mardi 14 avril 2009

Les Kinés # 3

Arrive à la suite de Kiné # 1 et # 2 publiés les mardis précédents
Virgile
Le jour de la séance de massage tant attendu, il s’est mis à geler à pierre fendre. C’était le moment de sortir le gros bébé rose.
J’ai d’abord enfilé le string de chez Z. et puis les nippes habituelles marques Bernard, Trois Cuisses, Amamie, Camard.
Dans la salle d’attente, il faisait si chaud que j’ai voulu ôter mon manteau. Comme la fermeture à glissière ne glissait pas j’ai résolu d’attendre que Virgile me prenne en charge.
Le prince des lieux m’a invitée à pénétrer dans son local. Un Virgile conforme à la description qu’en avait faite Juliette. Je dirais même selon l’expression favorite d’une de mes petites filles : « en plus mieux ».
J’étais en nage.
- Mettez-vous à votre aise. Je reviens.
Et il est parti avec son air à la Lambert Wilson. Dans son costume noir de champion de Kwen Khi Doo.
C’est alors qu’a commencé mon martyre.
Impossible de bouger d’un millimètre cette foutue glissière. Bloquée.
Je me suis mise au boulot. Et que je te tire vers le haut et que je te violente vers le bas. Elle ne bouge pas. La sueur ruisselle, ma douche est foutue, je vais sentir pas bon. Han ! En haut. Han ! En bas.
Prisonnière du bibendum, la Micheline !
Virgile entre :
- Ah, vous trouvez qu’il ne fait pas assez chaud, je vais monter le chauffage !
- NOOOOOOOOOOOOOON !
Il me regarde stupéfait.
- Je suis coincée dans mon manteau… la fermeture est bloquée et j’ai si chaud !
- Vous permettez…
Il s’active pour me désincarcérer. Il tire, il pousse, il souffle, il tord, il froisse, en vain. Il commence à s’énerver le Virgile. Le voici qui brutalement empoigne le haut du manteau, qu’il me secoue, qu’il me soulève de cette façon… comme s’il allait m’en mettre une. Non. Il m’agite, exaspéré. Il me balance à droite à gauche. Il me couche à plat, à califourchon sur mon édredon il s’acharne. Mon string s’est réfugié au fond de mon collant pure laine.
- Pitiéééééééééééééééééééééééééé !
Les yeux fous, il m’ envoie rouler sur le tatami, se prend le visage dans les mains. « Excusez-moi ! Je n’arrive à rien avec votre panne de glissière. Made in China, probable…
Lui ça se voit qu’il dégouline ! Moi je cuis à l’étouffé.
- C’est moi… Je reprendrai rendez-vous… Je vous laisse un chèque.
Mes ciseaux de couturière sont redoutables. Aiguisage chaque année. Le bibendum rose passe un mauvais quart d’heure. Sa chair blanche, idiote et synthétique, se répand à mes pieds tandis que peu à peu je retrouve ma liberté.
Mes cervicales en ont pris un coup. La rhumatologue malgache m’a redonné quinze séances. Juliette était contente de me revoir. On a continué à refaire le monde et j’ai repris rendez-vous pour la fin du mois avec Virgile.
- En confidence je peux vous dire qu’il a eu peur pour vous. C’était plutôt rigolo, en fin de compte, non ?
- Après coup. Oui.
- Enfin ça l’a secoué, Virgile !
- Moi aussi !

Marie Treize

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