dimanche 14 février 2016

Le canard sauvage. Ibsen, Braunschweig.

En revoyant la date de création de la pièce : 1885, et sa modernité, je mettrai Ibsen dans son domaine aussi haut que Picasso qui toujours étonne.
L’originalité de l’approche est bien mise en valeur par le metteur en scène qui cette fois,
met la sobriété au service de la profondeur tout en ménageant la part de la folie et du rêve.
Le mensonge est-il préférable à la transparence ?
En ces temps où le politiquement correct poursuit son chemin d’autruche face à la barbarie la plus primaire, l’exploration de nos passions contradictoires n’est pas du luxe.
Malgré le titre et les métaphores concernant la nature, je n’ai pas perçu la centralité de l’aspect forêt primaire, bien que la symbolique soit forte : lorsqu’ils sont blessés, les canards sauvages préfèrent plonger et s’accrocher aux herbes du fond plutôt que de survivre.
J’ai vu plutôt ce qui figure dans le livret d’accompagnement substantiel distribué à la MC 2, l’illustration de Nietzsche :
« L’Européen se travestit avec la morale parce qu’il est devenu un animal malade, infirme, estropié, qui a de bonnes raisons pour être « apprivoisé », puisqu’il est presque un avorton, quelque chose d’imparfait, de faible et de gauche… Ce n’est pas la férocité de la bête de proie qui éprouve le besoin d’un travestissement moral, mais la bête du troupeau, avec sa médiocrité profonde, la peur et l’ennui qu’elle se cause à elle-même. »
Les acteurs sont excellents, et je regrette que le médecin dont les interventions sont irradiantes ne soit pas plus présent. Le photographe causeur, qui vit de l’argent du père d’un ancien ami se rachetant de ses faiblesses, est veule à souhait, cet ami pathétique, les femmes ne sont pas dupes.
Pas de pathos, la distance est maintenue, sans froideur : les éléments d’un mélo qui touille secrets de famille, enfant du péché et affaire d’argent, s’installent sans trompette pendant 2h 30 indispensables.
Les allusions autour des images retouchées nous emmènent, au-delà des photochoperies, vers  nos arrangements avec la vérité pour continuer à vivre.
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 Après une semaine de pause, je reprends la publication quotidienne de mes articles lundi 22 février.

1 commentaire:

  1. Ça a l'air intéressant.
    Pour la citation de Nietzsche...
    En le lisant on peut très bien comprendre comment et pourquoi les Nazis se sont emparés de ce philosophe, si je puis dire.
    BIEN QUE JE SOIS D'ACCORD AVEC NIETZSCHE, globalement, sur ce qu'il dit (mais je préfère la manière dont Freud formule la même problématique dans sa lettre à Einstein sur "Pourquoi la guerre ?"), il y a des "vérités" qui ne sont pas bonnes à dire, surtout publiquement en en faisant la propagande, et sur ce point Nietzsche a péché là où Jésus a péché, d'ailleurs, à sa manière.
    Il y a des vérités qu'"on" a le droit de penser en son for intérieur, dans le noir, bien planqué, mais dès qu'on a son.. PROCHAIN en face, il faut savoir... s'adapter ? en tenir compte ?
    Le monde est fait de ces paradoxes. On ne va pas les faire disparaître.
    Bonnes vacances.

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