vendredi 7 février 2014

Pas vu venir !

Incroyable, invraisemblable !
Des milliers de personnes ont répandu l’information que des enseignants allaient enseigner la masturbation à l’école.
D’autres applaudissent un individu sur une scène qui regrette que Cohen ne soit pas passé dans une chambre à gaz.
Le bruit du débarquement de hordes du 9.3 en Charente s’interprète localement avec les délogés de la Villeneuve « en force » dans les logements nouveaux qui se construisent dans notre ville.
Impensable : c’est le mot. Nous sommes tétanisés.
Dans quel état est tombé l’école pour que de telles billevesées puissent aller au-delà du clavier de quelques allumés ordinaires ?
Quelles personnalités irrécusables pourraient défaire tous ces tissus de haine ?
Badinter à propos des manifs dominicales :
« Le plus saisissant, ce sont les cris antisémites poussés par certains manifestants. C’est la première fois depuis la fin de l’Occupation que l’on entend hurler dans les rues de Paris  « dehors les Juifs »… Ces slogans de dimanche sont mortifères et ils atteignent de plein fouet la République. Il faut rappeler chaque fois que nécessaire que la République française ne peut pas tolérer ces cris, pas plus qu’elle ne saurait laisser passer des slogans « dehors les musulmans » ou « dehors les Arabes ».
Quels médias  pourraient rallumer des lumières tricentenaires ?
Encore des leçons? Elles seraient contreproductives.  
Nous sommes dans de telles mécaniques perverses que les interdictions de Vals ont fait de la publicité à Dieudonné. Les médias ont tellement sapé tout esprit de sérieux que s’ils voulaient se ressaisir, leurs paroles s’envoleraient encore plus vite.  
Quel  journal  fait aujourd’hui référence ?
F. O. Giesbert dit lui même du  métier de journaliste :
« Il s’agit d’expliquer des choses qu’on ne comprend pas soi-même ! »
Alors que les descendants d’Adam et Eve, ou d’autres persuadés que le MOSAD est responsable du 11 septembre se multiplient sur la toile, se fortifient dans les théories complotistes ; ils surgissent devant nos yeux ébahis pas seulement les vendredis ou les dimanches aux sorties des prêches.
Ces mouvements ressemblent aux« Tea party » : « En France, comme aux Etats Unis, la périurbanisation, l’individualisation de nos vies et les transformations du capitalisme servent de paysage à un engagement militant défendant les transcendances traditionnelles. » (Romain Huret dans Libération).
Nous, femmes et hommes de raison, qui pensions en tout domaine avoir raison, toujours du bon côté celui du bien et du beau, nous restons sans voix.
« L’école ne peut prétendre éduquer mon enfant » se défendent certains alors que d’autres ont abandonné tout rôle éducatif :
« Dites lui, vous, de ne pas mettre ses baskets quand il neige ! »
Mais ces forces obscures qui débordent les partis, par leurs intimidations envers des responsables parents d’élèves montrent leur faiblesse en recommandant à leurs correspondants de n’en point parler aux instits : c’est bien qu’ils craignent le débat, la contradiction, la parole, la  lumière du jour.
Les silences, l’obscurité, les font croître.
Nous les profs, donneurs de leçons, nous avons lassé nos publics avec nos cours sur la citoyenneté, donnant la main aux politiques, agrémentant nos séquences d’images prises dans les médias. Nous savons que les mensonges les plus gros sont les plus crus et que la recherche de boucs émissaires étourdit les foules mais que ce soient les droits des femmes qui soient attaqués encore et encore, cette régression là, je ne pensais pas y assister.
Crachons notre chewing-gum interdit aux élèves, que les politiques s’appliquent la rigueur demandée aux plus modestes, et que les médias séparent information et distraction.
Gestes dérisoires en regard d’un ressaisissement moral que nous ne savons par quel bout prendre.  Un mirage de plus, si la désespérance sociale alimentée dans tant de chômage et d’inégalités continue à prendre ses aises au bras d’une ignorance tellement arrogante quand l’école à qui on a coupé les couilles et le souffle se laisse traiter plus bas que terre.
………..
Dans le blog complice « Autre monde »  http://ednat.canalblog.com/ un article de bon sens concernant l’ ABCD de l’égalité, ce programme -on dit kit- pour réfléchir à l’égalité garçon /fille.
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Les dessins de cette semaine sont pris dans le Canard enchaîné.

7 commentaires:

  1. Je ne suis pas sûre qu'il faille se féliciter d'être du côté de la raison, dans ces débats, seulement à partir de l'idée qu'on peut discuter calmement, en étant... "raisonnable". S'imaginer qu'on a la raison de son côté tend à rejeter l'autre dans la place de la déraison, non ? Est-ce souhaitable pour la collectivité ?
    Le 17ème siècle fut celui où la raison fut citée à chaque phrase, mais comme par hasard, l'appel constant, la publicité, en faveur de la raison fait naître... la déraison, et bon nombre de personnes ont été brûlées pour leur convictions qui n'étaient pas "raisonnables", et pas par l'Eglise, non plus. Nous devrions savoir maintenant qu'avoir "raison" est une très grande passion..
    Je ne crois pas non plus que... l'hystérie collective qui commence à émerger (mais comment avons-nous pu croire que nous viendrions à bout de l'hystérie collective ??...) favorise quoi que ce soit de "traditionnel" ou plutôt organisé, et institutionnel. Cette croyance fait partie des fantômes qui hantent la République.
    Par contre, je crois qu'un certain nombre de citoyens ont perçu que le fait de toucher au contenu de l'enseignement dans un pays où l'Education Nationale est le bras droit de la République était plus significatif qu'on ne le croyait, ou le disait.
    Certaines personnes ont perçu la directive... du haut en bas ? pour imposer un contenu sans consultation des parents comme une manière de promouvoir un projet de SOCIETE qu'ils ne partagent pas. Dans un pays soi-disant libre, où les citoyens, par le passé ont exprimé leur rejet d'une autorité centralisée, ils ont bel et bien le droit de ne pas être d'accord, non ? sans qu'on crie immédiatement qu'ils sont des arriérés, ce qui, tu en conviendras, a déjà tendance à faire chauffer les températures de manière vertigineuse ?
    Je vois une très grande naïveté chez des personnes, souvent de gauche, qui s'imaginent que les idées sont du pipi de chat, et ne portent pas à conséquence. Tendance massive à minimiser la portée des réformes qui, paradoxalement, discrédite l'autorité de la gauche. Curieux, non ?
    Je me plais à essayer d'imaginer ce que Voltaire aurait pensé de notre société... allons savoir de quel côté il se rangerait dans ce.. pugilat ?

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  2. J'insiste sur ce mot "raison" parce que sur ce coup, il me semble inopérant, il aveugle le gauche dont je suis, et m'agace avec sa certitude d'être toujours dans le bon camp.

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  3. Dites donc tous les deux, ça vole haut le débat, là.
    L'école est tombée par terre, c'est la faute à Voltaire?
    On a tous le bec dans l'eau, c'est la faute à Rousseau?
    Facile plagiat ...
    J'aime bien le ..."à qui on a coupé les couilles"... en parlant de l'école.
    Guy, surveille ton langage. Ton blog ne nous a pas habitués à de tels propos.
    Mais comme tu as raison!
    Tiens? Raison, raisonnable...
    Là, franchement, faut pas "enfiler" les mouches sur ce terme. Oui, il est vraiment "déraisonnable" (non, criminel!) de vouloir cantonner la femme dans un rôle quasi moyenâgeux. Car l'enjeu est bien là et l'on s'aperçoit que le "débat" se tient partout sur la planète.
    Qui a peur des femmes et pourquoi?
    Vaste projet traditionaliste et réactionnaire.
    Mais comment lutter contre l'individualisation de l'information (ou plutôt de la désinformation en l’occurrence)?
    Il y a un sacré nonosse là.
    Et à part reprendre la rue comme en 34, je ne vois plus ce qu'on peut faire d'autre.
    Compte tenu du fait, surtout, que les politiques que nous (enfin moi mais par défaut) avons portés au pouvoir ont trahi.
    L'école est explosée sous les coups de boutoir répétés des réformes enchaînées à un rythme hystérique. Celle des rythmes venant parachever le brouillage des repères et de son unité.
    De qui l'école est-elle le nom aujourd'hui?
    Balaise celui ou celle qui peut le dire!
    Sûrement plus de la République.
    Il va nous falloir des vitamines brave gens!
    Mais l'âge avançant ...

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    1. Une suggestion de lecture, Eric, si tu repasses par ici, des fois : De Régine Pernoud, "Pour en finir avec le Moyen Age". C'est très court, et cela ponctionne beaucoup de nos idées reçues sur le Moyen Age (y compris les femmes au moyen âge...). En regardant beaucoup plus loin, ça permet de comprendre pourquoi une... révolution n'est pas un événement qui peut être mis au passé, car elle est encore en train. Et oui... la République est toujours en train d'adVENIR, au fur et à mesure que les idées à partir desquelles la révolution a vu le jour continuent PROGRESSIVEMENT... à se déployer dans nos vies quotidiennes, en s'appuyant contre... encore et toujours, l'Ancien. Le.. vieux... monde ?, si tu veux...
      C'est peut-être cela qui a tant plombé Stefan Zweig à la fin, surtout à partir du moment où il a pu sentir les prémices du "se sentir vieillir" ? Comme je le comprend. Que le battage publicitaire écervelé pour vendre du nouveau peut devenir lassant, à la longue...

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  4. Ton texte exprime une colère salutaire contre la bêtise ambiante (il n'y a guère d'autres mots. mais si j'ose m'immiscer dans votre conversation, je me permettrai de dire que rien ne serait pire que s'en prendre à la raison, que ce serait là à coup sûr précipiter le chaos au lieu de le prévenir. Certes, il n'est pas bon de croire que "l'on a la raison de son côté": il faut des arguments pour cela. Il faut le prouver. Mais rechercher des arguments rationnels, cela n'est pas vouloir rejeter les autres dans la déraison! ou alors, si on croit ça, il vaut mieux rester couché...! D'autant qu'avant de s'en prendre à la raison, il y a beaucoup de choses que l'on peut examiner. Les raisons de la faillite de l'école ne sont certainement pas à trouver dans le fait qu'elle chercherait à promouvoir la raison... mais plutôt peut-être dans ses insuffisances de ce côté là.
    L'école comme institution semble dépassée aujourd'hui... enfin, surtout l'école française... car il y a des pays où elle ne se porte pas si mal.

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  5. Je crois simplement que nous avons eu, et avons toujours ? trop de foi dans les pouvoirs magiques de la raison, et surtout que nous persistons à croire que plus d'une BONNE chose est toujours meilleur. Merci, Guy, j'ai bien senti que tu étais circonspect dans le poids que tu donnais au mot, mais j'ai foncé quand même... tu vois, je ne suis pas toujours... raisonnable ? ;-)

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    1. la raison n'a pas de pouvoirs magiques, ce serait une contradiction dans les termes.

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