lundi 14 octobre 2013

Blue Jasmine. Woody Allen



Un air de jazz qui revient : le nouveau  film de Woody Allen est là, attendu comme les premières asperges.
Pauvre petite fille riche, Cate Blanchett joue bien du rimmel qui dégouline pour aller vers une folie rabâcheuse : a tant mentir, nier la réalité d’une vie dépeuplée, il n’y a plus que cette issue.
De la « classe » siglée Vuitton au canapé télé : toujours le vide.
Et ce n’est pas la confrontation tragi comique avec sa sœur caissière de bonne volonté qui l’accable : elle ne la voit pas.
De la même façon, nous ne saurions voir dans notre confort occidental, ne sachant même plus préserver des formes d’urbanité, que nous allons vers la catastrophe économique, écologique sur fond de vacuité culturelle et politique.
L’humour saisonnier du septuagénaire met de l’élégance aux partages de nos délicieuses délectations moroses.
Mais je m’égare : le film mêle comédie agréable aux dialogues bondissants à une noirceur dont le grincement nous est familier : alors nous en sourions, par habitude.
La trame du « Tramway nommé désir », sans le désir.

dimanche 13 octobre 2013

Coquilles Saint Jacques sur fondue d’endives et quenelles.



Je cuisine plutôt au beurre alors que mon fils lui préfère l’huile d’olive que je  trouve trop parfumée sur ce coup, masquant le goût délicat des coquilles Saint Jacques dont la pleine saison va de janvier à mars.
Bien que je ne me détourne pas systématiquement des produits surgelés de chez Picard en particulier, la différence est sensible en faveur des produits du poissonnier du marché de Fiancey.
Faire fondre doucement, au beurre donc, les endives quasiment hachées avec des échalotes (ou sans), pendant 20 minutes, dans le jus d’une orange.
Faire blanchir pendant 10 minutes des quenelles au brochet ou nature, puis les couper en tranches. Surprendre les noix comme on dit quatre minutes à peine recto verso à la poêle en même temps que les quenelles à dorer. Servir le tout sous un trait de crème après avoir salé poivré.
Les quenelles dispensent du riz qui est souvent l’accompagnement habituel de ce plat aux saveurs subtiles.

samedi 12 octobre 2013

XXI. Automne 2013.



La thématique principale « Les terres du futur » avec sa connotation science fiction ne m’attirait guère, et puis comme d’habitude j’ai pris ce numéro 23 et il m’a intéressé de la première à la 210ièmepage. 
Nous sommes sept milliards d’hommes : pour avoir une idée de notre futur, un reporter s’installe dans une base de l’arctique avec ceux qui étudient les évolutions du climat, un autre rappelle la construction du chemin de fer qui allait d’Addis Abeba à Djibouti où les chinois construisent une nouvelle ligne alors que Jean Rollin suit un GR incertain dans Marseille et ses friches.
La diversité des lieux explorés est stimulante :
une école en Bielorussie,
ou  les abords d’une forêt d’eucalyptus  en Chine,
et surtout celle des personnes :
un combattant en Syrie essaie de préserver le patrimoine historique de la ville d’Alep,
un réalisateur de films très prolifique à Kaboul,
une acharnée dont les moutons sont morts mystérieusement dans un village des Vosges,
un économiste penché au chevet de la Bolivie, de la Pologne chargé de  
« transformer une soupe de poissons en aquarium »,
une chinoise devenue éditrice de BD en France qui pense  
« que s’enrichir pour acheter des sacs Vuitton, ce n’est pas ça la valeur d’un pays, ce sont la sagesse, les formes d’expression, la gastronomie, tous les savoirs accumulés pendant des milliers d’années »,
un journaliste emprisonné en Turquie,
« Quand on dépasse l’actualité, nul besoin de s’y accrocher »
une Betty Boop américaine a monté un lieu d’accueil pour des femmes atteintes de fistules, incontinentes suite à des accouchements difficiles. Marie Darrieussecq rappelle l’horreur de l’excision et de l’infibulation ;
 « quand les victimes ne meurent pas d’hémorragie, d’infection ou du tétanos, leur orifice vaginal est tellement abimé qu’il arrive fréquemment qu’on les rouvre au couteau pour leur « nuit de noces »

vendredi 11 octobre 2013

Arythmie scolaire.


La semaine de quatre jours à l’école faisait l’unanimité contre elle, sa réforme tout autant : quelques pierres de plus pour les murailles de ceux qui ne veulent que rien ne change, jamais.
Je pensais simplement que les enfants venant le mercredi matin à la place du samedi d’antan, les autres journées en seraient moins compactées et donc plus profitables.
Trop simple, il  a fallu que l’état se décharge encore sur les communes qui font passer pour des innovations pédagogiques des activités « occupationnelles » dérisoires avec parfois des intitulés aux titres ronflants pour des réalités prosaïques dans le genre « environnement dans la ville » qui concerne dans telle école parisienne, le tri de déchets.
Instit passé, je suis inquiet des échos des classes d’aujourd’hui, et je persiste à rappeler quelques témoignages fatalement teintés de rose, tant le bon sens, la mesure semblent faire défaut dans cette querelle.
Quand l’école comptait, au dessus des surenchères électorales, le samedi matin figurait comme un bon jour, un jour léger, un jour utile. Mais c’est inaudible.
Les 6 heures de classe n’étaient pas forcément harassantes comme le ressassent les médias qui participent à la dépréciation de l’école présentée comme un lieu de stress où  devraient se parachuter en continu des commandos de psychologues en soutien.
Ces 6 heures étaient peut être moins fatigantes que des horaires saucissonnés dans des ambiances où s’excitent les enfants davantage minés par une présence trop longue devant les écrans à la maison, soumis aux pressions excessives de certains parents ou aux démissions d’ autres.
Chers parents, dont je militais jadis pour la présence active à l’école pour des raisons politiques quand il s’agissait pour les citoyens de participer à tous les aspects de la vie : « l’école, la santé, … c’est l’affaire de tous », quand  devaient se rencontrer intellos et populo, et également pour une efficacité pédagogique qu’il vaut mieux cohérente et partagée.
Le personnage « parentdélève » est devenu un objet de dérision pour comiques en boucle, n’assumant guère son rôle d’adulte.
Parenthèses : cet électeur  transporteur des dernières rumeurs ne peut endosser toutes les dérives.
Pas plus que les médias flatteurs de nos paresses, mais pas tout le temps, en tout lieu : l’article de Glucksman dans Libé à propos des Roms a réveillé quelques uns de nos fondamentaux de gauche.
Ils n’avaient pas « vocation » à s’assoupir sous les paroles d’un Vals flattant une opinion  se laissant aller jusqu’où … jusqu’à La Pen !
Education physique, musique, peinture sont essentiels dans les apprentissages, et quand des intervenants extérieurs peuvent apporter leurs savoir faire en cohérence avec le maître - pardon la maîtresse - c’est extra ! Mais cantonner l’enseignement à la préparation d’évaluations maths/français en cascade suivie de tranches d’animation me parait contre productif.
Les enfants qui devaient être moins fatigués le sont bien plus aujourd’hui, et ils le seront d’autant plus que les micros trottoirs vont leur demander :
« Alors tu es fatigué ? »
« Tout à fait Thierry ! »
Quand me trotte dans le souvenir, les airs du joueur de saxophone de Goldman qui mettait tant de cœur à ce qu’il jouait, je ne peux m’empêcher de relever dans bien des conversations le regret de la notion de conscience professionnelle dans tous les métiers et me figer avec Ferré :
« le cœur quand ça bat plus… »
puisqu’il était question de rythme.
..... 
Les dessins du canard me paraissant fades cette semaine: un chat de Geluck

jeudi 10 octobre 2013

Gauguin chez Van Gogh.



Christian Loubet a tenu  son auditoire des amis du musée pendant une heure et demie autour de deux mois tumultueux que passèrent ensemble Paul et Vincent  à Arles entre octobre et décembre 1888.
Les deux solitaires ont  eu des vies « compliquées » comme on dit aujourd’hui pour éviter le mot « brisées ».
Vincent né un an après son frère dont il reçut le prénom, Vincent mort-né, entamera sa carrière de peintre quand son père disparaitra et Théo son frère appellera son fils, né en 1890, année du suicide du peintre : Vincent.
Le tableau des débuts du pasteur défroqué, « Les mangeurs de pommes de terre » déborde vers l’expressionisme en allant plus loin que l’école de Barbizon qui travaillait d’après nature.
La lumière vient du ciel.
Ses « chaussures » sont bien là et prennent leur relief chromatique avec le contraste des couleurs chaudes et des froides.
Van Gogh s’est exercé à différentes modalités sur fond d’or venu des icônes.
Le portrait du « Père Tanguy » marchand spécialisé dans la peinture orientale  peut souligner l’influence de l’art Japonais chez celui qui place la peinture comme un sacerdoce visant à élever l’esprit.
Dans un de ses premiers « Autoportrait au chapeau », le regard est inquiet, les « Cerisiers » au bord de l’incandescence et son « Pont de Langlois » avec ses couleurs intenses nous transporte déjà dans le post impressionnisme.
Avec l’argent de Théo, Vincent a acheté un fauteuil pour Paul Gauguin venu de son école de Pont Aven qu’il attend impatiemment dans sa maison jaune des faubourgs d’Arles où il a multiplié les tableaux représentant des tournesols.
Gauguin a perdu son père à l’âge de un an, il sera élevé par sa mère, fille de Flora Tristan, au Pérou  puis en France, avant de naviguer sur les océans et d’entamer une carrière de peintre, la même année que Van Gogh. Il  cherchera toujours un bout du monde qui retrouverait l’ingénuité des premiers temps, lui « l’indien du Pérou ».
Il apparait timide dans un autoportrait des débuts, il n’a pas encore vu la latérite des Antilles.  Dans « Les Antillaises à la cueillette » : « la lumière transpose, le trait expose, le cadre renforce ». Les arbres bretons seront bleus et ses toiles d’alors incendient la lande, les personnages enserrés de noir sont présentés solennellement, avec distance, comme dans un vitrail, le « Cloisonnisme » dites-vous ; les nabis (les prophètes) s’en inspireront.
« Les bretonnes après le sermon » voient le combat de Jacob et de l’ange se matérialiser sur un champ rouge où les oppositions entre le bien et le mal  sont tranchées.
Au « Cimetière des Alyscamps », les deux peintres son côte à côte,
"C'est drôle, Vincent voit ici du Daumier à faire, moi au contraire je vois du Puvis coloré à faire, mélangé de Japon."
Leur portrait de « Madame Ginoux », la patronne du café dont la fameuse terrasse lumineuse contrastait tellement avec la nuit, marque à la fois leurs différences et leurs influences croisées.
Pour le Hollandais, elle apparait comme une icône, alors qu’elle a le regard torve sur fond de joueurs chez celui qui finira aux Marquises.
Avec ces personnalités « hautes en couleurs », la communication est difficile et les oppositions exacerbées : s’inspirer de la nature, où la recréer ? Le divin ou les humains ?
Vincent a rencontré Paul par l’intermédiaire de son frère Théo, le marchand de tableaux, qu'il considère comme son frère jumeau.
Celui-ci vient de vendre du Gauguin alors que Vincent  n’aura qu’une seule toile négociée juste avant sa mort.
Une dispute éclate entre eux avant la Noël, Vincent apporte un morceau de son oreille coupée au rasoir à Rachel une prostituée de proximité. L’oreille depuis le moyen âge symbolise la matrice.
« L’homme à l’oreille coupée» revient à la vie sous sa chapka sombre.
Dans « Le christ au jardin des oliviers » c’est Gauguin  qui se représente, abandonné, avec des cheveux roux qui valurent des cailloux à son ami, le réprouvé.
« Le christ jaune » de celui qui se voulait anticlérical sera refusé par le prêtre de la paroisse où il devait s’accrocher mais il figure en arrière plan d’un autre autoportrait à côté d’un vase aux allures primitives.
Le « Semeur » de lumière de l’un, peintre atomique, avec ses cyprès montant comme des flammes de la terre jusqu’au ciel, figurera aussi en faucheur avant que les corbeaux ne s’envolent dans le soleil devant l’ultime champ de blé.
Les chevaliers de diverses civilisations de l’autre, se rencontrent, et toutes les religions se retrouvent, les esprits symbolisant la mort côtoyant des Eve tropicales.
Une vahiné regarde par la fenêtre les « Tournesols sur un fauteuil » dans lesquels un œil se cache. Les graines venaient de France.
Autour d’un autre Noël, Gauguin avale du cyanure mais rate son suicide, après avoir peint « D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? »  Œuvre testament  inspirée du symbolisme et du primitivisme, où s’annoncent les fauves et l’art moderne.
Paul  aura réalisé son atelier aux tropiques, lui pour qui Vincent avait rêvé d’un atelier du midi qui aurait fait école.
Signac à Saint Trop et Cézanne, Renoir, Matisse, Bonnard, Picasso, Chagall, De Staël, Klein poseront leurs chevalets au sud.

mercredi 9 octobre 2013

Ethiopie J5. Pays dorze



Nos nouveaux chauffeurs arrivent au petit déjeuner dans deux 4X4 pour affronter les pistes d’un paysage qui change. Nous nous arrêtons  au bord d’un lac où nous dérangeons un homme qui se baignait nu, il nous montre de l’autre côté de la route les restes brulés et putréfiés d’un crocodile dévoreur de troupeaux qui venait s’alimenter dans cette crique : il a fallu 18 hommes pour l’extirper de l’eau.
Sur le parcours nous achetons des bananes et des pommes-cannelles. Au bord de la route, des enfants font montre de leur agilité par des danses expressives, avec des roues, de grands écarts de face et pas seulement de profil.
Nous nous arrêtons dans un village dorze de Chencha à 2500 m d’altitude. Les cases tressées  en forme d’ogive rappellent les éléphants de jadis qui ont fui vers le Kenya. Ces constructions traditionnelles s’élèvent  facilement jusqu’à une dizaine de mètres et leur durée de vie va de 70 à 100 ans. Le tressage en feuilles de faux bananiers est rénové tous les 20 ans. Quant aux bambous qui constituent l’armature, lorsqu’ils sont grignotés par les termites depuis la base, ou abimés par l’humidité, la case diminue peu à peu. Il faut alors réajuster les portes puis elle sera recyclée en annexe. Il existe une petite case pour les jeunes mariés en attendant  la construction de leur case familiale. Un jeune guide rasta, Yoyo, nous fait visiter l’intérieur de l’une de ces cases où les chaises en peau de vache reçoivent les voisins lors des cérémonies du café qui se multiplient dans la journée avec un facteur 3, puisque 3 services sont prévus à chacune des 3 invitations. C’est sur cette proposition de rythme que nous sommes réunis autour d’un verre d’araké provenant du faux bananier(encète) agrémenté d’ail, d’anis et titrant ses 65 °.  Nous nous en tiendrons à deux tournées hilarantes après la galette au piment puis au miel. Quand on boit avec ses amis de la bière il convient de boire au goulot de la calebasse, à deux en même temps, puis on transmet à deux autres.
Nous suivons le processus de fabrication des galettes  cuites entre deux feuilles sur un feu d’eucalyptus : de l’extraction de la pulpe depuis les feuilles qui donnent également des fibres fournissant des cordages voire des cordes pour les instruments de musique.
La pulpe est mise à vieillir passant d’une odeur de concombre à celle du fromage. Le stockage peut aller de 3 mois à 7 ans.
Après dégustation des produits locaux qui ne nous ont pas laissé indifférents, nous négocions de l’artisanat local dont la spécialité est le tissage du coton cultivé près du lac, ramassé par les enfants, filé par les femmes et tissé par les hommes. Les sobres étoles sont appréciées.
Au marché sont vendues des graines de tef, qui entrent dans la fabrication des galettes et du gingembre.
Sur le chemin du retour, au moment où nous nous arrêtons pour observer un beau point de vue un groupe d’enfants entame un chant responsorial très rythmé. Le soliste raconte ce qu’ils veulent en tant qu’écoliers et ce qu’ils n’ont pas en n’allant pas à l’école. Nous les enregistrons y compris les demandes de T-shirts. Lorsque nous poursuivons la route très pentue, les enfants prennent des raccourcis et réapparaissent avec leurs danses. Tout est dans le déhanchement différent au nord avec les épaules qui remuent alors qu’autour de l’Omo c’est plutôt le saut comme chez les Masaï.
A Arba Minch où nous nous dirigeons directement vers l’hôtel Tourism qui a plusieurs restaurants très fréquentés et de nombreux bâtiments aux chambres en rez de chaussée avec petits balcons et salons de jardin. Repas aux chandelles dehors sous une température agréable au chant des grillons.

mardi 8 octobre 2013

Palmer en Bretagne. Pétillon.



Surpris par la marée, isolé sur un rocher, c’est bien parce qu’il est à l’écart que le détective avec son imperméable plus utile dans ces contrées atlantiques qu’en Corse où il était précédemment en mission, va tout voir, mais sera-t-il entendu ?
Et il s’en passe des vertes et des pas mûres chez une espèce de Christine Lagarde qui reçoit en son manoir quelques spéculateurs d’art moderne se détestant cordialement (François Pinault et Bernard Arnault) parmi des communicants, l’un les yeux rivés sur son Smartphone ou une autre lorgnant sur quelque braguette débarquant en hélico : ça pue et pas seulement à cause des algues vertes.
« Nous avons eu douze cas d'intoxication alimentaire au Pardon de Saint-Hagut ... un kig-a-farz tandoori »
BD politique, je l’attendais ainsi de la part du dessinateur du Canard Enchainé, mais plus imprévues dans ce type de dessins comiques, les couleurs aquarellées rendent bien l’atmosphère de ce pays attachant et les traits vigoureux croquent les immuables et les modernes. Des oisifs suffisants exploitent le personnel mais le mareyeur porté sur la picole amène une tonique verdeur populaire comme le marin placide, et d’autres personnages bien campés.
Un agréable moment.