jeudi 26 avril 2018

Yves Klein. Christian Loubet.


Le conférencier traitant du « blues d’Icare » devant les amis du musée de Grenoble va nous emmener au-delà du bleu immuable qui est associé au peintre né à Nice en 1928.
Il a manifesté très tôt une soif d’absolu passant par le judo, le bouddhisme, l’art Gutai, la cosmogonie Rose Croix et la philosophie de Gaston Bachelard. Yves Klein à l’institut Kodokan.
« Alors que j'étais encore un adolescent, en 1946, j'allais signer mon nom de l'autre côté du ciel durant un fantastique voyage "réalistico-imaginaire". Ce jour-là, alors que j'étais étendu sur la plage de Nice, je me mis à éprouver de la haine pour les oiseaux qui volaient de-ci, de-là, dans mon beau ciel bleu sans nuage, parce qu'ils essayaient de faire des trous dans la plus belle et la plus grande de mes œuvres. »
Puisqu’il a pris le ciel, il partage le monde avec son ami Arman à qui revient la terre, l’air sera pour le poète Claude Pascal.  
Yves Klein et Claude Pascal dans les rues de Nice en 1948.
Devenu ceinture noire, quatrième dan, il accroche plusieurs monochromes aux couleurs  des différentes ceintures de judo dans l’école qu’il vient d’ouvrir.  Peintures, 1954
Au salon des Réalités Nouvelles, son monochrome orange, Expression de l’Univers de la couleur mine orange est refusé par le jury.
« Une seule couleur unie, non, non, vraiment ce n’est pas assez, c’est impossible ! »
Et pourtant, Malevitch, Carré blanc sur fond blanc en1918 est à la limite du perceptible.
Rothko White Band no. 27  « buvarde » et donne à méditer.
Qui a-t-il derrière les entailles de Fontana, Concetto spaziale/Attese ?
Et que dit Icare de Matisse en papier bleu découpé ?
Le souvenir de De Staël pourra-t-il se dissocier de son suicide comme s’il était condamné à un ordre local ? Tempête.
Il fait la connaissance du critique Pierre Restany qui oblige le spectateur « à saisir l’universel sans le secours du geste ou de la trace écrite. » Si Milan reconnaît « chaque couleur comme une présence » Londres ne comprend pas. 
A Paris il présente dans une galerie une salle entièrement vide : Immatériel,
et lâche 1001 ballons : Sculpture aéro-statique.
Avant de travailler avec Jean Tinguely
où il est question aussi de « saut dans le vide », il réalise des monogolds et monopinks:
« la monochromie est la seule manière de peindre permettant d’atteindre à l’absolu spirituel. »
Après sa rencontre avec Rotraud Ueker du groupe allemand Zéro, il développe la technique des pinceaux vivants, « célébration d’une nouvelle ère anthropométrique ».
Pendant l’exécution de « La symphonie monoton » des femmes nues apposent les empreintes de leur corps sur des papiers blancs, ou laissent la trace de leur silhouette en négatif après vaporisation, composant une série de 180 œuvres. Est alors suggéré, « le passage du visible à l’invisible, du matériel au spirituel » et inversement.
Il participe aux expositions des « Nouveaux Réalistes » avec Arman, Tinguely, Raysse, les niçois, qui ont fréquenté les mêmes lieux, sans constituer véritablement une « école niçoise ».
Il retrouve aussi César, Villéglé, Spoerri …dans la présentation de «  A quarante degré au dessus de dada » avant de désapprouver un nouveau texte de Restany.
Ses premières « cosmogonies » sont réalisées à Cagnes-sur-mer.
« Je plaçai une toile, fraîchement enduite de peinture, sur le toit de ma blanche Citroën. Et tandis que j’avalais la nationale 7 à cent kilomètres à l’heure, la chaleur, le froid, la lumière, le vent et la pluie firent en sorte que ma toile se trouva prématurément vieillie. Trente ou quarante ans au moins se trouvaient réduits à une seule journée. »
Dans ses sculptures de feu, les couleurs flambent.
Il porte l’uniforme de l’ordre des chevaliers de St Sébastien lorsqu’il se marie avec Rotraud. Tableau de mariage (1962), Yves Klein, Christo
Au musée des arts décoratifs, est présentée une maquette du « Rocket pneumatique » engin sans retour « pour les consommateurs d’immatériel décidés à disparaître un jour dans le vide ».
Il meurt à 34 ans. Il venait d’assister à la projection de « Mondo cane » un film provocateur qui présentait une de ses performances d’une telle façon qu’il s’était senti humilié.
Ayant désigné «  tout espace comme espace plastique possible », « son refus de recourir à l’objet » et la notion « de sensibilité immatérielle » vont laisser des traces dans bien des courants: le body art, le minimalisme, l’art conceptuel. Pour le conférencier niçois, il a rejoint Matisse, Bonnard et Ernest Pignon Ernest, sous le blason « soleil d’or sur fond d’azur ».

1 commentaire:

  1. Je trouve que c'est un parcours tragique. Terrible.
    Et je suis nullement séduite par les effets de tant de fascination avec l'Absolu.
    Encore une fois, ça confirme pour moi qu'il n'y a de vie vivable que loin de Dieu... ou de l'Absolu. (mais pas trop loin, parce que, paradoxalement, trop loin revient à être tout contre).

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