jeudi 30 octobre 2014

Frans Hals et la peinture hollandaise du siècle d’or. S.Legat.



Le cycle de conférences consacré au siècle d’or de la peinture hollandaise a débuté avec Serge Legat.
Il a rappelé aux amis du musée de Grenoble que le Rijksmuseum (« Musée d'État ») d’Amsterdam qui vient d’être à nouveau inauguré après 10 ans de travaux était  le dernier acte officiel de la reine Béatrix. Elle excusait ainsi son lointain ancêtre Guillaume III qui en 1885 déclara : « Jamais je ne mettrai le pied dans ce couvent ! » en parlant du bâtiment destiné à présenter toute la peinture hollandaise.
Le style néo gothique mêlé à celui de la renaissance ne convenait point à son protestantisme.

Etait présenté ensuite le portrait, par Adrien Thomasz Key, du père de la patrie, Guillaume d’Orange Nassau aussi appelé « Guillaume le taciturne », pour situer le contexte historique.
Après une guerre de 80 ans contre les espagnols, les Provinces Unies ont gagné leur indépendance et très vite, ont accédé à la prospérité au XVII° siècle.
Ce petit pays, qui n’a pas hésité à détruire ses digues pour empêcher les troupes de Louis XIV de l’envahir, est bâti par un peuple dont un habitant sur dix était marin. Sa flotte fut la première d’Europe, en lien avec le monde entier. La bourse d’Amsterdam est alors florissante, les banques puissantes, le négoce prospère. Pays neuf, dirigée par les classes moyennes, son art est bourgeois et non aristocratique, réaliste et non idéaliste.
Une société tolérante, pour laquelle les livres sont importants, accueille les persécutés (juifs) ; la religion  est très présente, la rigueur est de mise. Il n’y a pas de hiérarchie dans les genres artistiques comme en France royaume de la peinture d’histoire. Les sujets sont populaires, la spiritualité nait du profane.
Au pays des natures mortes somptueuses,  
http://blog-de-guy.blogspot.fr/2012/03/la-nature-morte-2-le-xvii-siecle-lage.html , quand ne subsistent que les reliefs d’un repas, cela signifie que les plaisirs de la table sont passés : la vie est brève,  fragile l’existence, Dieu est tout puissant.
Des sujets simples se reflètent dans les eaux, les paysages sous des ciels en majesté, témoignent d’une fierté des artistes vis-à-vis de leur environnement. Et quand il prend à Pieter Jansz Saenredam  l’envie de peindre des églises reconverties en temples, la sobriété est grandiose.

L’école d’Utrecht fait entrer les lumières caravagesques dans les tableaux, dans un « concert » ou avec « l’arracheur de dents ».
Quand le chien de la fidélité est endormi, la femme qui enlève un bas,"Femme à sa toilette", de Jan Steen, est de petite vertu.

« Une mère épouillant son enfant » de Pieter de Hooch est une bonne mère.
Frans Hals, premier de la trilogie qui abordera Rembrandt et Vermeer, est  essentiellement un portraitiste alors qu’aux Pays Bas s’invente un marché libre de la peinture qui n’est donc plus seulement fruit de commandes.
La légende d’un artiste violent, alcoolique, impécunieux s’éloigne dans les biographies d’aujourd’hui qui ne sont toujours pas sûres de son année de naissance à Anvers ; cependant depuis l’installation de la famille à Haarlem, où il passera sa vie, les documents suivent ses deux mariages et sa descendance nombreuse.
Dans le tableau « Catharina Hooft et sa nourrice » le maître du noir donne toute sa mesure et la virtuosité n’est pas que dans la collerette; les expressions des deux personnages sont tellement vivantes.
Les touches picturales allusives s’affirment dans leur liberté avec «Deux garçons chantant » « Le bouffon jouant du luth » ou « Le garçon jouant de la flute », « Le cavalier souriant ».
Les portraits de grands bourgeois avec Monsieur sur un tableau et Madame sur un autre respirent la force de ces flamandes de Brel, telles qu’en elles mêmes :
« Si elles dansent, c'est parce qu'elles ont cent ans
Et qu'à cent ans il est bon de montrer
Que tout va bien qu'on a toujours bon pied
Et bon houblon et bon blé dans le pré »
Les visages sont superbes seuls ou en couple et les gigantesques assemblées de groupe banquetant ou en cortège quand les individualités sont mises en valeur sont très célèbres :
« Les archers de Saint-Georges », « de Saint-Adrien,  « La Maigre Compagnie » terminée par Pieter Codde  était pour Van Gogh le plus beau tableau du monde.
Mais ce sont les portraits de caractère, du genre de « La bohémienne », de  la « Malle Babbe (La femme à la chouette) », du « Jeune garçon riant » qui feront le plus école : de Fragonard  à Courbet ou Manet.
« Peindre d’un seul coup, autant que possible, en une fois ! » Vincent Van Gogh
La matière glissante, les rehauts à peine brossés ; la technique très minutieuse se libère.
Dans les « Régentes de l’hospice des vieillards de Haarlem », la palette se réduit, et ce témoignage de vérité peint à 80 ans divise critiques et admirateurs : la tension intérieure annonce les expressionnistes.
« Ni dans Goya ni dans Gréco, il n’y a rien d’aussi magistral et d’aussi effrayant, car l’enfer même a moins de terreur pour nous » Paul Claudel n’y allait pas avec le dos du goupillon.

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