samedi 28 décembre 2013

Freedom. Jonathan Franzen.


le début de cette histoire familiale de 700 pages m’a paru déplaisant tant l’auteur semble mépriser ses personnages, et en avançant j’ai été pris par la finesse des approches alliée à une franchise revigorante, directe.
Dans sa jeunesse, Madame Bovary aurait joué au basket avec ce romancier américain dont l’efficacité cerne les personnages au plus près par un dispositif qui multiplie les plans tout en restant limpide. Fin et attentif. Dense et plaisant à lire, allant loin dans la psychologie des personnages sans les enfermer, les inscrivant dans le siècle, en étant de tous les temps.
« La forêt septentrionale de feuillus, au sud de Charleston, était maintenant d’une seule teinte, à la veille de l’équinoxe, comme une austère tapisserie de gris et de noirs. Dans une semaine ou deux, l’air chaud du sud arriverait pour verdir ces bois, et un mois plus tard les oiseaux chanteurs assez robustes pour migrer des tropiques les empliraient de leurs chants, mais le gris de l’hiver semblait à Walter être le véritable état d’origine de la forêt septentrionale. L’été n’étant qu’une grâce accidentelle  annuelle»
Tout est précaire dans l’Amérique de Bush et les destins incertains de chaque personnage s’exposent dans une histoire qui nous concerne tous: les tentatives pour faire coïncider nos idées et nos actes, nos contradictions, nos faiblesses, nos aveuglements, nos bonheurs furtifs…
Quelle liberté ?
«  Si tu n’as pas d’argent, tu t’accroches à tes libertés avec encore plus de rage. Même si fumer te tue, même si tu n’as pas les moyens de nourrir tes gosses, même si tes gosses se font descendre par des malades armés de fusils d’assaut. Tu peux être pauvre mais la seule chose que personne ne peut te prendre, c’est la liberté de foutre ta vie en l’air comme tu veux. »
Les Berglund ne sont pas des héros, quoique démocrates.  
« Les Berglund étaient ce genre de progressistes qui se sentaient excessivement coupables et qui avaient besoin de pardonner à tout le monde pour que leur bonne fortune personnelle puisse leur être pardonnée ; des gens qui n'avaient pas le courage d'assumer leurs privilèges »
Dans un entretien au nouvel Obs,  l’auteur dit :
 « L'écriture est désormais la hache qui brise le vernis totalement artificiel de notre monde où le relationnel est subordonné à la technologie. L'écriture permet de reprendre contact avec l'humanité qui existe sous cette surface policée. »
Mission accomplie

1 commentaire:

  1. Oui, et avec la liberté de foutre ta vie en l'air comme tu veux... il y a aussi la liberté de dépenser de l'argent à crédit que tu n'as pas, non plus.
    Il faudrait plus de 700 pages pour documenter comment on a privé les pauvres de leur dignité la plus élémentaire... avec les meilleures intentions du monde.
    Tristounet, comme la civilisation elle-même.
    Moi, je suis plongée dans "Mon Amérique" de Jim Fergus.
    Aux antipodes de la gueule de bois occidental.
    Il y a des fois où il faut un courage monstrueux pour... fuir.

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