dimanche 20 mars 2016

L’émoi du monde. Rachid Ouramdane.

Un ami qui avait vu le spectacle m’avait dit qu’il avait été subjugué : pas mieux.
Décor blanc élémentaire, dès les premiers pas, j’ai marché : sous des lumières changeantes, caressantes, un soliste danse comme un pantin désarticulé sur une musique mécanique, répétitive, s’évadant parfois. Il va être rejoint par une quinzaine de danseurs qui déchainent un feu d’artifice de gestes inventifs, à deux, à trois, à plus, à tous, tout en exprimant à mon sens, un sentiment poignant de solitude malgré des chaines qui se tricotent harmonieusement. Les rencontres sont furtives, ils fuient, se rattrapent. Le désordre est  rigoureux et je m’étonne à chaque fois des capacités de mémoire corporelle des artistes. Alors qu’au même moment  les professionnels du rugby étaient au stade des Alpes où ils ont préparé des combinaisons savantes que l’adversaire déjoue parfois, ici on ne voit aucune couture et les mouvements d’une folle intensité sont d’une fluidité enjouée.
Heureusement que des moments de calme arrivent tant la tension est forte, le rythme acharné, les impulsions, les courses, multiples.
La deuxième partie du spectacle de 1h 25 intitulée « Tout autour » met en jeu 24 danseurs, cette fois en chaussettes après les pieds nus du premier épisode « Tenir le temps ».
Les titres généraux ambitieux ne rendent pas compte de l’originalité de la démarche d’Ouramdane déjà vu http://blog-de-guy.blogspot.fr/2015/12/sfumato-rachid-ouramdane.html  qu’on peut se réjouir de son installation ici où il dirige avec Yoann Bourgeois le Centre chorégraphique national de Grenoble.
En cette époque restrictive, l’effet de masse est spectaculaire quand hommes et femmes habillés de marron ou de vert se croisent, se roulent au sol, virevoltent. Quand on s’aperçoit vers la fin que le piano joue tout seul, on se demande depuis combien de temps, tellement on a pu être pris entre suivre un individu ou l’ensemble qui peut se voir comme des barrettes ondoyantes d’un graphique ou des curseurs : des machines émouvantes.

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