jeudi 7 janvier 2016

Georgia O’Keeffe. Etienne Brunet.

Les visites guidées me deviennent indispensables : le professeur Brunet qui s’adresse à d’autres professeurs, nous a apporté une fois encore des éléments passionnants pour mieux voir, tout en se montrant d’une prudence de Sioux quant aux commentaires univoques.
Ainsi pour l’artiste américaine, n’a-t-il fait qu’effleurer l’interprétation freudienne de toutes ces coroles et pistils de fleurs, plis et replis de pétales, respectueux en cela de la belle aux allures parfois androgynes, lassée des exégèses de cette eau.
J'ai fait paraitre dernièrement sur ce blog un compte rendu de la conférence de Sophie Bernard la conservatrice concernant l’exposition O’K au musée de Grenoble qui dure jusqu’à début février 2016. 
J’éviterai de me répéter dans l'article ci-dessous ou dans celui de la prochaine parution au sujet de « La modernité photographique au temps de Georgia O’Keeffe » par Hélène Horain. 
C’est l’histoire d’une américaine, née à 15 km de chez  Laura Ingalls Wilder auteure du roman « La petite maison dans la prairie » qui étonna Stieglitz dont la galerie newyorkaise, fenêtre sur l’Europe, pourra enfin exposer une forte novatrice du « nouveau monde ».
L’exposition chronologique montre bien les évolutions de l’artiste née en 1887 dans le Wisconsin, et morte en 1986 à Santa Fe :
dialectique abstrait / concret, des horizons infinis aux recoins infimes, collines du Middle West et contre plongée aux pieds des gratte ciels, lumières du Nouveau Mexique… 
Il s’agit bien comme  le disent les affiches, de Georgia  O’Keeffe « et ses amis photographes » où sont évoquées  les influences réciproques des créateurs d’un art à ses débuts et des peintres :
cadre, zoom, lumière, rythmes, lignes…
Peut-on dire qu’elle fera « de belles photos peintes »?
La photographie apporte à Georgia O’K un autre regard sur ses productions et avec la multiplication des portraits par Stieglitz, elle « adopte » son propre corps après avoir eu le sentiment de n’être qu’un objet. Ses nus sont magnifiques et ses mains magnifiées, bien que jamais saisies dans des moments de travail.
A l’époque des fleurs en volutes présentes dans les arts décoratifs, ses toiles aux allures d’aquarelles s’éclairent de couleurs. Le gris domine alors chez les cubistes parisiens.
Le ciel de Lake Georges ou du Nouveau Mexique, passage du réel à l’abstraction, est aussi un terrain de rencontre avec la musique.
Les fleurs sophistiquées jouent des équilibres, semblent pousser le cadre, se multiplient, des zones s’estompent, d’autres jaillissent.
La ville lumière est sombre, trépidante, elle est déserte chez O’K.
Dans sa voiture transformée en atelier elle sillonne le désert, rencontre des habitants dont les croix telles des poteaux indicateurs se superposent au dessus de leurs croyances premières.
Les arbres des Amériques sont plus hauts que les édifices construits par les hommes et toujours sources d’émerveillement.  
Comme les os détournés de leur pauvre destin devenus des viseurs de lune, des cadres insolites rompant les hiérarchies souvent présentes dans les sujets européens. A la façon des montagnards de par chez nous qui reviennent  de leurs courses avec des cailloux, elle amasse pierres et os.
Elle viendra à Chartres et en admirera les vitraux.
Elle sait bien ce qu’est la lumière, l’exposition au musée de Grenoble jusqu’à début février 2016, nous en redonne.
Les précisions qui nous ont été apportées sur les conditions de préparation d’une telle exposition ne sont pas inutiles : il a fallu quatre ans pour que celle-ci soit installée. La richesse des collections grenobloises permet des échanges avec d’autres institutions dans le monde entier comme en témoigne encore cette fois cette présentation exceptionnelle, facile à regarder et qui peut nous emmener loin. 
  

2 commentaires:

  1. Je vais peut-être me laisser tenter par cette expo, finalement...
    O'Keefe a l'air d'une sacrée maîtresse femme.

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  2. une première fois en visite guidée, une seconde pour le plaisir... Quelle femme d'exception ! Les photos sont magnifiques et apportent un plus à l'exposition. Nous sommes vraiment "chanceux" à Grenoble et des amis sont venus de loin et nous envient !

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