dimanche 29 mai 2016

Ça ira (1) Fin de Louis. Joël Pommerat.

J’aggrave mon cas, quand après 4h 15 de spectacle, je proclame que j’en aurais volontiers redemandé, et m’incruste donc dans la catégorie des snobs hors d’âge.
Il y a pourtant largement de quoi se nourrir dans cette pièce couverte de récompenses aux Molières.
Ce fut tellement stimulant, qu’en ces temps obscurs, cet intelligent éclairage peut fasciner les foules.
Nous parcourons, non pas une galerie mainte fois empruntée couverte de figures à l’origine de notre République, mais affrontons des problématiques d’une actualité brulante !
Louis XVI est le seul personnage nommé, et si Bailly ou Necker sont identifiables, il s’agit  plutôt de la mise en scène, de courants conservateurs, modérés, radicaux, en effervescence, vivement incarnés par des acteurs remarquables.
Les évènements sont documentés sans se perdre dans l’anecdote, depuis la convocation des états généraux jusqu’avant la fuite à Varennes.
J’en ai appris. L’économie était ignorée dans nos écoles de jadis, cela ajouté à mon tempérament, mon  enseignement s’en est ressenti. Si j‘avais placé la révolution française dans la continuité des encyclopédistes, j’ai bien peu insisté sur l’état déplorable des finances qui a justifié le recours à la convocation des états généraux, et sur les pénuries de blé qui ont pu déterminer les foules dans le processus révolutionnaire.
Alors que « Nuit Debout » venait de décamper des abords de la MC2, l’interrogation que leurs incorrects participants ont portée à l’incandescence, concernant les formes de la démocratie, a été abordée depuis les travées de spectateurs jusqu’au plateau avec force et nuances.
Le rêve d’une VI° république est sous-jacent en ce mai 2016, dans ces débats précédant la naissance de la première de nos républiques.
Les rapprochements avec notre époque ne sont jamais superflus, même si Louis fait penser à Albert de Monaco et que les rites monarchiques présentés enrichis de selfies, soient bons pour le 20h.
Des dépêches arrivent au milieu de réflexions qui ont l’intention de s’inscrire pour les siècles à venir ; nous en sommes là entre deux tweets avec bien peu de vision au delà de la prochaine échéance électorale.
Nous partageons les tensions entre les partisans d’une démocratie directe des comités de quartier et les députés qui viennent d’accéder à la démocratie représentative portant tous les espoirs de responsabilité mais aussi les fragilités des hommes. Nous suivons cette dynamique et ses aléas, les passions et les retournements, les opportunismes et le souci de l’intérêt général.
L’auteur est subtil dans sa pédagogie, jamais donneur de leçon.
Cette virtuose superposition d’époques nous réconcilie avec les dispositifs où les acteurs sont dans la salle, et revigore nos passions politiques assommées, en les nourrissant d’Histoire et de générosité.
Une nuit féconde, telle que celle du 4 août, peut-elle se rejouer, un jour ?

3 commentaires:

  1. Vu ce spectacle aussi, jeudi dernier. En effet, c'est génial. Comme si nous y étions! Un brin démago quand même, selon moi (les rapprochements suggérés avec la situation actuelle étant un peu faciles). mais nous "comprenons" mla révolution de 1789 comme jamais nous ne l'avons comprise.

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    1. J'ai bien aimé que la formule "ça ira" soit dite par Louis XVI dans le genre "jusqu'ici tout va bien" du film La Haine ou le " c'est normal d'Areski et Brigitte Fontaine https://www.youtube.com/watch?v=Nrzq0Hddcjk

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    2. oui, c'est ça... ça ira bien!

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