samedi 3 juin 2017

Civilisation. Régis Debray.

J’aurai bien corné chacune des 231 pages de la dernière publication de mon phare préféré; je me contenterai de quelques formules ramassées :
«Si l’Europe a partie liée avec le temps, l’Amérique a partie liée avec l’espace »
« L’attention que l’un porte aux espaces du dehors, l’autre la donne aux espaces du dedans ». C’est qu’il est question comme l’indique le sous titre de « Comment nous sommes devenus américains » et ce n’est pas triste.
Pourtant «  A l’heure où une Chine bien réveillée rachète nos centrales et nos aéroports, où un business-man indien donne son nom à nos hauts fourneaux, où le spectre de Mahomet se promène dans nos rues, où l’Amérique branle dans le manche, la question de savoir qui porte le pantalon dans le couple occidental peut sembler d’intérêt local et purement rétrospectif. »
Il met en agréable compagnie, les grands balayages historiques et les signes les plus menus comme Halloween qui a remplacé la Toussaint et donne à retenir quelques définitions fortes :  
« Une culture est célibataire, une civilisation fait des petits. »
« Une civilisation agit, elle est offensive. Une culture réagit, elle est défensive. »
Alexandre Le Grand est l’homme d’une civilisation, Périclès d’une culture
Lui qui est toujours interdit aux Etats-Unis, malgré son amour de Faulkner, n’a pas désarmé même si désormais l’économie a remplacé la culture après que l’image eut supplanté le texte.
Loin de persister dans les regrets, il sait que le neuf fleurit sur de vieux terreaux.
Il prend l’exemple de Vienne capitale de l’empire austro-hongrois, qui au moment de sa décadence livre au monde tant d’artistes et de savants : Klimt, Musil, Freud, Mahler… car « les périodes fastes et conclusives sont celles où la mélancolie au cœur n’empêche pas la gaîté de l’esprit »
Autant que ce soit bien dit.
«  Les crépuscules donnent du talent » voire
« Les viandes un peu faisandées, juste avant de se décomposer, libèrent de subtils arômes » Pour conclure sur une note positive, il s’oblige à mettre à la forme interrogative :
« Qui a dit que sortir de l’histoire oblige à broyer du noir ? »

1 commentaire:

  1. Régis est plus optimiste que moi, apparemment.
    Mea culpa, c'est prévisible, mais je réagis comme tu pourrais savoir d'avance que je ferais à la phrase "la question de savoir qui porte le pantalon dans le couple occidental peut sembler d'intérêt local et purement retrospective. "(En passant, j'espère que Régis a écrit "retrospective" et pas "rétrospectif", parce que j'espère qu'en bon intellectuel français, il sait encore accorder ses adjectifs...c'est le moins qu'on puisse lui demander, tout de même.)
    Je retrouve chez Régis dans cette phrase... lapidaire, très lapidaire (et nous savons combien les phrases lapidaires sont le propre des prophètes, d'où notre... méfiance pour la parole elliptique des prophètes, de quelque bord que soit) l'aveuglement d'une bonne partie de l'intelligentsia de gauche sur ce qu'elle qualifie de manière péremptoire d'anecdotique.
    Alors que les soi-disant disciples de Darwin devraient avoir plus de respect pour les problèmes liés à l'identité sexuelle, la reproduction et.. l'avenir de la reproduction de l'espèce humaine.
    Et puis... Régis parle de travers dans cette citation, étant donné qu'à l'heure actuelle maintenant, les deux sexes, homme et femme portent le pantalon (littéralement, je veux dire, et l'esprit naît... à partir de la lettre, quand même).
    L'avenir nous dira si Régis a raison de prendre ce dossier autant à la légère. Pour ma part, je crois qu'il a tort.
    Mais je vais demander ce livre pour notre petite bibliothèque afin de pouvoir le lire en entier, et m'en faire mon idée.

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