mardi 31 décembre 2013

The beats. Pekar. Piskor. Buhle.



Une histoire de la beat generation aux Etats Unis.
Les dessins de Piskor, très ligne claire, sont un peu raides pour transcrire la folie de l’époque qui est mieux traduite par d’autres dessinateurs qui ont collaboré à cette anthologie graphique.  Dans la dernière partie du livre, ils se sont attachés à décrire la biographie de personnages moins fameux que Kerouac, Burroughs, Ginsberg dont on apprend qu’ils ne furent pas toujours glorieux. La femme de Burroughs meurt d’une balle dans la tête, son Guillaume Tell a été maladroit.
Les œuvres respectives de ces géants de la littérature au mitan du siècle d’avant : « Sur la route », « Howl », « Le festin nu »  développent les thèmes des grands espaces, où la description de voyages par les drogues, l’alcool, le sexe, firent scandale et succès dans une Amérique coincée.
Il est des épisodes intenses comme l’histoire de cette toile de Jay Defoe « the rose » qu’elle a mis 8 ans à peindre et sous ces 30 cm d’épaisseur pesait une tonne, il a fallu découper un mur pour la déménager.
Mais les 200 pages ne rendent pas toujours compte de l’effervescence de l’époque.
Pourtant il est frappant de voir l’importance de la poésie dans les années 50 et l’influence de la culture « Hobo », les chemineaux des trains de marchandise, sur les beats et beatniks dont les recherches spirituelles et formelles les menèrent souvent vers le pacifisme, le surréalisme, et pour quelques femmes vers le féminisme.

lundi 30 décembre 2013

Le géant égoïste. Clio Barnard.


« Un Ken Loach sans l’humour » m’a dit une amie qui m’avait précédé au cinéma : pas mieux.
L’amitié est-elle un luxe ?
En tous cas elle est chaotique entre deux jeunes exclus de l’école amenés à récupérer des métaux dans des quartiers à l’abandon du Nord de l’Angleterre.
Des chevaux pâturent sous la lune et courent sur la route.
Qu’il est dur cet enfant hyper actif échappant à toute patience pédagogique qu’il faut tirer de dessous le lit ! C’est sa sauvegarde.
Il ne peut se cacher dans un trou de souris d’une enfance encore si proche, comme il en existe dans les livres qu’il n’a pas lus.
Ce film fort décrit la misère sans détour et aussi la vitalité de certains, l’amour des mères. La tendresse aux ongles noirs y est furtive, cependant les tours de la centrale électrique peuvent paraître belles.
La réaliste réalisatrice est subtile, pénétrante et juste, les acteurs vrais et émouvants.
Même s’il faut aller chercher loin la signification du titre tiré d’un conte d’Oscar Wilde qui éclaire d’une belle lumière cet impitoyable récit contemporain.
Un géant a chassé les enfants qui jouaient dans son jardin, alors l’hiver s’y est installé…

dimanche 29 décembre 2013

Le crocodile trompeur. Samuel Achache Jeanne Candel.



Il parait qu’il ne subsiste qu’un tiers du long livret de « Didon et Enée » de Purcell écrit en 1689 dans ces deux heures de spectacle, le reste étant de la farce (« Le Didon de la farce » n’est pas de moi), sauce Monty Pithon, en tous cas humour anglais, réservé plutôt aux « happy few ».
Je suis de ce public qui essaye d’accéder à des domaines qui ne me sont pas familiers : « opéra- champagne-caviar » quand sur le plateau, les voix disent, dit-on, les passions.
L’opéra est un genre qui ne se laisse pas aborder facilement, mais j’étais content après l’avalanche de propositions loufoques, que les chanteuses mêlées avec bonheur aux musiciens puissent montrer tout leur savoir.
Les dieux contrarient  l’amour de la reine Didon envers Enée qui la quitte, elle en meurt de chagrin.
Devant la faveur critique qui présentait ce mix théâtre/opéra, je m’attendais à apprécier pleinement un spectacle « déjanté » bien que le qualificatif devienne un passage désormais banal dans un monde de « péteur de câbles » et de « grimpeur de tours ».
La mode est au collage si possible hétéroclite. Pourtant si je reconnais volontiers auprès de mes amis qui ont apprécié en majorité cette soirée à la MC2, des séquences sympathiques, des digressions curieuses, l’ensemble baroque m’a paru de bric et de broc destiné à devenir « gravataire », c’est que nous sommes dans les débris.
J’ai aimé quand Enée traine Didon sur un tapis rouge et inversement, quand la reine amplifie les battements de son cœur et que la musique se déchaine, quand elle s’installe à la batterie.
Mais l’esthétique des ruines me lasse quand  m’assaillent des images de Sarajevo ou de Haïti, de préférence à Carthage contrée si proche des dieux dans ces temps où Cupidon fréquentait les demi-dieux et les demi-sels. Un emblématique skieur fournit une prestation spectaculaire et originale mais je n’en ai pas perçu l’utilité dans cette œuvre dont j’ai eu l’impression d’avoir attendu trop longtemps qu’elle démarre enfin.

samedi 28 décembre 2013

Freedom. Jonathan Franzen.


le début de cette histoire familiale de 700 pages m’a paru déplaisant tant l’auteur semble mépriser ses personnages, et en avançant j’ai été pris par la finesse des approches alliée à une franchise revigorante, directe.
Dans sa jeunesse, Madame Bovary aurait joué au basket avec ce romancier américain dont l’efficacité cerne les personnages au plus près par un dispositif qui multiplie les plans tout en restant limpide. Fin et attentif. Dense et plaisant à lire, allant loin dans la psychologie des personnages sans les enfermer, les inscrivant dans le siècle, en étant de tous les temps.
« La forêt septentrionale de feuillus, au sud de Charleston, était maintenant d’une seule teinte, à la veille de l’équinoxe, comme une austère tapisserie de gris et de noirs. Dans une semaine ou deux, l’air chaud du sud arriverait pour verdir ces bois, et un mois plus tard les oiseaux chanteurs assez robustes pour migrer des tropiques les empliraient de leurs chants, mais le gris de l’hiver semblait à Walter être le véritable état d’origine de la forêt septentrionale. L’été n’étant qu’une grâce accidentelle  annuelle»
Tout est précaire dans l’Amérique de Bush et les destins incertains de chaque personnage s’exposent dans une histoire qui nous concerne tous: les tentatives pour faire coïncider nos idées et nos actes, nos contradictions, nos faiblesses, nos aveuglements, nos bonheurs furtifs…
Quelle liberté ?
«  Si tu n’as pas d’argent, tu t’accroches à tes libertés avec encore plus de rage. Même si fumer te tue, même si tu n’as pas les moyens de nourrir tes gosses, même si tes gosses se font descendre par des malades armés de fusils d’assaut. Tu peux être pauvre mais la seule chose que personne ne peut te prendre, c’est la liberté de foutre ta vie en l’air comme tu veux. »
Les Berglund ne sont pas des héros, quoique démocrates.  
« Les Berglund étaient ce genre de progressistes qui se sentaient excessivement coupables et qui avaient besoin de pardonner à tout le monde pour que leur bonne fortune personnelle puisse leur être pardonnée ; des gens qui n'avaient pas le courage d'assumer leurs privilèges »
Dans un entretien au nouvel Obs,  l’auteur dit :
 « L'écriture est désormais la hache qui brise le vernis totalement artificiel de notre monde où le relationnel est subordonné à la technologie. L'écriture permet de reprendre contact avec l'humanité qui existe sous cette surface policée. »
Mission accomplie

vendredi 27 décembre 2013

Le fascisme. Historiographie et enjeux mémoriels. Olivier Forlin.



La banalisation du terme « fascisme », les références aux années 30, qui se multiplient en ce moment, m’ont  entrainé à la librairie du Square pour écouter le maître de conférences à l'Université Pierre Mendès France à Grenoble qui présentait son livre dont le sous-titre est essentiel.
Il s’agit d’une histoire des interprétations par les politiques, les intellectuels, qui alimentent nos mémoires sélectives ou envahissantes, pour un phénomène né après la première guerre mondiale.
L’auteur distingue trois périodes.
- De 1919 à 45, où la lecture politique domine,
- puis jusqu’aux années 60 quand les historiens déterminés encore par une grille politique entrent en jeu. Mussolini est présenté à la tête d’une clique parvenue au pouvoir par la violence et la propagande. La population italienne est disculpée.
« Rome ville ouverte » le film de Rossellini peut être cité comme illustration de cette vision.
- Les historiens s’imposent désormais, l’anamnèse est en route, qui reconstitue l’histoire d’un sujet malade.
Bertolucci en  témoigne dans « 1900 », de même que Scola réalisant « Une journée particulière ».
Les phrases remontant des bavardages de nos contemporains Bertrand ou Estrosi, osant  des références lourdes au totalitarisme au moment où Woerth faisait dans les affaires et que des journalistes faisaient leur travail, paraissent dérisoires, mais l’autre : Berlusconi, n’est pas rigolo quand il a dit que « Mussolini n’a tué personne ».
Le nazisme et le fascisme furent des phénomènes internationaux articulant un parti légal à des groupes paramilitaires, vouant un culte aux chefs ; « l’homme nouveau » en Italie est tourné vers le futur alors que la pureté raciale s’inspirait du passé chez les Allemands.
Il fut question dans les discussions qui ont suivi l’exposé qui mettait en appétit, de Sternhell  qui fait remonter les racines du fascisme au XIX° siècle, en France, au moment du boulangisme et de l’anti parlementarisme avec cette « troisième voie » de toujours rejetant marxisme et libéralisme.
Le contexte a changé, le label infamant ne rend pas compte de toute la réalité de l’extrême droite qui par contre est vraiment l’extrême droite : celle du repli sur l’hexagone, polarisée par l’étranger bouc émissaire, populiste, essayant de gommer les traits d’une « Aube dorée », mais  dans le panier bien des fruits portent des taches brunes. 
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Dans Le Canard de cette semaine:

jeudi 26 décembre 2013

Frida Kahlo : Narcisse blessé.



Bien des auditeurs de la conférence de Christian Loubet aux amis du musée avaient en tête des images du beau film avec Salma Hayek dont il a été dit le plus grand bien, mais comme tous les films concernant les peintres, celui-ci ne pouvait présenter beaucoup de peintures pour des questions de droits.
Il fut beaucoup question de peinture, elle se revendique d’une culture populaire indigène et d’un engagement politique révolutionnaire total, mais impossible d’échapper à la biographie : 150 autoportraits qu’elle a réalisés attestent du lien évident entre son œuvre intense et sa vie de douleurs.
La peinture comme thérapie, comme résilience : depuis l’arbre généalogique où son père photographe juif allemand anti fasciste figure à côté de sa mère sur fond de paysage mexicain jusqu’au tableau total « Le marxisme redonnera la santé à la malade » avec Karl qui étrangle Sam et elle qui jette ses béquilles.
La petite polio voulait devenir médecin, mais après un accident d’autobus, elle a commencé à peindre, allongée sur son lit où un miroir est au ciel. Elle ne voudra pas être couchée dans son cercueil, en 1954, au bout de 47 ans de vie ; son dernier mot fut « Viva la vida ».
L’abdomen traversé par une barre de fer, le bassin brisé, elle a subi 15 opérations et 3 avortements.

Mariée à Diégo Rivera de 21 ans son ainé, séparée puis remariée, il fut l’homme inconstant de sa vie, même si elle entretint des relations amoureuses avec des femmes ou Léon Trotsky :
« On m’a amputé la jambe il y a six mois qui me paraissent une torture séculaire et quelques fois, j’ai presque perdu la tête. J’ai toujours envie de me suicider. Seul Diego m’en empêche, car je m’imagine que je pourrais lui manquer»
Sa peinture naïve, simple, d’un réalisme souvent brutal, projette un onirisme qui aurait pu convenir aux surréalistes. Elle, dont Breton qui l’a accueillie à Paris disait :
«  C’est une bombe avec un ruban autour »
a méprisé les parisiens Picasso ou Kandinsky qu’elle a rencontrés :
« J'aimerais mieux m'asseoir par terre dans le marché de Toluca pour vendre des tortillas que d'avoir quoi que ce soit à voir avec ces connards artistiques de Paris »
Elle ne fut pas fascinée non plus par l’Amérique du Nord où Diégo rayonnait.  De cette période elle avait laissé seulement « Ma robe suspendue là bas ». Un  drapeau mexicain à la main dans « Autoportrait à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis » elle a choisi entre le monde où règne le machinisme et celui de la régénération, de la fécondité tropicale.
Les couleurs vives peuvent convenir aux rêves et depuis le pays où les squelettes sourient, quand un oiseau tient dans son bec un ruban, c’est au dessus  d’une scène de crime dont le meurtrier a dit que les coups mortels qui ensanglantent même le cadre n’étaient  que « quelques petites piqûres ». Diégo à ce moment là commençait une relation amoureuse, cette fois, avec sa  belle sœur Christina.
Au dessus de ses sourcils en ailes d’oiseaux, Diégo est parfois représenté, lui qui possède le troisième œil, celui du génie. Ses tableaux sont souvent foisonnants de références exhaustives alors que la solitude éclate dans tant d’auto portraits à la troublante beauté.
Même sous les couronnes de fleurs un regard  grave persiste.

mercredi 25 décembre 2013

Ethiopie J 14. Konsos & Boranas



Un haut parleur diffuse un prêche orthodoxe vigoureux à 5h du matin, nous laissant juste le temps de nous rendormir au moment de nous lever. Il fait frais ce matin pour prendre le petit déjeuner en extérieur. A côté trois hommes se découpent des bouts de viande crue accompagnés de galette au tef et de légumes. Nous nous contentons de la confiture, du miel et de la margarine à répandre sur le pain.
Nous prenons avec nous le guide local et roulons vers un village Konso nommé Gamolé. Situé en haut d’une colline, il est complètement différent de tous ceux que nous avons visités.
L’habitat est dense, resserré et se répartit en quatre enceintes en pierre qui s’édifient  au fur et à mesure de l’expansion du village. Nous pensons aux habitats dogons.
Ici pas de birrs pour les photos, on demande la permission.

Nous passons à côté de la case réservée aux ados à partir de 12 ans. Ils surveillent le village et donnent l’alerte, accompagnent les personnes malades à la ville, ils jouent les « pompiers du village ».   
Ils y restent jusqu’à leur mariage à 18 ans et doivent s’abstenir de toute relation sexuelle. Le futur époux doit soulever "la pierre de mariage" de 60 kg et la jeter au dessus de la tête vers l’arrière. Une autre pierre, celle "de vérité", sert aux anciens pour arbitrer les conflits. Quand un habitant commet un acte délictueux (vol, adultère), il jure sur la pierre mais si une personne de son entourage tombe malade, ceci est interprété comme un parjure et le coupable est banni.
Dans une aire commune, tous les 18 ans on rajoute un « mat de génération ». Il y en a 41 dans la première enceinte, ce qui permet de dater la première enceinte à près de 800 ans.
Les morts sont enterrés dans la concession du chef de clan au nombre de 9. En commémoration on plante pour chacun une statue de bois totémique.
Le chef de clan a droit à la momification : on extirpe les entrailles, les yeux et on traite le corps à l’aide de beurre de miel et d’herbes. Au bout de 9 ans, 9 mois et 9 jours, une cérémonie d’enterrement a lieu.
Nous changeons de région : nous nous dirigeons sur les territoires boranas, d’obédience plutôt musulmane. Le vêtement avec voile coloré et à motif dont les femmes se couvrent en témoigne. Nous passons les barrières montagneuses qui imposent la sécheresse aux Boranas. En altitude la végétation se transforme, les acacias disparaissent au profit d’une forêt plus tropicale. Nous subissons une nouvelle crevaison avant la piste rénovée récemment en s’approchant de Yabelo. Premier arrêt à  l’hôtel Awwü (awi) avec bordures de fleurs : le luxe après Konso, avec de vastes chambres claires et des salles de bain, pour l’instant sans eau.
Girmay nous a programmé une cérémonie du café dans un village borana ; les chauffeurs sont partis en avant-garde, la coutume veut que les invités soient les bienvenus mais apportent tout le nécessaire à la confection du café : grains de café, beurre et eau.
Le village se situe dans la direction du Kenya, il faut emprunter un petit chemin de terre. Girmay a apporté des photos prises lors de son dernier passage mais les personnes concernées ne sont pas là aujourd’hui. Les femmes s’enveloppent dans des tissus colorés un peu comme les indiennes. Nous pénétrons dans la case sombre envahie de mouches et prenons place sur des tabourets autour des braises centrales. Peu à peu la case se remplit tandis qu’une jeune fille s’active autour d’une petite poêle. Elle y mélange des grains de café non décortiqués à du beurre qu’elle remue régulièrement. Une fois grillé, elle verse le contenu dans un sirop puis remet sur le feu. Le plat est ensuite béni par le plus ancien de l’assemblée, les grains distribués à chacun, accompagnés d’une cuillère de sirop. Nous croquons les grains parfumés avant de cracher les résidus : nouvelle façon de consommer le café.
La tentative d’un retour à pied a vite avorté. Girmay arrête la voiture quelques mètres plus loin,  en vraie mère poule qui se soucie de la tombée de la nuit, il a peur qu’on  nous arrache un appareil photo.  On s’entasse tous dans un seul 4X4 pour rentrer à l’hôtel.

mardi 24 décembre 2013

Bourrasques et accalmies. Sempé.


J’ai ouvert mon Sempé de l’année avant Noël : j’en ai dégusté 120  planches réparties en trois jours. Bien que pour la première fois, je n’ai pas apprécié un de ses dessins : une parade intitulée « Ordinary people pride » qui ne prend pas en compte la souffrance de ceux qui ne demandent qu’à être considérés comme des gens ordinaires et qui avaient besoin d’apparaître d’une façon spectaculaire et festive.
Les 119 autres dessins sont toujours poétiques  et je m’étonne d’être surpris encore par l’auteur que je connais le mieux et que je mets au plus haut.
Toujours les grands rêves, mais dans cette livraison le ton est moins au bonheur sans nuage ;
des reniements, des mesquineries s’immiscent dans le récit.
Les artistes, les décideurs, les ménagères sont de grands enfants. La tendresse côtoie la solitude, les bavardages dans le vide ne s’arrangent pas avec les portables, que se soit dans les cafés, les squares, depuis un immeuble de bureaux, dans les églises ou sur les quais de gare. 
Le choc des mots nouveaux :
« Voulez-vous devenir mon coach ? » demande un monsieur à son voisin de table qui en reste la fourchette suspendue sur la nappe à carreaux.
Mais ce que j’aime par-dessus tout sont les dessins où jadis était précisé « sans paroles » : quand une dame rentre chez son psy d’un air décidé où celle en manteau rouge sur la couverture qui marche dans les feuilles mortes d’un automne flamboyant.
...
Pour mieux voir le dessin, cliquez sur l'image

lundi 23 décembre 2013

Rêves d’Or. Diego Quemada-Diez.



Depuis le Guatemala, à travers le Mexique, trois adolescents dont une fille habillée en garçon et un Indien vont vers le Nord, la Californie. Principalement à bord de trains, véhicules inéluctables de la tragédie de la pauvreté traversant des paysages magnifiques, ils rencontrent policiers et maffieux. Et il y a du monde sur le toit des wagons de marchandises ! Le récit est simple et les relations nouées entre les personnages ne font pas oublier la forte tonalité documentaire de cette sempiternelle quête d’un avenir meilleur malgré des barrières qui s’élèvent de plus en plus haut. Les oiseaux noirs tournent au dessus de la décharge, des chiens efflanqués accompagnent cette tragédie qui malgré la grâce de la jeunesse, son insouciance parfois, va  jusqu’à son terme, implacable.

dimanche 22 décembre 2013

Cendrillon. Maguy Marin.



Je connaissais le conte de Perrault mais ignorais que la pauvrette au balai appartenait à un classique de la danse dont la version de 1985 de Maguy Marin fut jugée révolutionnaire.
S’il n’y a rien qui vieillisse plus vite que la modernité, je n’ai pas décelé de poussière dans la représentation qui vient d’être donnée à la MC2 après 450 autres dans le monde entier, par une chorégraphe dont je ne suis pourtant pas un inconditionnel.
Une fois familiarisé avec les masques que portent tous les danseurs, j’ai apprécié la richesse de la mise en scène sur plusieurs étages et son ampleur.
Les personnages qui évoluent dans une maison de poupée s’animent : depuis un récit venu des greniers de la prime enfance, les corps enraidis incarnent la comédie humaine.
Je me suis étonné dans cette période de Noël que des playmobils soient requis pour la Crèche mais ils peuvent-pourquoi pas-raconter la naissance d’une espérance, même si on préfére quelques santons aux manteaux soulevés par le vent
Le récit poétique et inventif, mêlant candeur et mélancolie, peut convenir aux enfants et aux grands. L’apprentissage de Cendrillon est bien mené avec une épreuve de saut à la corde intense, et si comme dans les cathédrales, les diables sont plus divertissants que les anges, aucune mièvrerie n’envahit le plateau. La musique de Prokofiev aux allures de celle de Chostakovitch, m’a-t-on dit, avait des élans communicatifs.
Je suis revenu au texte qui comporte une moralité :
« La bonne grâce est le vrai don des Fées ;
Sans elle on ne peut rien, avec elle, on peut tout.
C’est sans doute un grand avantage,
D'avoir de l'esprit, du courage,
De la naissance, du bon sens,
Et d'autres semblables talents,
Qu'on reçoit du ciel en partage ;
Mais vous aurez beau les avoir.
Pour votre avancement ce seront choses vaines,
Si vous n'avez, pour les faire valoir.
Ou des parrains ou des marraines. »
Un réseau.

samedi 21 décembre 2013

7 milliards d’autres. Yann Arthus Bertrand.



Le photographe rendu célèbre par sa « terre vue du ciel » est descendu de son hélicoptère et avec d’autres a interviewé 6000 personnes dans chaque continent de notre fragile planète. Un livre fait partie du projet sous l’égide de Goodplanet qui a organisé des expositions et tout un dispositif vidéo sur Internet.
Je pensais que ce volume de plus de 300 pages qui m’a été offert serait certes plaisant mais superficiel, je l’ai trouvé utile et les mosaïques de portraits divers donnent à penser. Quand un individu est interrogé, en face de ses réponses sa présence est forte saisi frontalement dans la diversité de ses expressions.
Le procédé peut sembler banal, lorsqu’il est multiplié, il révèle une vérité humaine qui guérit de bien des cynismes, de toutes les mauvaises fois, et pourrait ébranler quelques positions de racistes de toutes couleurs, quelques paroles définitives d’intolérants de toutes obédiences.
Si le livre se clôt par le témoignage d’un certain Pierre que des foules connaissent sous le nom de Rabhi, ses paroles de sagesse sont au même niveau que celles de Kole l’Ethiopien, Anna la Russe, Floris Bela Maria la Brésilienne ou Surya l’Afghane… Chacun répond à des questions touchant au sens de la vie, à leur idée du bonheur, à la place des femmes, leurs colères, leurs rêves… Et lorsqu’une Irlandaise dit que dans son pays « il y a plus de terrains de golf que de terrains de jeux pour les enfants », je partage son indignation et j’essaye de suivre le conseil de Gianmaria qui demande de ne pas se prendre au sérieux, il vit en Italie.
Tous ne sont pas béatement souriants, certains ont des blessures venant des avions d’une enfance au Japon ou très immédiatement au Rwanda où Béatrice est heureuse d’être en vie seulement depuis deux ans.
Quand Beronica l’équatorienne  dit que « la vie c’est étudier, éprouver, palper, voir, être vivant, être heureux, sourire, pleurer aussi » ce pourrait être une litanie légèrement niaise alors que le bonheur d’apprendre ne va plus de soi  chez nous pour des générations dont des bataillons de souteneurs psychologiques, de cireurs de pompes, de gaveurs de produits ont enrobé, dérobé, toute énergie, tout plaisir.

vendredi 20 décembre 2013

L’héroïsme : une valeur d’aujourd’hui ?



« Un bon héros est un héros mort »
«Il n’y a point de héros pour son valet de chambre»
Les formules définitives à graver au fronton de  mausolées ne manqueraient pas, mais en ces temps ricaneurs, j’ai bien aimé dans Libé, la pensée originale de Susan Neiman philosophe lors d’un article préparatoire au débat organisé par la Villa Gillet, à l’hôtel de région à Lyon:
«  Hegel s’était posé la question : «Il n’y a pas de héros pour son valet de chambre ; mais non pas parce que le héros n’est pas un héros, mais parce que le valet de chambre est un valet de chambre.» Le valet a une vision du monde fruste et grossière, et il fera tout en son pouvoir pour la corroborer. Les gens mesquins et dénués de générosité voient la mesquinerie et la parcimonie partout ; les âmes généreuses, elles, recherchent leurs semblables. »
Elle rappelle : « Le terroriste des uns est le combattant de la liberté des autres. »
Lors de ce débat bien mené, le reporter JP Mari de l’Obs a  souvent joué au journaliste, contribuant à créer la confusion entre victime souffrante et héros, en enchainant quelques généralités  telles que « soldats de la paix », mais Vincent Azouley expert en Grec à l’ancienne, familier d’Ulysse, héros incontesté  bien que mal parti et la philosophe ont élevé le débat bien mené par Olivier Pascal Mousselard lui aussi journaliste à Télérama comme je les aime, n’envahissant pas l’espace, posant des questions vives et cadrantes. Il s’interrogeait pourquoi à la mi-temps de France All blacks sur le service public lançant une série de documentaires sur 14-18, il n’était plus question que  de « tous ces héros » pour qualifier les combattants : est ce plus vendeur ?  
Sans aller comme un écrivain suisse, Benjamin Wilkomirski, qui s’était inventé une enfance en camp de concentration, il est certain qu’aujourd’hui la reconnaissance passe par la  compétition des souffrances : ce n’est plus l’acteur qui parle mais ce que le monde nous fait subir.
Le héros se détache de l’humaine condition en mettant en jeu la vie et la mort mais le grand homme se juge dans la durée.
 À Ulysse qui le félicite de régner parmi les morts, Achille répond :
« J'aimerais mieux être sur terre domestique d'un paysan,
Fût-il sans patrimoine et presque sans ressources,
Que de régner ici parmi ces ombres consumées. »
Giordano Bruno a été brûlé, Brecht dans « La vie de Galilée » met en scène le disciple de l’auteur de « pourtant elle tourne », indigné par le fait que son maître se soit renié, il dit :
« Malheureux le pays qui n'a pas de héros! »
Galilée répond :
« Malheureux le pays qui a besoin de héros. »
Quand le néo libéralisme triomphe, le héros qui doit inspirer, nous élever, nous libérer  ne se trouve pas chez les sportifs (« Shako président », le « r » n’a pas sauté il s’agit de celui qui a été décisif contre l’Ukraine en foot), ni dans une boite de Viagra pour accéder au titre de « héros de l’amour ». 70 vierges qui attendraient au paradis ne sont qu’un faux prétexte pour risquer sa vie : le fondamentalisme est plus sérieux. 
J’ai le sentiment d’un éternel retour avec une invitation à nous réapproprier les mots, c’est que nous ne serions pas sorti des prémices : « au commencement était le verbe ».
………….
Dans le Canard de cette semaine :  

jeudi 19 décembre 2013

Biennale d’art contemporain de Lyon. 2013.



Est-ce que parce que l’art contemporain est un marqueur culturel impitoyable, un domaine de spéculation affolant, que nous devons nous interdire de nous tenir au courant de ce qui se présente à nos yeux ?
Les obstacles sont nombreux : un verbiage le plus souvent abscons accompagnant les œuvres,
une communication hiératique : l’œil poché qui annonce la biennale, une tête de cochon ou une bulle de chewing-gum sont-ils incitatifs ?
Quand on annonce « un moment  délicieusement érotique de superposition, et nous nous réjouissons de repérer la perfidie » pour des bouteilles pendues sous un cadre, il y a de quoi débander, nous débander.
La profusion des artistes est-elle décourageante ou permet-elle, aux familiers du zapping, des découvertes, en épargnant les raseurs ?
Je livre quelques mots depuis deux lieux : le MAC et la Sucrière, en passant par-dessus les vêtements sur le sol, quelques bites, des BD agrandies, quelques rames de papier, des parpaings, des titres bidons et des provocations datant de Mathusalem accompagnées de tant d’oublis.

Pour être peu sensibles aux vidéos proposées en général en ces lieux, je change d’avis avec Takao Minami qui respecte le thème de cette 12° biennale consacrée au récit « Entre temps, brusquement et ensuite. » Des personnages fragiles irisés de lumière traversent des paysages rêvés participant à un univers original, poétique qui nous offre une belle découverte tout en nous paraissant familier. 
Gustavo Speridiao a apporté pour moi une touche d’humour au cours d’une pérégrination qui n’était pas là pour rigoler. Une histoire de l’art vraiment personnelle : une série de  photographies souvent originales aux titres décalés.
« Nous sommes les pirates d’une histoire inexplorée » sonne pas mal comme titre de Takewata qui s’attaque à Fukushima, rien que ça.
Le collectif Madein company présente sous vitrine des gestes des religions, du sport ou  de la politique qui se ressemblent. Cela conviendrait mieux à un musée d’anthropologie mais les rapprochements sont stimulants.

Paulo Nazareth a payé de sa personne en faisant le trajet de Johannesburg à Lyon à pied, il a déposé quelques étiquettes ramassées au cours du périple.
Les projections d’images poétiques sur du sable de Gabriela Fridrksdottir font partie d’une installation qui regroupe une vidéo aux allures chamaniques, des bouteilles en verre soufflé, une construction semblable à un fruit dans un environnement soigné de sons comme dans quelques autres propositions succinctement décrites ci-dessus. 

mercredi 18 décembre 2013

Ethiopie J 13. Konso.



Nous devons pas mal rouler aujourd’hui revenant sur nos pas vers Key Afer. Dans la plaine, nous bifurquons par une piste rectiligne que nous suivons un long moment avant d’atteindre un village Arbore.
Le rituel commence : un guide local nous explique les coutumes du village constitué de trois tribus différentes, qui ont créé une langue commune pour cohabiter.
Les filles ont la tête rasée et s’habillent de peaux de bêtes alors que les femmes mariées se laissent pousser les cheveux et se ceignent la taille avec du tissu.
Autour de nous la population grossit,  sauf des femmes occupées à refagoter l’armature d’une case, remplaçant les parties noircies par le feu.
La séance photo peut commencer, nous choisissons les figurants  par groupes de trois. Les demandes de soap, t-shirt, de nos bracelets se multiplient, les soldes pour les photos arrivent…  nous parvenons à remonter dans les 4X4, après avoir acheté un tabouret.
Nous subissons une nouvelle crevaison après avoir croisé des pintades peu farouches.
Nous mangeons dans un  restaurant routier, assez grand, avec plusieurs paillotes. On nous sert deux plateaux pour 6 sans viande à cause du jeûne car nous sommes vendredi.
Nous nous régalons de purée de pois cassés et lentilles rouges légèrement pimentées.

Des merles métalliques s’approchent des plats qu’ils picorent en compagnie des worabées (tisserins jaunes) de façon assez effrontée. Les becs affamés font inévitablement basculer dans un grand bruit de métal des plateaux disposés avec les restes sur une murette.
La route vers Konso passe dans des paysages verdoyants de collines où se distinguent des terrasses et grimpe en pente non négligeable vers des altitudes plus élevées.
La ville de Konso se répartit autour de la rue centrale descendant sérieusement jusqu’au rond-point faisant référence à l’UNESCO.
Notre hôtel, « The green Hôtel » n’est pas très reluisant avec une cour ravinée où sont plantés quatre totems en bois et deux abris circulaires surmontés de toits de chaume traditionnels. Nous logeons dans des chambres au rez-de-chaussée, le premier étage est encore en construction. Pas d’eau courante, nous nous contenterons du seau d’eau, quant à la lumière , Achenafi, un de nos accompagnateurs, court acheter des ampoules.
Nous partons à pied, dans la ville que nous pouvons parcourir tranquillement : « welcome ».
Nous nous asseyons un moment sur un banc de terre adossé à la case d’handicraft d’où nous observons la vie de la rue : femmes croulant sous le poids de fagots, habillées de jupes traditionnelles blanches retournées et ceinturées en haut, des enfants, des motos, des hommes en habit musulman ou européen et une colonne de jeunes portant leurs pelles, rentrant du travail.
Autour d’une table bancale nous nous réunissons pour discuter, lire, compléter nos journaux. Girmay nous raconte comment enfant il attirait les pintades avec des plumes pour les prendre  au collet.

mardi 17 décembre 2013

La vie secrète des jeunes. Riad Sattouf.


Le dessinateur de Charlie hebdo a beau annoncer au début de chacune des scènes, qu’il croque, que ce sont des situations « vues et entendues », nous sommes partagés entre l’effarement et l’admiration de voir la réalité si efficacement attrapée.
Dans le métro, les fast food, dans la rue, quand le téléphone portable amplifie l’impudeur, les jeunes ne sont guère saisi à leur avantage dans les traits de leur visage, ni dans leurs paroles.
Les relations sont souvent violentes et quand il s’agit des enfants, on ne rigole pas ; c’est parfois ignoble.
Cette accumulation sur 160 pages poursuivie sur trois tomes est un document utile sur l’état de la société qui se lit facilement grâce à un humour qui met à distance les plus sordides situations.
La transcription des langages est fine, cocasse et sans pitié pour les tics et la vacuité.
Je vais essayer de lire La Bruyère avec ses portraits piquants auxquels j’ai pensé à cette occasion. 
Plus vif que l’émission strip tease mais de la même acuité, il cultive chez nous un pessimisme des plus tenaces. Faut-il en rire ou en pleurer ? Pour les héritiers d’Hara Kiri, « le journal bête et méchant », le vivier où barbotent les stupides, les perdus, les brutaux est encombré, avec donc d’autres volumes à dévorer.

lundi 16 décembre 2013

Nos héros sont morts ce soir. David Perrault.



Film en noir et blanc avec des personnages qui ne le sont pas moins, contrastés.
Sur les rings de catch, « Le spectre » rencontre l’ « Equarisseur de Belleville » et inversement, reproduction de la rivalité de « L’ange blanc » contre « le bourreau de Béthune » que tout le monde savait factice dans ces années de guerre d’Algérie qui, elle, n’était pas du jeu.
Ambiance de bistrots enfumés, avec œuf dur sur le zinc, juke box, personnages à la Gabin, serveuse lettrée, méchant méchant.
Le dilemme primaire dans lequel sont présentés les personnages aimablement éclairés ne nous touche guère. Certains spectateurs avaient marché avec le muet « The artist », pas sûr que ce film parlant qui suivrait le filon rétro séduise autant.
« Il ne faut pas effaroucher les songes » est-il dit, certes, mais d’autres formules, copies décolorées de ces années 50 finissantes, telle qu’«  il faut prendre et non comprendre » ne rentrera pas dans le répertoire des répliques cultes de films qui valaient alors pour leurs dialogues savoureux.

dimanche 15 décembre 2013

Katlehong Cabaret.



Depuis une banlieue de Johannesburg huit danseurs musiciens et chanteurs ont débarqué sur la scène de la grande salle de la MC2  et nous ont enchantés.
Poings levés et les deux pieds surtout pas dans le même sabot, en bottes de caoutchouc ou en claquettes avec humour et une énergie communicative, ils nous ont régalés. 
Quand les morts sont évoqués par le meneur de revue, on le croit, car si leurs danses tapageuses évoquent la tradition, elles s’emparent aussi du hip hop, en des défis, des séquences bien menées.
La chanteuse avec conviction et sensibilité entraine les danseurs chanteurs inépuisables.
La danse « festive et rebelle »,  est élémentaire, humaniste : c’est la culture pantsula.
Je recopie sur le site www.danseraparis.com/
« Pantsula est un mot zoulou qui signifie "marcher avec les fesses retroussées" ou "se dandiner comme un canard"; ce qui représente une des caractéristiques de cette danse. Egalement, les danseurs frappent et glissent sur le sol avec leurs pieds.
Cette danse, en constante évolution grâce aux mouvements qui s'inspirent de situations et de gestes du quotidien, est une danse urbaine codifiée qui demande beaucoup de virtuosité.
Le mouvement libérateur que représente la Pantsula s'exprime à travers une danse énergique, puissante où il est constamment nécessaire de se démarquer par la recherche de pas originaux. « 
Bien d’autres spectacles en comparaison apparaitront plus fades et maniérés et nos « clap clap » des politesses, alors que c’était toute une salle debout qui battait ce samedi.

samedi 14 décembre 2013

Les variations Bradshaw. Rachel Cusk.


La littérature joue à la musique : 32 chapitres comme les variations Goldberg de Bach,  pour décrire quelques couples anglais qui cherchent une partition leur convenant au mieux : ils se cherchent, s’ennuient, doucement, entre rêves et compromis.
 « - Je lisais un livre, un peu plus tôt, raconte Thomas, sur un homme qui tue sa femme parce qu’elle joue du piano. » […]
«- Vous devriez lire des livres plus joyeux, suggère Olga. Pourquoi se rendre la vie plus difficile ? […]
- Je ne sais pas pourquoi ; Je n’y ai jamais réfléchi. Vous lisez des livres joyeux vous ? » […]
- Moi je lis des magazines »
Le regard de l’auteur est minutieux, cernant les enjeux des moindres gestes du quotidien, en exalte la portée pour l’achat d’un manteau, l’adoption d’un chien …
« L’aéroport d’Amsterdam avec ses bâtiments gris et bas surgit sous des rideaux de pluie horizontaux. Des véhicules en forme de boites sont garés sur le tarmac entre des mares d’eau ridées par le vent. L’anonymat de ce lieu est presque excitant. Lui aussi est rationnel, impersonnel. Il lave Tonie des heurts qu’entrainent les relations humaines. Il la délivre de tout ce qui est privé et particulier, de l’émotion elle-même. »

vendredi 13 décembre 2013

Ecole : faux rythmes, idées courtes et grosse fatigue.


Content :
Le ministre de l’éducation est content des interrogés par ses services qui sont contents de sa réforme des rythmes scolaires : l’affaire est bouclée, subventionnée : alors silence dans les rangs.
Cette affaire des rythmes signe une étape de plus dans la perte de pouvoir de l’école avec la complicité de ceux qui y travaillent. Les agents de l’état voient leur classe, mise au service des petites séductions et lubbies locales.   
Puisqu’on vous dit que l’école fatigue, les enfants baignés dans cette litanie quotidienne, se demandent : à quoi bon travailler ? 
Général :
Sur France Inter, je n’en croyais pas mes oreilles, mais le si sûr de lui meneur de liste aux européennes, ci présent ministre, pense que pour gagner des places au classement PISA, il conviendra de laisser la décision d’orientation aux parents à l’issue de la 3°. Il devra prévoir des postes supplémentaires en lycée et quelques serpillères pour accompagner les profs de collège qui manquent tant de discernement.
Tous en enseignement général, même pour ceux qui n’ont guère d’appétit.
Patère :
Quand il faut perdre du temps à négocier avec certains élèves pour qu’ils daignent  poser leur doudoune  les protégeant de toute intrusion extérieure, de tout apport, faudra-t-il ajouter un item aux évaluations, avec accessit pour qui dit « bonjour  madame» ?
On me dit dans mon oreillette que c'est déjà le cas.
Recopier le devoir d’un camarade pourrait attirer les compliments :
« A bien voulu regarder son cahier de textes et a apporté sa contribution au travail en équipe » !
Mais cette usine à gags a déjà beaucoup donné.
Morsure :
Dans un commentaire posté  à propos d’une BD mettant en scène de vertes engueulades entre parents et enseignants, une maman se plaignait de la punition infligée à son petit parce qu’il en avait mordu un autre, alors qu’ « elle ne lui avait pas appris à mordre » : donc les enseignants étaient vraiment en dessous de tout.  D’abord tenté de ne pas ajouter de commentaire tant ce témoignage demeurait sur le terrain de la caricature, je retiens cette réaction en ces temps sans nuances, cette défiance à l’égard de tout autre éduquant que soi est significative.
Le spectacle du représentant de la nation qui avait endossé les habits du coq a beau avoir disparu des écrans : cette arrogance, ce culot, cette certitude d’avoir toujours raison est le lot de nos rapports sociaux.
Alors que le manque de confiance en soi a été repéré comme un des maux de notre système éducatif combien de fanfarons, d’inaccessibles à la moindre remarque ?
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Le dessin de Cabu ci-dessus était dans "Le Canard" de cettte semaine, celui de Willem ci dessous dans "Libération":