dimanche 31 août 2008

la rentrée du temps que j’étais instit’

La rentrée c’est la cérémonie d’ouverture, le générique immuable, la couverture neuve d’un livre qui va s’écrire.Une année scolaire se joue dès les premiers instants.
Un bouquet de fleurs attendait
sur le bureau. J’ai eu coutume de mettre la cravate ce jour là pour souligner ostensiblement la solennité de ce jour de fête.Chaque enfant entre en solitaire, il vient de lâcher la main de maman et ce jour, tout le monde sait qu’il vient de gagner une graduation sous la toise. Il s’est séparé peut être de copains. J’affichais les photographies de classe des années précédentes, et certains y reconnaissaient des frères et sœurs qui les avaient précédés, pour souligner la continuité dans un territoire vierge pour chacun, où le trac mobilisateur est le lot de tous. Les héritiers d’une histoire de l’école vont ajouter leur partition.Une fille voisine obligatoirement avec un garçon. Les changements de places seront négociés plus tard.La sempiternelle grille de renseignements agrémentée de petits dessins recueillait quelques indications personnelles : magazines auxquels l’enfant est abonné, présence de la télévision et de l’ordinateur dans la chambre? J’y glissais : 
« voudrais-tu devenir plus tard instituteur ou institutrice ? » pour juger comment chacun se représente l’école.Je m’enquerrais des matières préférées et proposais à nouveau cette fiche à la fin de l’année pour saisir les évolutions. Un fichage maison, à la main.Profitons de ces instants de grâce, de zèle, d’attention. Le moment de toutes les promesses. Organiser ce jour là un pique-nique pour éloigner de la classe touche au contre-sens, alors que dans les odeurs de cahiers neufs, avec son nouveau stylo, l’enfant s’apprête pour l’aventure qui s’ouvre : celle de grandir et d’apprendre. Un petit texte préparé à l’envers du tableau avec des « mots tordus », invitait à la vigilance et tenait à prouver d’emblée que l’erreur peut être féconde, voire marrante. Je questionnais également mes nouveaux locataires sur ce qu’ils avaient perçu des affichages extérieurs ; en général peu de choses des affiches que j’avais choisies comme icônes, Picasso, Delacroix, « La gloire de mon père », masques africains et enfants de toutes origines, Sempé, « La victoire est en nous » avec Barthès d’avant le crachat … Ouvrez les yeux. Je présentais les lieux. La matinée se poursuivait sous le signe de l’affiche avec les publicités de rentrée de la F.N.A.C. ou de Décathlon : lecture rapide, liaison classe/société. Cette année la pub Monoprix peut être une mine : « Top model, pas élève modèle ». Je soignais l’ affichage, je le renouvelais régulièrement, il tapissera les mémoires. Quelle désolation de trouver dans certaines classes, à Pâques, les décorations de Noël !
Je me servais des séductions de la pub pour amorcer une réflexion sur ce phénomène
dont la concision, l’humour favorisaient l’attention, titillaient l’intelligence. Je m’attachais à décrypter aussi les intentions qui nous abaissent à ne devenir qu’un ventre, qu’une rétine.Nous étions dans le match.

samedi 30 août 2008

Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur

« La gloire de mon père » dans le sud des Etats-Unis, en plus dramatique, en plus mystérieux, mais avec le même bonheur de lecture, des personnages bien campés et surtout un style plein d’humour, de délicatesse, qui révèle la belle énergie de la petite narratrice. Familier de la littérature jeunesse, j’accorde beaucoup de prix aux écrivains rares qui arrivent à rendre avec justesse le langage, les façons de penser des enfants. Après 30 millions de lecteurs c’est facile de dire que la réussite est totale. Les grands mots à manier avec des pincettes car ils ont été tellement brandis, trahis, sont illustrés ici finement : amour, probité, justice. Malgré les préjugés, la violence, la pauvreté, c’est un hymne au progrès humain. Ce roman d’Harper Lee, qui figure sur les listes de lycées américains, est attaqué par des associations de parents d’élèves. Le combat des années 30 de ce père avocat qui défend un nègre, continue. Comme principe d’éducation, il invite sa fille qui fait volontiers le coup de poing, à se mettre à la place de l’autre : pragmatisme d’un livre bien américain, bien sudiste, universel. Je me suis pris à vouloir d’emblée le relire, d’autant plus que j’avais eu un peu de difficulté à entrer dans la généalogie qui ouvre ces 450 pages. Le plaisir est tel que je recommanderais volontiers la méthode.

vendredi 29 août 2008

« Les indégivrables »


Rien que le sous-titre au tome 3 de ce dernier recueil de Xavier Gorce : « un léger tassement conjoncturel mais les fondamentaux sont bons » dit tout l’humour ravageur de ces 122 pages. Des manchots contaminés par les langues bienséantes de ce siècle sont désespérés, arrivistes, de mauvaise foi, irrésistiblement drôles. La fin du monde sera tordante avec ces bestiaux tellement humains qui vont gaiement à la queue leu leu s’écrouler au bas de la falaise. Dessinés en deux coups de crayon efficaces, ils philosophent à la manière du "Baron noir" du Matin de Paris. Là, ils égaient la news’ letter du Monde.fr, mais ils peuvent se déguster sur papier avec les éditions Inzemoon.

jeudi 28 août 2008

Un garçon d’Italie.

Livre limpide de Philippe Besson, quoique parfois un peu attendu. Le procédé consistant à juxtaposer le récit d’un noyé, de sa compagne et de son amoureux s’avère judicieux pour dévoiler peu à peu la part de mystère qui est celle de tout homme. Le policier qui doit enquêter n’est pas génial, nous sommes donc épargnés par une révélation trop lumineuse. L’ambiguïté et l’énergie des personnages, servies par une écriture sans chichi, nous concernent. Cependant, sans vouloir être plus royaliste que le roi, le dévoilement de l’homosexualité ne me semble pas devoir requérir aujourd’hui tant de mystère.

mercredi 27 août 2008

Notre Dame du rugby


Une chapelle édifiée pour honorer la mémoire de trois jeunes joueurs tués dans un accident dans les années 60, ouvre sa porte aux visiteurs à Larivière Saint Savin dans les Landes. Elle se situe non loin de Saint Sever, ville dont l’abbatiale abrite de remarquables sculptures romanes colorées. Au bout d’un petit chemin qui grimpe, à l’emplacement d’un ancien oratoire, nous allons au-delà de la curiosité folklorique. Ce n’est pas qu’un théâtre destiné à provoquer une bonne fortune pour son équipe ; il tient du musée qui recèle aussi bien une collection de maillots d’internationaux prestigieux que le ballon de l’équipe réserve d’un village voisin.
« Beau comme la rencontre fortuite d’un parapluie et d’une machine à coudre sur une table de dissection », assure Lautréamont. La rencontre sur un autel d’un crucifix et d’une paire de crampons n’étonnera pas le promeneur. La célébration de la fraternité, de la loyauté, les témoignages d’une ferveur joueuse ont des accents émouvants sous les vitraux naïfs.

mardi 26 août 2008

L’Afghanistan


Et même si en dehors des bribes de journaux, de B.D., j’en savais plus sur ce nid des tempêtes, est ce que je pourrais me permettre d’avoir un avis tranché ?
Le taliban sans visage, celui qui est l’incarnation du mal absolu, même les soldats qui sont là bas s’étonnaient de le voir enfin …au bout de leur fusil.
Si une propagande folle a eu prise sur ces pauvres, c’est que leur pays est occupé, non ?
Je peux seulement trouver les présentations des journaux télévisés bien insuffisantes.
Pour la rentrée de Poujadas, ils avaient leur scoop à France 2 : un convoi, là bas, avait reçu une roquette non explosée, et le commentateur de commenter comme une partie sportive. « La volonté de ne rien laisser passer » où il est question de motivation et d’une défaite à dépasser (10 morts). Il y en avait eu d’ailleurs 50 (des civils, des enfants) lors d’une bavure au même moment mais c’est de la deuxième division.
En plateau la satisfaction : « l’essentiel c’est que ce soit du direct » qui aurait eu plutôt sa place en conférence de rédaction, mais c’est le blabla destiné aux professionnels de la profession, comme l’énumération à chaque reportage de quelques secondes de tous les patronymes des collaborateurs : « coucou, maman, c’est moi je suis dans la télé »

lundi 25 août 2008

Un millier d’années de bonnes prières.

Contrairement aux pitchs copiés/collés sur Internet qui témoignent du conformisme sévissant sur la toile, la distance entre un père arrivant de Pékin pour voir sa fille aux States n’est pas seulement celle de la distance culturelle. C’est celle des générations ; la transparence est entrée dans le vocabulaire mondialisé et pourtant nos enfants nous paraissent bien étranges parfois et, nous les vieux en mal d’enfance, passons pour des étrangers à leurs yeux. Le film est sensible, pudique, simple, amenant subtilement à la réflexion en particulier autour des langues où l’on voit le père chinois se faire mieux comprendre d’autres expatriés avec quelques mots, qu’avec sa fille.

La photographie d’illustration est de Jean, compagnon de voyage en Chine en 2007.