mercredi 30 septembre 2015

Colle di Val d’Elsa.


« Colle » comme collines ; située sur la rivière Elsa, la ville toscane de 20 000 habitants est pratique avec ses supermarchés dans la ville basse, pour nous touristes installés à proximité dans la belle campagne aux commerces rares.
Elle a préservé sa partie médiévale sur les hauteurs.
Un ascenseur mène d’une zone à l’autre et le point de vue est intéressant, les ruelles sympathiques.
Nous n’avons pas visité le musée du cristal qui atteste d’une activité de « la Bohème italienne », représentant 15% de la production mondiale de ce verre auquel est adjoint du plomb pour le rendre plus éclatant.
Si « tous les chemins mènent à Rome », Colle constitue une étape sur la via Francigena. 
Emprunté par les pèlerins venant principalement de France qui se rendaient dans la ville sainte,  le « grand itinéraire culturel du Conseil de l'Europe » connait une faveur qui peut rappeler celle autour des chemins de Saint Jacques de Compostelle.

mardi 29 septembre 2015

A boire et à manger. Guillaume Long.

Sous titré « du pain sur la planche » ; l’auteur qui tient un blog (en lien ci contre) en est sous cet intitulé engageant, à son troisième album sur le thème porteur de la cuisine qui garnit abondamment les tables des libraires.
Dans le genre, la lecture d’une américaine http://blog-de-guy.blogspot.fr/2015/03/delices-lucy-knisley.html , était régalante, cette fois c’est un natif de Genève ayant vécu longtemps à Lyon qui nous réjouit.
Un livre de recettes qui se lit de la première à la dernière des 160 pages et qui  a intrigué ma compagne quand elle m’a entendu rire tout seul : c’est pas tous les jours !
Décidément la cuisine est le lieu de la rencontre, de l’affirmation de soi, le reflet d’une époque qui avec des jeunes comme cet auteur ne donne pas que des motifs pour désespérer. L’humour, l’auto dérision sont les ingrédients, à consommer sans modération, pour le partage d’un panorama très varié qui nous déculpabilise de nos gourmandises incorrectes. Il évite des dessins trop compliqués et se rit de tous ceux qui le prennent pour un expert gastronomique.
Il nous promène d’un Burger King aux tagliatelles à la truffe et au foie gras( à réserver pour un soir de fin du monde), passant par un rappel du gratin dauphinois ou un épique gratin de cardons.   
Notre estomac et notre foie doivent être entrainés pour le suivre à Madrid et en Normandie sans oublier de trinquer, voire de se torcher grave au Calvados (ne pas dire Calva). 
Les chapitres sont organisés par saisons, mais la fantaisie, la diversité des présentations transgressent tout classement et tout parait facile, tant est efficace la présentation d’un os à moelle au four ou le poulet au vin jaune. Jean Kévin et son taboulé affronté à une Libanaise  vaut son pesant de Boulgour.
Je crois bien que je vais oser une raie au beurre noir suite à ses conseils mais je crois que je ne suis pas mûr pour une salade de mangue à l’ail, bien qu’il nous encourage à la créativité : son Parmentier de chou-fleur et son agrume semble possible.
En tous cas la lecture hilarante de cette bande dessinée est aussi nourrissante qu’un apéro au poireau ou un Crumb, pardon : crumble aux pommes présentés dans ce volume chez Gallimard (l’éditeur de J.P. Sartre) s’il vous plait.

lundi 28 septembre 2015

Youth. Paolo Sorrentino.

L’affiche est trompeuse, car la miss univers ne tient  qu’un rôle secondaire dans le film, par ailleurs bien pourvu en personnalités typées. Il s’avère qu’elle n’est pas seulement agréablement carrossée.
Les deux vieux dont la libido n’est plus un problème ont pour l’un renoncé à se produire en concert, alors que son comparse essaye de réaliser son testament filmique.
J’aurais préféré le titre en italien « La giovinezza » mais Michael Caine en compositeur de musique est « so british », son comparse Harvey Keitel et son égérie Jane Fonda tellement américains, alors va pour « Youth » qui nous prend à contrepied comme un Maradona en cure dans l’hôtel suisse où tout un beau monde en fin de course passe le temps.
Leur indolence a gagné le film qui recèle pourtant quelques scènes bien troussées, imaginatives, drôles sans lourdeur et de beaux paysages correctement peignés qui ne peuvent cependant guérir de la mort.
Le sujet est périlleux, le réalisateur de « This must be the place » http://blog-de-guy.blogspot.fr/2011/09/this-must-be-place-paolo-sorrentino.html
évite tout drame plombant avec des acteurs qui amorcent dans le confort et les belles images, une réflexion concernant la mémoire, la création, l’amitié, la vérité…
« Si la légèreté est une tentation irrésistible, elle est aussi une perversion »

dimanche 27 septembre 2015

Les particules élémentaires. Houellebecq. Gosselin.

Il faut bien quatre heures de théâtre pour apprécier ce maelström où nous sommes invités à réfléchir, nous émouvoir, sourire, depuis l’infime spirale génétique aux espaces infinis, de la taille de notre bite aux fœtus en sandwichs (secte satanique), de la multiplication des discothèques corrélée à la consommation d’anxiolytiques.
Shakespeare, Nietzche, Baudelaire :
« Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille.
Tu réclamais le Soir ; il descend ; le voici :
Une atmosphère obscure enveloppe la ville,
Aux uns portant la paix, aux autres le souci. »
La poésie est là, tout du long, amère, avec les remords d’une humanité de douceur rêvée qui fait reproche. D’une radio sort : « tout au long de la vie qui pique, On prend des beignes » de Souchon  et « Night in white satin » nous en rappelle de belles.
La transposition sur scène de notre écrivain le plus contemporain  http://blog-de-guy.blogspot.fr/2011/04/la-carte-et-le-territoire-michel.html est vraiment réussie.
Nous rions pendant cette tragédie, avec en particulier une séquence de yoga du genre « Les Bronzés ».
Michel, chercheur en biologie moléculaire se noie, son demi-frère, Bruno, professeur  obsédé par le sexe, deviendra fou. Annabelle après deux avortements ne pourra avoir d’enfant de celui qu’elle aime, à cause d’un cancer, et Christiane finira mal après une vie de recherche désespérée du plaisir.
« Cette pièce est avant tout l’histoire d’un homme, qui vécut la plus grande partie de sa vie en Europe occidentale, durant la seconde moitié du XXe siècle. Généralement seul, il fut cependant, de loin en loin, en relation avec d’autres hommes. Il vécut en des temps malheureux et troublés. […] Les sentiments d’amour, de tendresse et de fraternité humaines avaient dans une large mesure disparu ; dans leurs rapports mutuels ses contemporains faisaient le plus souvent preuve d’indifférence voire de cruauté. »
Le spectacle est musical, physique, les acteurs aux talents multiples, excellents, les procédés vidéo ne font pas procédés et leur diversité s’accorde au foisonnement qui balaie trente ans de nos vies.
 « Ils se sentiraient de plus en plus vieux et ils en auraient honte. Leur époque allait bientôt réussir cette transformation inédite : noyer le sentiment tragique de la mort dans la sensation plus générale et plus flasque du vieillissement. »
Est-ce que la liberté des années soixante a fait de nous des cannibales ?
Nos années soixante dix utopiques, se disait-on à l’entracte, se sont dissoutes dans l’acide des années 80. Années où Kerouac passait sous le Tapie, Mite’rrand tenait la balayette et nous n’avions rien vu.
«Pourtant, nous ne méprisons pas ces hommes
 Nous savons ce que nous devons à leurs rêves
 Nous savons que nous ne serions rien sans l’entrelacement de douleur et de joie qui a constitué leur histoire.»
Ce spectacle  a beau  être « dédié à l’homme », on peut en ressortir glacé, tout en étant  ravi d’avoir assisté à un grand moment de théâtre.
La compagnie s’intitule « Si vous pouviez lécher mon cœur » car le professeur du prometteur metteur en scène «  répétait souvent cette phrase extraite de Shoah, le film de Claude Lanzmann : « Si vous pouviez lécher mon cœur, vous mourriez empoisonné ».

samedi 26 septembre 2015

Un été au bord du lac. Alberto Vigevani.

En dehors de la photo de la page de garde, sépia comme il se doit, ce  récit cotonneux d’une villégiature au bord du lac de Côme m’a mis en rogne, car une fois de plus j’ai été abusé par des promesses de douceurs italiennes. Alors que je venais de m’enthousiasmer pour « Réparer les vivants » de Maylis de Kérangal, ces états d’âmes futiles d’adolescents niais, vacant, rassemblant tous les poncifs m’ont paru encore plus factices.
« Mort à Venise » sans Venise, sans fièvre, sans parfum, sans âme, sans émoi, sans style.
Bateau en maquette et Andrew petit souffreteux dont la mère est sans mari.
Giacomo est-il troublé par la belle maman ? Il gagnera une raquette.
Prenez garde à la raquette en bord de lac si vous n’êtes pas encore majeur ! 
«  - Andrew voulait vous dire au revoir, mais il n’en a pas eu le temps. Il m‘a demandé de vous donner ceci.
Elle lui tendit une Dunlop de compétition ; un jour, Giacomo l’avait prise en main et en avait admiré la légèreté. C’était un cadeau de son père qu’Andrew n’avait jamais pu utiliser. »
Et radin avec ça !

vendredi 25 septembre 2015

« Eparpillé par petits bouts façon puzzle. »

Ecrire comme un pansement quand la vue s’affole devant un monde qui se défait, alors au coin d’un blog je joue pesamment avec le mot : pensement sur jambe de bois.
Pendant que la ronde de tant d’éditorialistes me semble tourner à vide, je remonte sur mon canasson à la mine en papier mâché et mime un Franz-Olivier Giesbert, des terres froides entrelardant de citations (en gras) tirées des « Tontons flingueurs » .
« La bave du crapaud n'empêche pas la caravane de passer ! »
Désormais il est nécessaire de livrer un mode d’emploi avec le moindre dessin provenant par exemple de Riss de Charlie hebdo sous protection policière, mais c’est le rédacteur Laurent Joffrin écrivant maintenant la moitié de son journal du moment, Libération, qui tombe dans la caricature en donnant la leçon au philosophe Michel Onfray. Il récidive, puisqu‘il  ne voyait que des « ras du front » chez ceux qui critiquent Najat Bécassine.
Et dire que j’avais abandonné « Le Monde » quand ils avaient traité ainsi Ségolène qui s’applique chaque semaine à leur donner raison !
« - Qu'est ce qui a été en panne?
- La dépanneuse. »
Les débats concernant l’école s’embrouillent sous les stratégies communicationnelles :  évoquer une « dictée quotidienne »  a fait écran à la mise ne place d’« enseignements pratiques interdisciplinaires » (EPI)  au collège. Cependant l’évaluation pour les lycéens « Chatel » de tels dispositifs concernant aussi les heures d’accompagnement « personnalisé » tardent à paraitre.
La maternelle enfin revient à des objectifs plus adaptés aux petits mais à entendre les mots « exigence » et « ambition » appliqués au reste des textes, lorsque c’est vraiment le contraire qui est mis en route : c’est fusiller le vocabulaire. L’école sera ludique, soumise aux modes, aux pressions parentales et au pouvoir de petits chefs. L’autonomie amène avant tout à la concurrence.
La rhétorique de l’émancipation comme musique de fond dissimule la soumission au marché.
Les consciences professionnelles partent en miettes sous les plans de carrière.
Nous baignons dans le même discours servi depuis des décennies, pourtant le fossé social s’est élargi. Et les prescripteurs sont plutôt les petits machos des couloirs que les éditeurs de programmes.
Le niveau monte ne cessait-on de nous dire avant de crier à la catastrophe.
La démocratisation invoquée serait une arnaque si encore une personne y croyait.
C’est bien la même équipe qui entre deux Macroneries, porte les éléments de langage des boites à com’ !
Se détachant des habituelles révérences des politiques entre deux élections, les mots du ministre de l’économie concernant les fonctionnaires seraient plutôt ceux d’un chroniqueur s’exprimant face à l’éclatement du salariat. Ils ne sont pas la marque d’un courage ou d’une lucidité, ils participent de la confusion des genres et accentuent le discrédit des gouvernants.  Et depuis les tribunes médiatiques combien de leçons  sont assénées … pour mépriser les paroles professorales où  assumer quelque leçon « frontale » serait quasiment « frontiste ».
« Pour qu'il abandonne ses cactus et qu'il revienne à Paris, il faut qu'il en arrive une sévère au vieux Louis. Ou qu'il ait besoin de pognon ou qu'il soit tombé dans une béchamel infernale ! »
Si je joue à peser les mots qui bourdonnent autour de lieux que j’ai bien connus, je m’oblige à la prudence quand s’éloigne le coin de ma rue pour éviter les rabâchages et les vaines affirmations.  Je ne comprends pas la contradiction des souverainistes qui en appellent à l’Europe, qu’ils ne cessent de critiquer, pour régler les problèmes migratoires. Leurs acrobaties autour de la Grèce donnent le tournis.
A hauteur d’échantillon, certes  très restreint, je suis étonné du nombre de jeunes français partis gagner leur vie à l’étranger. Croisent-ils les migrants arrivant sur nos berges ?
Le football est décidément un miroir grossissant : les joueurs français se louent en Angleterre,  quand les africains constituent l’ossature de nombreuses équipes du championnat de France.
Rio Mavuba, capitaine de l’équipe de Lille, est né sur un bateau de réfugiés angolais.
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Le dessin en tête est de Micaël Queiroz et celui là est paru dans "Le Canard Enchaîné":


jeudi 24 septembre 2015

Beauté Congo. Fondation Cartier.

L’art africain contemporain donne des couleurs à l’art contemporain et laisse pour un instant les sombres masques traditionnels dans les cases à fétiches.
Au son des yéyés congolais, qui animent les rues de Kinshasa
« Kin la belle, kin la poubelle »
 nous faisons provision d’énergie et de sourire avec cette exposition à Paris qui dure jusqu’au 15 novembre.
Poétiques, politiques, les découvertes sont nombreuses avec des éléments familiers :
la société des Ambianceurs et des Personnes Elégantes (SAPE), une esthétique des enseignes de rue aux peintures figuratives et flashy, volubile et minutieuse.
D’amples maquettes futuristes, d’anciennes photographies documentaires ou des plus récentes aux points de vue, depuis les flaques, bien vus, varient les supports.
Nous avons reconnu « L’enfant-soldat » de Chéri Samba  qui fut présenté à Grenoble:
«Je suis pour la paix, voilà pourquoi j’aime les armes ».
L’humour n’est pas toujours noir, mais sa force qui vient fouetter nos dépressions occidentales
permet de supporter les plaies d’un pays ravagé par les maladies, une nature hostile, des politiques prédateurs, une histoire plombante.
Comme nous avions dans l’œil, les représentations de l’immuable combat de boxe Ali/Foreman de 74, nos préférences sont allées aux découvertes de travaux plus anciens, moins éclatants : des aquarelles depuis les années 20 qui multiplient les motifs décoratifs, développent des façons de voir originales, un lien entre tradition et modernité.
La lumineuse fondation Cartier qui a déjà célébré des artistes africains se situe à côté de Denfert Rochereau où des foules se pressent pour visiter les catacombes.

mercredi 23 septembre 2015

Piacenza.

Les jeux avec les mots autour de « Piacere a Piacenza » sont réservés aux dépliants touristiques qui négligent  le français, alors que les habitants rencontrés de ce côté des Alpes parlent plus facilement notre langue que nous la leur.
La ville est située dans la plaine du Pô ponctuée de grandes fermes qui évoquent le film de 1976 : « 1900 » de Bertolucci.
La nostalgie peut par ailleurs alourdir sa pelote avec d’autres réminiscences d’un communisme à l’italienne, qui fut plus engageant du temps d'Enrico depuis la Rue des Boutiques obscures à Rome siège du PCI, développant quelques bases solides dans cette région d’Emilie Romagne.
Un moment française, la ville fut  la première (Primogenita) à demander son annexion au royaume d'Italie.
Aujourd’hui peuplée de 100 000 habitants, c’est le souvenir des Farnèse qui  est mis en évidence dans cette ville étape aux airs médiévaux.
Cette famille donna un pape, des cardinaux, des religieuses, tant de militaires, de sénateurs, de gouverneurs, de ducs et seigneurs, et un vice roi d’Espagne.
Une promenade vers la Piazza Cavalli  du XIIIe siècle et ses équestres statues devant le Palazzo Gotico s’impose, ainsi qu’une visite au premier Duomo de la saison abritant de belles fresques.

mardi 22 septembre 2015

La revue dessinée. N° 9. Automne 2015.

La revue de reportages en bandes dessinées tombe toujours à pic, bien que sa parution soit trimestrielle. Certes, ils pouvaient programmer à l’avance quelques pages à propos du rugby au moment de la coupe du monde et les pages consacrées à la grotte Chauvet sont d’actualité depuis 35 000 ans, mais le dossier consacré à l’agriculture vient éclairer une actualité revendicative brulante par des réflexions au long cours :
« Qui peut penser qu’en défendant la viande en laboratoire, on va aider les animaux ? Si on s’intéressait plus à l’élevage, on saurait qu’on ne fait pas de lait sans tuer des veaux, ni d’œufs sans tuer des poules, et que l’alternative à l’industrie animale n’est pas dans le végétarisme. Il y a une idée qui s’enkyste actuellement c’est qu’on peu vivre sans les animaux, faire de la matière animale sans les animaux, vivre en ville sans les animaux. Or vivre avec les animaux au contact de la merde, de la vulnérabilité, de la maladie, c’est ce qui nous permet de rester fragiles, humains. »
Les pages consacrées au monde informatique sont toujours fournies
avec la fin de la série consacrée à l’histoire de « nos vies technologiques qui ont plus changé en 5 ans que lors des 300 précédents »
et un aperçu du « darknet » où s’échangent des bit coins et quelques herbes mais pas que…
Nous, dauphinois, seront intéressés par l’origine du mot « dauphin »
et le citoyen s’étonnera toujours de la puissance des communicants  en politique,
le curieux salivera à une évocation amusante de la vie de Pavlov
et le sentimental partagera l’enthousiasme d’Alfred qui se rappelle du film « Tandem ».
Quand hier était annoncé : « La SNCF a été condamnée lundi pour discrimination envers plusieurs centaines de Chibanis », un reportage complet nous avait renseigné sur la lutte de plusieurs années pour faire reconnaître le droit des cheminots marocains qui n’avaient pas le même statut ni la même retraite que d’autres avec qui ils trimballaient des traverses de 50 à 80 kilos sur les voies.
Pile poil.

lundi 21 septembre 2015

Le tout nouveau testament. Jaco Van Dormael.

Un Dieu vindicatif, malveillant, en robe de chambre pourrait appeler tant d’effets éculés comme ses babouches : pas du tout ! 
C’est Poelvoorde qui l’incarne.
Le film est un bouquet d’effets miraculeux pas vraiment classiques, de jeux d’acteurs qui ravissent le public. Et pas seulement Yolande Moreau en femme du créateur et Catherine Deneuve en nouvelle apôtre vouée aux grands singes. Une fois de plus, les femmes sauvent l’humanité par le truchement de la fille méconnue de Dieu : la terre va enfin tourner plus rond. La poésie, la fantaisie, la dinguerie, le plaisir, l’humour passent donc aussi par les portables et l’ordinateur suprême. Film d’époque.
Un potache qui fait reverdir

dimanche 20 septembre 2015

L’étranger. Jean Claude Gallotta.

« Les grandes œuvres se reconnaissent à ce qu’elles débordent tous les commentaires qu’elles provoquent. C’est ainsi seulement qu’elles peuvent nous combler : en laissant toujours, derrière chaque porte, une autre porte ouverte. »
Nous avons passé une heure avec trois artistes de la troupe de Gallota, qui après la mort de sa propre mère, retrouve les plateaux autour de l’œuvre d’Albert Camus.
Les rêveries du Grenoblois invitent à revenir aux mots premiers de celui qui avait choisi Oran comme décor de son livre le plus connu, où le recours à la première personne interroge encore plus notre rapport au monde.
« Pour que tout soit consommé, pour que je me sente moins seul, il me restait à souhaiter qu'il y ait beaucoup de spectateurs le jour de mon exécution et qu'ils m'accueillent avec des cris de haine. »
le galopin galopant m’emballe toujours autant.
Ses gestes habituels nous rassurent et des expirations nouvelles arrivent.
« Aujourd'hui, maman est morte. Ou peut-être hier, je ne sais pas. »
J’ai aimé la tonalité essentiellement noire de cette dernière proposition, quand une des danseuses à côté de la pâle lumière  d’un écran continue de danser, les peaux s’effleurent, les recherches de l’autre sont toujours manquées, un coup de soleil …
Une occasion de s’approprier un monument qui n’est en rien surplombant, mais véritablement impressionnant  jusque dans notre intimité la plus enfouie.

samedi 19 septembre 2015

XXI. Eté 2015.

Le thème « La France au village » tient 36 pages sur les 200 habituelles du trimestriel en vente en librairies. Elles auraient pu  gagner en  densité, même si le temps long  pris par les enquêtes, la minutie des comptes rendus ont fait le succès de la publication.
Au moment où dans les préfectures et sur les parkings des supermarchés, la paysannerie lance son chant du cygne, l’avenir est- il chez ces nouveaux paysans qui élèvent quelques moutons sur une île bretonne abandonnée ?
Et ce couple, dont l’homme est devenu une femme, a beau vivre dans la Vienne, sont-ils représentatifs des habitants des terres ignorées par nos radars affolés ?
Le « mille-feuilles » territorial est une aberration mais sa mise en évidence à l’occasion d’implantation d’éoliennes relève d’avantage de la vulnérabilité des élus que de décisions contraires à l’intérêt général quand il s’agit d’aller vers une énergie qui préserve les ressources. 
Toujours des portraits incroyables : par exemple ce médecin pakistanais lâché par les Américains, il avait pourtant permis de retrouver la piste de Ben Laden, ou ce millionnaire qui avoue trois meurtres en ayant gardé un micro cravate après un procès où sa culpabilité n’arrivait pas à être prouvée.
Utilement développé l’entretien avec Yves Agid qui fait le pont entre  psychiatrie et neurologie est passionnant alors que l’agréable BD consacrée a Istanbul est assez anodine.
Le combat d’un avocat fils de paysans équatorien contre les pétroliers de Chevron et leurs 2000 avocats est digne d’être connu, comme il est utile de revenir en Tchétchénie 15 ans après la fin du conflit, et divertissant de suivre la fabrication de films à Kampala, ou d’entrouvrir le dossier de l’électricien qui vient de ressortir 271 œuvres inédites de Picasso.
La rencontre avec un ancien officier sud africain qui commanda un bataillon de noirs en des combats douteux est instructive; le récit des derniers jours d’un homme qui a décidé de sa mort en Suisse est pudique et fort.
L’incontournable publication aime aussi aller contre les pensées toutes faites :
cette fois un reportage révèle un véritable business du viol  qui s’est  développé au Congo :
« Que celles qui ont été violées lèvent la main ! »

vendredi 18 septembre 2015

La barbarie douce. Jean Pierre Le Goff.

Alors que les mots se périment d’un jour sur l’autre, lire un essai paru en 1999 et en mesurer la pertinence ajoute à la jubilation.
Le sociologue vient de s’exprimer récemment dans un entretien à Marianne contre la nouvelle réforme des collèges inscrite dans  un « processus de déconstruction de l'école républicaine avec le développement du pédagogisme et de la psychologisation dans l'enseignement ».
Sous un titre heureux, ces 140 pages nerveuses consacrées à la modernisation aveugle des entreprises et de l’école étaient prémonitoires et leur clarté fait naître bien des remises en questions et quelques réflexions adjacentes.
La modernité n’en finit pas d’être moderne, les jeunes gens modernes des années soixante se tirent.
« La façon dont un pouvoir légitime une réforme en la présentant comme émanation d’une base consultée en toute transparence, est révélatrice d’une nouvelle façon de gouverner qui date de « l’ère du vide » des années 80. »
Les promesses sans cesse rabâchées d’une égalité des chances soulignent le mensonge et exaspèrent  les exclus d’un modèle unique ayant perdu prestige et diversité. En amont ou en aval du système scolaire, les orientations étaient également dignes. J’ai toujours la nostalgie d’instants partagés de joie, de maladresses excusées, entre paysans, étudiants, boucher ou menuisier d’une même équipe de foot.
« Des idées qui, à un moment historique donné, ont pu apparaître libératrices face à des pouvoirs et hiérarchies sclérosés, se sont trouvées en fin de compte intégrées dans une nouvelle logique. Déconnectés de l’utopie globale qui les portait,  les thèmes de l’autonomie et de la responsabilité se trouvent aujourd’hui réinvestis dans la modernisation de l’entreprise et de l’école, et donnent lieu à des pratiques de manipulation »
Il parlait de Mitterrand, citant D.R. Dufour : « Plus il proclamait les vertus du libéralisme, plus il dénonçait la folie de l’argent, plus il valorisait la chose publique et la fraternité, plus le principe de responsabilité tombait en déshérence dans son sérail même »  Toujours vrai !
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Dessin de la semaine du "Courrier International" provenant du  journal "Le Soir"

jeudi 17 septembre 2015

Les rencontres de la photographie. Arles 2015.

46° édition autour de photographies dans la commune la plus étendue de France, année de la mort de son fondateur Lucien Clergue,  avec changements de commissaire et nouveaux investisseurs : c’est « le chantier », dont les enjeux dépassent le badaud qui vient prendre l’air du temps au pays des images.
Un photographe américain, parait-il considérable, à qui est consacré une exposition sera-t-il satisfait si son nom ne s’est pas imprimé dans notre mémoire ? Il a tellement aimé s’inspirer des amateurs, fuyant le pittoresque, l’émotion, l’esthétique, gagnant par là la faveur des musées, épatant les galeries.
A quoi bon répertorier les noms de tant d’auteurs qui ont  assez peu d’émotions, ou d’idées à faire partager ?
Pourtant pour nos numériques mémoires c’est Thierry Bouët qui m’a semblé le plus chaleureux inventif et drôle en présentant des vendeurs du « Bon coin », mis en scène avec ce qu’ils proposent : une paire de botte, un cercueil, un bateau…
Et si nous n’avons plus en tête, les noms des italiens qui ont ramené des images du Congo nous n’oublierons pas leur mystère.
« Nous avions eu une expérience à New York avec d'autres photographes il y a dix ans d'une exposition sans légende, sans nom où l'individualité disparaissait pour que les différentes voix n'en fassent qu'une. C'est ce que nous avons eu envie de retrouver, Alex et moi, dans ce travail. »
Les façades d’églises de Markus Brunetti en imposent par leurs dimensions, leur précision : un travail de titan rassemblant des centaines de clichés, voire des milliers pour restituer une vérité de monuments dont la perspective est abolie.
C’est autre chose que les enseignes et les architectures de Las Vegas vues et revues même si  une série consacrée aux «  canards » : bâtiments ou véhicules aux formes des objets qu’ils ont à vendre, est gaie.
Le détour par l’abbaye de Montmajour, vaut le coup pour le lieu en lui même, mais Marcello en couleurs sur le tournage de 8 ½ de Fellini n’a rien de rare, ni Malkovitch reprenant la pose de Guévara, Einstein, Marylin, Wharholl  depuis leurs portraits iconiques.
Plus originaux sont les autoportraits de Diop posant avec des attributs de footballeurs en costumes XVIII°.  
Nous n’avons pas vu les 35 expositions proposées mais revient un portrait de groupe d’où se dégage une atmosphère particulière comme dans une salle d’attente aux patients tendus. 
Quelque carnet personnel semble intense mais difficile à aborder dans la frénésie d’une journée, alors émerge une fulgurance : une photographie très noire avec quelques taches blanches minuscules : là une danseuse. 
La confrontation d’images de propagande en Corée du Nord avec la réalité m’a parue un peu convenue et la série de poses auprès d’un ours dans l’entre deux guerres en Allemagne intéressante, alors que l’enquête sur les lieux opaques du pouvoir, les paradis fiscaux, est accablante et apporte une touche politique plus développée me semble-t-il du côté de Perpignan.
Portant les prises de vues concernant des groupes sur des lieux de commémoration : Auschwitz, Tchernobyl, le Rwanda, le Cambodge… nous interrogent en profondeur sur notre place dans l’histoire, l’actualité. Nous n’aurions pas eu l’idée d’écrire sur un mur : « J'étais là » mais nous fûmes dans certains de ces lieux.
Désormais une image réside dans nos têtes : Aylan, dont le père retourné à Kobané enterrer sa famille disait :
« Il est impossible de s’imaginer comment les gens vivent ici. »

mercredi 16 septembre 2015

Toscane.

Voir  en vrai Le parc aux tarots de Niky de Saint Phalle avait été le prétexte pour un retour 20 ans après dans les terres de Sienne. 
Le propriétaire du gîte « La Marcigliana » labélisé « agritourismo » au bout d’un chemin de terre en face du village perché de Radicondoli pour le panorama et pas loin de Colle di Val d’Elsa pour les supermarchés, nous a vraiment bien accueilli.
Tomates et basilic du jardin, fromage de ses brebis, le jeune Sarde par ailleurs chanteur, nous a donné une belle image d’une Italie dynamique et chaleureuse.
Nous avions le sentiment en revenant de nos tours à Florence, Sienne, San Giminiano, dans  le Chianti, ou dans le val d’Orcia, de la Maremme ou de Carrare, d’être au centre d’un lieu préservé du monde et de ses grossièretés, mêlant culture, cultures et piscine, en pleine jouissance de nos privilèges européens.
Les mercredis, remontant le cours de notre séjour, je vais essayer de mieux saisir ce qui  a constitué les rivalités de ces villes pourtant bien préservées. 
Je vais rechercher sans trop abuser des collages Wikipédia, ni trop forcer sur la cuistrerie ce qu’ont apporté les Etrusques, ce que furent Gibelins et Guelfes, et cette route « La via Francigena» qui traverse cette région aux collines saisissantes de beauté dont je me suis appliqué à copier les cartes postales tendant à se raréfier sous les perches à selfie.