vendredi 19 septembre 2014

Dire Non. Edwy Plenel.

L’amie qui m’avait prêté le livre écrit par le directeur de Médiapart avait souligné la moitié des 175 pages, tant les paroles sont fortes rappelant en ces temps accablés quelques fondamentaux.
J’avais tardé à me plonger dans les mots de celui qui a créé le phénomène politique le plus novateur de ces dernières années, redressant la bannière d’un journalisme flapi et soumis aux airs du temps. Je craignais la rigidité de l’imprécateur dont le titre de cet essai annonçait un positionnement toujours contredisant, chicanant , négatif qui a tendance à lasser à mon âge.
Il n’en est rien, le propos chaleureux se place dans la trajectoire d’un père « breton d’outre-mer » qui fut engagé. Cette fidélité à des valeurs impressionne lorsque quelques paresseux accommodements reviennent nous déranger.
Prophétique en 83, il écrivait : « …que révèle M. Le Pen de l’état de la France, de l’ampleur de sa crise, du délitement de son corps social ? » Nous n’avons pas avancé.
Il revient sur à la triade issue de lumières : « liberté, égalité, fraternité », à laquelle s’opposent « hiérarchie, égoïsme et force », les marqueurs de ceux qui entendent déterminer et immobiliser les femmes et les hommes, les asservir sous la fatalité.
Ses références à Gramsci, Jaurès, Glissant… ne sont pas des postures, mais au service d’une pensée cohérente, où la critique des institutions de la V° république ne touchent pas à la forme mais à l’origine de toutes les dérives de tous les archaïsmes de notre vie politique.
Il cite Paul Alliès jugeant la Ve République anachronique, exotique et adémocratique.
« Anachronique, elle l’est de par les conditions de sa naissance, quand la France était encore un empire colonial et méconnaissait la communauté européenne. Elle a conservé la nécessité d’un homme fort à sa tête, reproduisant les traits du bonapartisme dans l’effondrement d’un régime d’assemblée. Et elle est aujourd’hui en complète rupture avec la société de la connaissance, de l’horizontalité des réseaux sociaux, de l’interactivité des groupes et des individus ; si bien que la figure du président devient improbable que ce soit dans son hystérisation ou sa banalisation. Exotique, elle l’est tout autant puisque la France est le seul régime en Europe à pratiquer un tel présidentialisme où «l’absence de morale, le climat de complaisance ou de complicité, de résignation est au principe de ce régime où les institutions sont confisquées par un souverain unipersonnel et sa bureaucratie» (Pierre Mendès France, 1974).
Adémocratique elle le reste tellement elle repose sur l’irresponsabilité générale, politique et pénale d’un chef de l’Etat qui gouverne sans avoir à rendre des comptes et qui contamine ainsi tous les niveaux jusqu’à la périphérie, celle des exécutifs locaux.
Son développement concernant le passé colonial de la France, ne revient pas sur l’excuse trop facile du mal développement des anciens pays asservis, mais ce qu’il induit de notre rapport au monde et il rappelle :
« Je dis souvent que notre France est d'origine étrangère... Je m'explique ! Savez-vous qu'au 31 juillet 1943, sur l'ensemble des Forces Françaises Libres - je parle donc de la deuxième guerre - on comptait 66% de soldats coloniaux, 16% de légionnaires - la plupart étrangers - et seulement 18% de Français de souche ? (selon les termes de l'époque qui font hélas retour !). »  
………….
Dans le Canard de cette semaine : « L’assemblée a voté en doute confiance » ce dessin :

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire