samedi 11 mars 2017

Le règne des affranchis. Claude Onesta.

Le football est un langage universel. C’est valable aussi de porte à porte, pour un de mes voisins à qui j’avais transmis quelques textes bien tournés de spectateurs de la balle au pied, qui en retour m’a passé un livre de l’entraîneur de l’équipe de France de handball qui a remporté tous les titres.
Proust attendra encore, et « l’Homme sans qualité » aussi
Va pour ces 270 pages, alors que je n’ai même pas vu un match du dernier mondial qui se jouait en France.
Les allers-retours d’un mur à l’autre, de mecs aux larges épaules me laissent en général assez indifférent, et je  n’épouse pas l’engouement trop exclusif des profs d’ EPS pour ce sport. De surcroît, les victoires trop fréquentes sont lassantes.
Les raisons s’accumulaient pour que je rende poliment le livre sans aller jusqu’au bout,
alors j’ai d’autant plus apprécié le caractère fort du toulousain qui sait reconnaître ses conneries, tout en maintenant un cap déterminé. 
Je ne me lasse pas de la formule parfaitement illustrée tout au long de ses pages limpides et chaleureuses:
« Le dire ça fait rire, le faire ça fait taire »
Le fils de cocos, cousin de Gérard l’écolo, en se gardant bien de donner des recettes, prouve dans l’action, la force et la pertinence de ses intuitions, de son éthique.
« Je ne m'imagine pas une seule seconde comme l'épicentre d'une galaxie d'étoiles brillantissimes. Les gens brillantissimes, ça ne met pas les mains dans le cambouis. Ça ne fait pas don de sa personne dans l'intérêt supérieur de la collectivité. »
Rusé, il narre quelques coups qui ont déstabilisé les adversaires, mais sa verve bien nécessaire pour l’agrément d’un livre, ne serait que du vent s’il ne savait pas écouter, observer pour tirer le meilleur de ses hommes, grâce aussi à un staff consciencieux pour lequel il a renoncé à une décoration personnelle qu’il estimait méritée par tous.
Je l’ai trouvé très juste et convainquant. Honnête. La politique et la pédagogie feraient bien de s’inspirer de son audace, de son humilité, tirant de la force à partir des défaites, organisant depuis sa haute autorité une prise de responsabilité collective des plus efficaces. Les entreprises en faisant appel à lui dans leurs formations ont compris que cette incessante succès story n’est pas qu’une affaire de charisme, ni de belles paroles. Un ami universitaire tire des enseignements d’un tel « leadership transformationnel » où se conjuguent les besoins d’autonomie, de compétence et de relation à autrui.
«Une équipe, comme toute organisation, est d’abord une entité sans cesse apprenante. Et c’est valable aussi pour son leader.»

1 commentaire:

  1. C'est vrai, je ne pratique pas tout à fait ce que je prêche.
    J'ai toujours été plus qu'étonnée de voir l'engouement que suscitait la vision d'une flopée de mecs (ou de nanas maintenant, égalité oblige), courant après un référentiel bondissant.
    Et puis... en pisse vinaigre que je suis aussi, j'en ai marre d'entendre ces oppositions éternelles lassantes basées sur le préjugé o combien tenace que des gens qui aiment la matière sonore ou visuelle sur la page ne supportent pas d'avoir les mains sales.
    Reliquat et rappel d'une organisation antique de la vie où.. les aristos ne levaient pas le petit doigt, laissant.. LE TRAVAIL aux esclaves ?...
    Je constate à quel point ce préjugé est.. confortable et rassurant, peut être même moins pour les gens qui se pensent en haut de l'échelle sociale (en passant, a t-on encore le droit de penser ça, je n'en suis pas sûre), que pour ceux qui... ne se pensent pas en haut de l'échelle sociale...
    Pour ma part, j'ai toujours plus ou moins aimé me salir les mains. Evidemment, il ne faut pas chatouiller les touches d'un piano, ni tourner les pages d'un livre avec les mains pleines de cambouis, mais avec le progrès moderne, et l'eau courante, c'est vite fait de passer les mains sous l'eau, et frotter avec du savon. Assez vite fait...
    C'est chic le foot pour l'esprit d'équipe, j'en conviens.
    Un peu comme... l'orchestre, à sa manière, qui est sous tous les feux en France en ce moment (et pas seulement), où on liquide les orchestres à droite et à gauche pour des raisons financières (et idéologiques, n'oublions pas que le fric n'explique pas tout...) tout en faisant la catéchèse sur le salut par le sport.
    On ne m'a pas (encore) convaincu. Il faudra que l'Evangile (du sport) s'améliore avant de me convaincre...

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