jeudi 12 mars 2015

Niki de Saint Phalle. La revanche des nanas.

Catherine Marie Agnès Fal de Saint Phalle (1930 / 2002)  dite Niki (la victoire) vient de connaître les honneurs du Grand Palais à Paris.
Qui n’a pas croisé une de ses nanas colorée et plantureuse, dans des fontaines ou en produits dérivés ? Elles ne disent cependant pas tout de son œuvre.
Christian Loubet devant les amis du musée a évoqué son parcours :
« Ce qui la faisait vivre, l’a aussi tuée ».
Vers la fin de sa vie, les poumons rongés par les vapeurs des résines plastiques utilisées pour ses colossales sculptures, elle a publié « Mon secret » où elle raconte les agressions sexuelles que lui a fait subir son père, un banquier catholique, lors de « l’été des serpents », quand elle avait 11 ans. Deux des quatre enfants de cette famille se sont suicidés.
La belle avait fait la une de « Time », de « Elle », de « Vogue ».
Elle a quitté mari et enfants en 1956 et a commencé à peindre et sculpter à Nice où elle était traitée pour une dépression. Elle y a rencontré le groupe des nouveaux réalistes (Klein, Arman, César…) et Tinguely avec qui elle se remariera.
L’art est une thérapie : « L’agressivité qui était en moi commençait à sortir. »
Un de ses premiers tableaux : « My lover » représente Saint Sébastien au corps percé de vrais clous dont une cible a remplacé la tête.
Son « autoportrait »  en mosaïque a des airs d’une Frida Khalo sur la défensive, enserré dans des feuillages, constellé de drippings à la Pollock, traversé par une zone blanche qui ressemble à une coupure.
 « Feu à volonté » : elle tire sur des poches remplies de peinture rouge avec une carabine et invite les spectateurs à en faire autant : c’est de l’ « action painting », la performance sera renouvelée plusieurs fois
 « J’ai tiré sur : papa, tous les hommes, les petits, les grands, les importants, les gros, les hommes, mon frère, la société, l’Église, le couvent, l’école, ma famille, ma mère, tous les hommes, (…). J’ai tué la peinture.»
Elle règle aussi des comptes à la religion avec sa « Vieille bigote »,  détourne des exvotos, souille des autels mais ne renie pas une certaine spiritualité.
Ses « mariées » macabres ont le visage tellement las qu’il s’efface sous la fatigue.
Cependant la fréquentation d’une amie connaissant une grossesse heureuse, va modifier son expression d’un féminisme vigoureux. Les accouchées intimidantes vont laisser la place à des géantes aux formes rondes vantant pour certaines l’antiracisme.
Dans une exposition à Stockholm, le public pénètre « Hon (elle) », une structure de près de 30 m de long comportant un milk bar, une salle de cinéma, par «  la porte de la vie » : « La plus grande putain du monde » dit-elle.
La ville de Hanovre lui avait fait confiance, l’artiste lui lèguera 400 de ses œuvres.
Un des bâtiments du  Herrenhäuser gärten sera transformé selon ses indications après son décès : une grotte telle un kaléidoscope tapissé de miroirs et de pierres précieuses résume son travail foisonnant.
A Bâle, au musée Tinguely est installée « Gwendolyn », à Beaubourg «  La fontaine Stravinsky » et une fontaine à Château Chinon, le « Golem » à Jérusalem offre des toboggans, « Miles Davis » joue sur la promenade des Anglais ; sa notoriété est mondiale.
En Toscane à Capalbio, un chantier qui a duré 15 ans, NDSP réalise d’imposants monuments inspirés de Gaudi, du facteur Cheval, représentant 22 figures du tarot où se lit l’influence de Jodorowski :
« L’impératrice », « L’empereur », « La grande papesse », « Le diable », « L’ermite », « Le pendu » et devant « La tour brisée par un éclair » comment ne pas penser au 11septembre ?  Auparavant elle avait apprécié aussi les Watts Tower à Los Angeles qui n’étaient pas considérées par les artistes, alors qu’elle aussi se sentait une outsider parmi les autres artistes.
« Je n’ai jamais suivi d’école d’art et je suis autodidacte » : la définition d’une artiste « art brut ».

1 commentaire:

  1. Intéressant qu'elle soit autodidacte...
    Triste, pourtant, ce monde occidental qui dresse hommes contre femmes, et vice versa, tout de même...
    D'autant que les deux sexes en font les frais.
    Fini le sermon pour aujourd'hui...;-)

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