samedi 22 octobre 2011

Voyages en France. Eric Dupin.

Le sous titre : « la fatigue de la modernité » aurait du inciter la Librairie du Square a ne pas placer ces 378 pages au rayon « voyages » mais dans « les sciences humaines ».
Il est surtout question de femmes et d’hommes rencontrés par l’ancien journaliste de Libération au cours de ses pérégrinations dans l’hexagone où « l’ennui provincial n’est plus ce qu’il était ».
Les paysages ont beau avoir tendance à se fermer sous les résineux grignotant les champs, leur diversité fait le charme de notre vieux pays.
C’est aussi la fracture sociale sous le nez de cet ostréiculteur :  
« On s’appauvrit de plus en plus alors que les ports sont pleins de gros yachts qui valent un prix pas possible ! Il y a de quoi être écœuré. Toi tu bosses toute ta vie et tu as même du mal à payer le bateau qui te sert à travailler ».
Ailleurs une association de producteurs de lait cite marcel Aymé :
« L’injustice sociale est une évidence si familière, elle est d’une constitution si robuste, qu’elle parait facilement naturelle à ceux qui en sont victimes ».
La politique est la trame de tout le livre, vivant des alternatives dans les Cévennes bien sûr, mais aussi en Puisaye ou dans le Tarn, variante d’une somme de bonnes volontés cherchant le progrès humain.
Cycliste en Normandie, l’auteur, s’est éloigné des grandes villes. Il a pourtant marché par exemple à Lille ou dans les centres clonés des agglomérations moyennes ; il a pris le temps de l’écoute dans les zones périurbaines ou profondément rurales avec un avenir se cherchant du côté du tourisme. Là se panse peut être le manque de temps dont se plaignent beaucoup de nos compatriotes.
Dans un dernier chapitre sont rassemblés des éléments recueillis tout au long de rencontres sympathiques, évoquant un « exode urbain » avec quelques observations justes :  
« …notre société dépense infiniment plus d’efforts et d’argent à la santé physique qu’à la santé mentale. On s’acharne à sauver le corps de vieillards, parfois au-delà du bon sens, et on laisse se dérégler l’esprit de tant de jeunes. »
Rappels limpides d’une réalité tellement familière qu’elle échappe parfois derrière les écrans qui nous enserrent. Et prise de recul du journaliste qui réhabilite pas sa modestie une profession dont on ne voit que trop souvent l’arrogance et le dilettantisme.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire