rotterdam invalide la coupure abstrait/ réel dans ses portraits stridents de « Woman ». Un article sera consacré sur ce blog à  Mark Rothko qu’il convient évidemment d’ajouter à la liste.
Un des « jalons de la création universelle », Jackson Pollock  né à Cody (1912-1956), suivit les cours de Tom Benton dont le tableau « The Ballad of the Jealous Lover of Lone Green Valley », peut rappeler les origines rurales et les proximités avec Diego Rivera.
«  Femme-lune coupe le cercle » aux couleurs violentes, vient après des années d’analyses jungiennes où « l’inconscient collectif porteur d’archétypes est à mettre en adéquation avec son propre vécu ». Il a croisé Picasso, les indiens, dans ses errances alcoolisées, rencontré celle qui deviendra sa femme, Lee Krasner et le « pape » de la critique Greenberg.
A partir de « Mural » (6 m X 2 m) il renonce à l’image : la matière projetée au premier plan en rythmes syncopés rend caduque la coupure dessin /peinture.
Le « All over » de « Jack l’égoutteur » se passe à l’horizontale dans la rage de peindre, libéré des outils  conventionnels. La toile est une arène. « Blue pôles »
Il avait renoncé un moment, à titrer ses œuvres en les numérotant, mais « The deep » dit l’énergie d’une vie de recherche,
dont la dernière toile intitulée « Search » revient à la couleur après qu’il eut beaucoup fréquenté le noir «  Number 32 ».
Il est mort dans un accident de voiture comme James Dean.
 « Number 5 » est l’oeuvre la plus chère jamais vendue dans la catégorie art contemporain. « Regarder simplement un tableau donne du plaisir. C'est comme regarder des fleurs, on ne leur cherche pas un sens » disait-il.
« La force de Pollock tient à l'impitoyable mordant avec lequel il dénonce, à travers un bouleversement dramatique de l’image, le mythe de la ville moderne, l’angoisse et le désarroi de l’homme dans les grands espaces métropolitains et naturels, la désespérante solitude de l’individu » a écrit Italo Tomassoni dans un des « Petits classiques de l’art » que faisait paraître Flammarion dans les années 68.

mercredi 15 mars 2017

Equateur J 15. Cuenca Parc Cajas Guayaquil.

Pendant que nous petit déjeunons, nos sacs sont chargés dans le minibus stationné dans la rue d’à côté à cause des travaux du tram qui passe devant l’hôtel. Nous quittons Cuenca la ville culturelle avec des retours imprévus dus à des barrages que n’indique aucune déviation. Aujourd’hui nous aurons l’impression de voyager en Ecosse, en Suisse, en Norvège, dans les Alpes, puis en Afrique et en Asie.
Nous nous élevons peu à peu dans la montagne à travers une lumière grise et des nuages bas, avec un habitat en bois style chalet et des élevages de truites qui approvisionnent tout l'Equateur. Nous poursuivons notre montée jusqu’au lac Cajas à 4800 et quelques mètres d’altitude.
Le froid est vif, lorsque nous sortons du véhicule, tout le monde superpose les couches même les moins frileux.
Nous dominons le lac du Toréador, l’un des 235 du secteur et empruntons l’escalier glissant qui y conduit pour observer la flore rase mais extrêmement variée composée de lichens, de mousse, petites fleurs, champignons, un tapis vert et spongieux gavé d’humidité. Le gardien du parc nous demande de remonter, si nous voulons visiter, nous devons nous acquitter d’un droit d’entrée et payer un guide afin de ne pas nous égarer dans le brouillard. José négocie le fait que nous ne faisons qu’observer la végétation mais le garde est comme le temps : maussade.  Nous nous engageons à nouveau dans des sentiers balisés du parc où nez et yeux au sol nous nous émerveillons de la variété et de la richesse des plantes et de leurs couleurs, lorsqu’un coup de sifflet du garde nous rappelle à l’ordre. Nous remontons sagement dans le minibus jusqu’au panorama, le point culminant où nous ne voyons rien, trop de brouillard aux « Très crocce ».
Nous entamons alors la descente vers la région de la côte, la végétation se modifie, nous retrouvons les polylepis ou arbres à papier que nous avons rencontrés à plusieurs reprises depuis notre montée en téléphérique à Quito. La végétation se fait de plus en plus luxuriante. Les bananiers apparaissent. Sans les nuages nous apprécions mieux les paysages et la température.
Nous atteignons la plaine.
Les maisons en bois souvent sur pilotis nous évoquent d’autres pays, ainsi que les motos surchargées de 2 à 5 personnes. Les enfants en uniforme sortent de l’école. Nous bifurquons au panneau indicateur «  51 ». A peine descendus  nous nous bombardons de « 5 sur 5 » à la vue des insectes voletant autour de nous avec voracité. Un petit homme souriant vêtu d’une chemise bleue et d’un pantalon sombre rentré dans ses bottes de caoutchouc jaunes et armé d’une machette s’avance, c’est le patron de la plantation qui répond au nom de Staline.
Il nous présente les différentes cultures de sa propriété en commençant par des fleurs de jasmin odorantes. Avant de nous parler des cacaoyers, il nous fait découvrir l’achiote : le fruit contient  des graines qui une fois écrasées donnent une pâte rouge orangée qu’on utilise pour le rouge à lèvres. Il en maquille les filles, trace une croix sur le front de garçons pour en chasser le démon.
D’un côté une rizière vient d’êtres semée à la volée, méthode plus rapide que de repiquer plan par plan. De l’autre les cacaoyers supportent un grand nombre de cabosses ainsi que de minuscules fleurs. Plus la cabosse est orange, plus elle est mûre. D’un coup de machette, Staline en coupe une en deux, et nous fait déguster la chair qui entoure les fèves. Dans un sac, le contenu de plusieurs cabosses fermente en attendant d’être mis à sécher.
D’autres arbres fruitiers s’épanouissent un peu plus loin : plantation de fruits du dragon, arbre à pain, un groseillier dont les fruits ont l’aspect du raisin, des jacquiers, des citronniers.  
Staline propose à deux d’entre nous de goûter des petites graines qu’ils recrachent aussitôt : elles sont issue d’un poivrier, arbre que nous connaissons pourtant !
S. a planté des œillets d’inde que parait-il les hollandais appellent petit africain. Sous une bâche abritée, il nous montre des plans greffés associant le cacaoyer de Trinitad et Tobago avec le cacaoyer national.
Un fois planté, le cacaoyer hybride obtenu sera plus productif que le natif et aura une durée de vie d’environ 15 à 20 ans mais la qualité sera moins goûteuse. Après nous avoir montré les fèves exposées au soleil et prêtes à l’expédition, il nous prépare du chocolat selon la technique déjà montrée en Amazonie.
Nous prenons place ensuite sous une grande paillote au bord d’un plan d’eau avec canards, où les moustiques nous laissent un peu tranquilles pour un repas avec guacamole, riz avec achiote (pour la couleur) et poulet en sauce tomate, gingembre et fruit de la passion. Au dessert bananes à la crème nappées de chocolat. Le ciel a changé de couleur et le soleil chauffe.
Nous reprenons la piste en sens inverse et apercevons des moissonneuses dans les rizières. A côté une montagne de riz  récolté, des hommes en remplissent de gros sacs qu’ils pèsent  puis avec efficacité et légèreté les soulèvent, les portent sur leur dos pour les entasser dans un camion.
Nous les saluons et reprenons notre voyage, assoupis par la digestion ou à l’écoute des informations et discussions avec José.
Nous arrivons à Guayaquil à 17h 30, grande ville de 3 millions d’habitants, le centre économique du pays, avec de la circulation où cohabitent riches et pauvres.
L’hôtel « Villa 64 » se cache derrière une porte blindée et surveille les gens avec une caméra. Il faut montrer « patte blanche ».
Notre guide craint la délinquance dans la ville, certains quartiers qui n’ont rien à envier aux favelas, sont à éviter. Pour les autres : barbelés électriques, caméras, vigiles tentent de dissuader toute effraction.
Nous quittons cet hôtel tout neuf pour une petite balade dans le quartier du Malecón, guidés par José qui a peut être peur de notre témérité ou de notre inconscience et nous recommande encore la prudence.
Il nous conduit au confluent de deux rivières dans une partie moderne où l’on trouve les enseignes américaines de fast food et un parc d’attraction.
En chemin il nous montre le tennis club et sa fresque en carreaux de faïence célébrant Andréas Gomez vainqueur à Roland Garros (1990).
Nous dînons d’une pizza Hut et rentrons.

mardi 14 mars 2017

Les beaux étés. Zidrou & Jordi Lefebre.

Je ne boude pas mon plaisir à donner mon avis enchanté sur ce numéro 2 :
« La calanque », qui narre des faits antérieurs au premier chapitre de la série :
Le bonheur est là en 69, année qui allait et venait avec Gainsbourg, l’homme sur la lune, Merckx vainqueur du Tour de France, qui ne sont que prétextes à la célébration de la vie.
Ainsi la famille venue de Belgique débouche le champagne pour les 100 000 km de la 4L qui les emmène en vacances vers le midi, le midi ! Un cabanon dans les calanques indiqué par un marseillais habitant du côté de Troyes à Cézanne  
 « comme aurait dit Baba, Ali de son prénom : Cézanne ouvre Troyes »  
qui a vu un matin dans son potager, la tente installée dans la nuit par les Faldérault .
La 4 L « Esterel » a des ailles qui lui poussent, avec un papa dessinateur désinvolte de BD, un super papa inventif, dont l’humour est partagé par tous ses tendres enfants et sa femme qui attend un autre petit. Ils ne rencontrent que des douaniers complices, des  hôtes charmants : que c’est bon !
Pourquoi tant de gentillesse, de musique, de complicité, de plaisirs simples, auraient-ils une connotation nostalgique ?
Lire cette BD délicieuse est bien d’aujourd’hui !

lundi 13 mars 2017

Tramontane. Vatché Boulghourjian.

Les paraboles visant à décrire une situation générale à travers un récit familial peuvent parfois être lourdingues. Ce n’est pas le cas dans ce film d’une heure quarante cinq, où il est question de la situation du Liban.
La recherche d’identité d’un jeune chanteur aveugle pour l’établissement d’un passeport est crédible. Elle prend les dimensions d’une quête où s’empilent les mensonges au fil de dédales administratifs. La musique porte ce film et la poésie souligne l’émotion tout en masquant des vérités dont la révélation risque de mettre en péril une paix fragile. Le jeune chanteur apaisé, épuisé, n’a pas trouvé le fin mot à propos de ses parents biologiques. Il devra se contenter de morceaux d’authenticité au milieu de tant de renoncements, de mensonges.

dimanche 12 mars 2017

L’art de la comédie. Eduardo de Filippo. Patrick Pineau.

A peine installé dans un petit village d’Italie, un préfet reçoit à la suite d’un directeur de troupe de théâtre, un médecin, une institutrice, un prêtre, un pharmacien. Est-ce que ces notables sont vrais ou des vrais comédiens ?
Comme le disent quelques critiques, le début de la pièce dissertant sur le théâtre, est un peu longuet : vivement que l’on passe aux actes ! Si la profession de comédien mérite de figurer dans les abécédaires avec les métiers qui comptent, prouvez le donc !
La deuxième partie où défilent tous ces personnages tente le plaidoyer qui sera conclu de brillante façon.
Nous sommes loin des mœurs contemporaines à voir instit’ et curé en tant que personnages influents qu’il est indispensable de rencontrer quand le représentant de l’état arrive à son poste.  Dans cette mise en abyme, le jeu des acteurs tourné vers la farce amuse visiblement des spectatrices et je me réjouis de leur rire, mais j’ai cherché le mien.
Il est plus facile de m’émouvoir aux tragédies qui viennent d’être représentées à la MC2 que de partager les excès d’un carnaval dont l’actualité nous apporte des images qui n’ont pas besoin de porter un masque pour souligner leur ridicule.
Des nostalgies de comédie italienne peuvent revenir, et les amateurs de comédia del arte s’y retrouver, mais ces réflexions sur les frontières entre réel et fiction gagneraient à être  moins  outrées. La fonction du théâtre devant, pour son défenseur, parvenir à montrer le monde «  par le trou de la serrure » n’est pas du tout prouvée : l’intimité demandant de l’ambiguïté, de la subtilité. Il y a de la fumée sur le plateau, des grilles et des phares éblouissants le spectateur comme ailleurs, mais nous sommes dispensés  de l’arrivée des acteurs sur le plateau depuis la salle.
J’avais eu plus d’indulgences pour d’autres pièces de Patrick Pineau plus lointaines dans le temps et l’espace, et qui pourtant me concernaient d’avantage.
C’est que le temps a couru, et moi suis devenu bourru.

samedi 11 mars 2017

Le règne des affranchis. Claude Onesta.

Le football est un langage universel. C’est valable aussi de porte à porte, pour un de mes voisins à qui j’avais transmis quelques textes bien tournés de spectateurs de la balle au pied, qui en retour m’a passé un livre de l’entraîneur de l’équipe de France de handball qui a remporté tous les titres.
Proust attendra encore, et « l’Homme sans qualité » aussi
Va pour ces 270 pages, alors que je n’ai même pas vu un match du dernier mondial qui se jouait en France.
Les allers-retours d’un mur à l’autre, de mecs aux larges épaules me laissent en général assez indifférent, et je  n’épouse pas l’engouement trop exclusif des profs d’ EPS pour ce sport. De surcroît, les victoires trop fréquentes sont lassantes.
Les raisons s’accumulaient pour que je rende poliment le livre sans aller jusqu’au bout,
alors j’ai d’autant plus apprécié le caractère fort du toulousain qui sait reconnaître ses conneries, tout en maintenant un cap déterminé. 
Je ne me lasse pas de la formule parfaitement illustrée tout au long de ses pages limpides et chaleureuses:
« Le dire ça fait rire, le faire ça fait taire »
Le fils de cocos, cousin de Gérard l’écolo, en se gardant bien de donner des recettes, prouve dans l’action, la force et la pertinence de ses intuitions, de son éthique.
« Je ne m'imagine pas une seule seconde comme l'épicentre d'une galaxie d'étoiles brillantissimes. Les gens brillantissimes, ça ne met pas les mains dans le cambouis. Ça ne fait pas don de sa personne dans l'intérêt supérieur de la collectivité. »
Rusé, il narre quelques coups qui ont déstabilisé les adversaires, mais sa verve bien nécessaire pour l’agrément d’un livre, ne serait que du vent s’il ne savait pas écouter, observer pour tirer le meilleur de ses hommes, grâce aussi à un staff consciencieux pour lequel il a renoncé à une décoration personnelle qu’il estimait méritée par tous.
Je l’ai trouvé très juste et convainquant. Honnête. La politique et la pédagogie feraient bien de s’inspirer de son audace, de son humilité, tirant de la force à partir des défaites, organisant depuis sa haute autorité une prise de responsabilité collective des plus efficaces. Les entreprises en faisant appel à lui dans leurs formations ont compris que cette incessante succès story n’est pas qu’une affaire de charisme, ni de belles paroles. Un ami universitaire tire des enseignements d’un tel « leadership transformationnel » où se conjuguent les besoins d’autonomie, de compétence et de relation à autrui.
«Une équipe, comme toute organisation, est d’abord une entité sans cesse apprenante. Et c’est valable aussi pour son leader.»

vendredi 10 mars 2017

Prince charmant.

A tourner autour du pot (au noir) des intentions de vote, je vais essayer d’éviter la mise en accusation vaine et déplaisante qui désigne toujours l’autre comme coupable : l’étranger, le banquier, le fonctionnaire … la société.
Je ne peux m’empêcher de me délecter du spectacle de la droite pour me réancrer à gauche ; en ce moment c’est fête.
A voir ces foules défendant l’indéfendable, donnant à ses enfants comme modèle malhonnêteté et cynisme, nous nous enfonçons nous aussi dans l’ère de la « post vérité » où les faits sont ignorés sciemment. Ces comédies crépusculaires sont accablantes.
Le constat de l’impuissance de nos gouvernants se conjugue avec nos débilités personnelles et s’amplifie avec les réseaux sociaux où le doigté compte plus que la réflexion.
Les minutes nous manquent et l’anonymat amène toutes les outrances sur nos écrans : les seules expressions douces sont réservées aux chatons ou à quelques niaises resucées new age.
« Il est difficile d’attraper un chat noir dans une pièce sombre, surtout lorsqu’il n’y est pas »
La période est à l’outrance et au « dégagisme », un réflexe plus qu’une réflexion, et l’appel aux extrêmes se vit comme un jeu virtuel, mis en couleurs par des distributeurs de haine délirants.
Alors que les Diafoirus du ministère de la destruction publique ne cessent de dire que l’école écrase depuis toujours la confiance des élèves, à mesure que la confiance en l’école s’effondre, les bardés de certitudes, les grandes gueules ont plus que jamais voix aux chapitres, mimant la force et minant la nouveauté tout en appelant au renouvellement.
La déploration que rien ne bouge ne s’embarrasse pas de contradictions en tapant sur chaque proposition inédite.
Progressisme et conservatisme se mélangent quand une nouvelle construction à l’horizon de son pavillon convoque le conservateur de platane paré en défenseur de la planète.
A mesure que les délimitations politiques s’affadissent, les catégorisations évitent l’examen des propositions : ça c’est de droite donc poubelle, ça c’est de gauche : poubelle. N’en jetez plus.
Bon courage à ceux qui veulent réconcilier notre nation depuis le centre.
Les flèches venant de toutes parts contre Macron, le jeune effronté qui prend de l’épaisseur en position centrale, auraient tendance à solidifier mon choix au mitan.
Les irascibles indignés seront trop heureux de continuer leur perpétuel combat dans l’opposition ; pour ma part je préfère les projets positifs annonçant la couleur loin d’ambitions radicales et infaisables mais portant une vision optimiste de notre société qui est quand même bonne fille.
Nous fuyons : répondant à côté des questions, virant au bulletin blanc, marine ou rouge de chez rouge, quand s’approche un choix et c’est ainsi que dans l’attente du prince charmant on se retrouve seul (e) ou avec quelqu’un qu’on ne voulait surtout pas.
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Les illustrations sont du « Canard » de cette semaine.